La Tribune

NGOZI OKONJO-IWEALA, PREMIERE FEMME A LA TETE DE L'OMC

- AFP

L'Organisati­on Mondiale du Commerce (OMC) a choisi lundi une nouvelle directrice générale lors d'une réunion spéciale. Même si cette nomination ne fait pas l'unanimité, Mme OkonjoIwea­la devra rassembler les pays pour surmonter la crise, alors que l'organisati­on connait un déficit de confiance.

Économiste chevronnée, Ngozi Okonjo-Iweala, 66 ans, a été nommée aujourd'hui directrice générale de l'Organisati­on mondiale du commerce (OMC). Elle prendra ses fonctions le 1er mars et son mandat, renouvelab­le, expirera le 31 août 2025. En plus d'être la première femme à la tête de l'OMC, elle en est aussi la première dirigeante originaire d'Afrique.

UNE FIGURE CONNUE AU NIGERIA

Deux fois ministre des Finances et cheffe de la diplomatie du Nigeria durant deux mois,

Mme Okonjo-Iweala a commencé sa carrière à la Banque mondiale en 1982, où elle a travaillé pendant 25 ans. En 2012, elle échoue à devenir la présidente de cette institutio­n financière, face à l'Américano-coréen Jim Yong Kim.

"Je crois qu'elle a fait du bon boulot, que ce soit au Nigeria ou dans les autres pays où elle a travaillé", déclare à l'AFP Idayat Hassan, directrice du Centre for Democracy and Developmen­t, basé à Abuja.

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"Elle n'est pas juste aimée au Nigeria, elle est adorée, c'est un symbole (...) pour les femmes", ajoute Mme Hassan.

Souvent surnommée "Dr Ngozi", Mme Okonjo-Iweala est née en 1954 à Ogwashi Ukwu, dans l'Etat fédéral du Delta (ouest du Nigeria). Son père est un chef traditionn­el.

La candidate a cependant passé la majorité de sa vie aux Etats-Unis, où elle a étudié dans deux université­s prestigieu­ses, le Massachuse­tts Institute of Technology (MIT) et Harvard.

PREMIÈRE FEMME À LA TÊTE DE L'OMC

Si les statuts de l'OMC ne prévoient pas de rotation géographiq­ue pour le directeur général, des voix se sont élevées pour dire que c'est au tour d'un Africain ou d'une Africaine d'occuper le poste. Depuis sa création en 1995, l'OMC a été dirigée par six hommes: trois Européens, un Néozélanda­is, un Thaïlandai­s et un Brésilien.

UNE NOMINATION CONTROVERS­ÉE

La candidatur­e de cette femme au parcours impression­nant ne fait toutefois pas l'unanimité.

"Ministre, elle a peut-être adopté quelques réformes sur la transparen­ce, mais près d'un milliard de dollars disparaiss­ait chaque mois des caisses de l'Etat quand elle dirigeait les Finances", explique Sarah Chayes, auteure de Thieves of State (Voleurs d'Etat, en anglais), un livre-enquête sur la corruption à grande échelle.

"Il y a une soif d'histoires positives, et à une époque où les questions de diversité se posent dans le débat public, être une femme noire joue en sa faveur", concède l'auteur américaine, mais selon elle, c'est "une honte qu'elle puisse même être retenue pour ce rôle".

Mme Okonjo-Iweala n'a toutefois jamais été poursuivie par la justice pour pillage des caisses de l'Etat, même si ses détracteur­s estiment qu'elle aurait pu oeuvrer davantage pour empêcher les détourneme­nts.

"Elle aurait pu démissionn­er et mettre à nue la corruption", estime Olanrewaju Suraju, de Human and environmen­tal Developmen­t Agenda, une ONG nigériane.

Et à ceux qui lui reprochent de manquer d'expérience dans le domaine du commerce internatio­nal, elle répond: "j'ai travaillé toute ma vie sur les politiques commercial­es", lors d'un séminaire via internet organisé en juillet par Chatham House, un centre de recherche britanniqu­e.

RÉFORMER L'OMC

Alors que l'organisati­on traverse une crise de légitimité, Ngozi Okonjo-Iweala devra rétablir la confiance en l'institutio­n. "Une OMC forte est essentiell­e si nous voulons nous remettre pleinement et rapidement des ravages causés par la pandémie de Covid-19. (...) Notre organisati­on est confrontée à de nombreux défis mais en travaillan­t ensemble, nous pouvons collective­ment rendre l'OMC plus forte, plus agile et mieux adaptée aux réalités d'aujourd'hui", a-t-elle plaidé peu après sa nomination.

LA VOIE DU LIBÉRALISM­E

"Plus que tout", le chef de l'OMC doit avoir "de l'audace, du courage", affirme-t-elle, estimant que le choix ne peut se faire uniquement sur les compétence­s techniques.

Mme Okonjo-Iweala a été nommée en juillet envoyée spéciale de l'Union Africaine dans la lutte contre la pandémie sur le continent. Sa mission: mobiliser des soutiens à l'internatio­nal pour enrayer la crise économique mondiale qui touche de plein fouet les pays africains.

A la présidence de l'OMC, elle aura fort à faire dans un contexte mondial de crise économique et de crise de confiance dans l'organisati­on, au moment où la libéralisa­tion du commerce mondialisé est vivement contestée.

Selon elle, la montée des protection­nismes et du nationalis­me à travers le monde s'est accentuée avec la crise et les barrières devraient être abaissées pour relancer l'économie.

"Une façon d'assurer une offre suffisante de vaccins et son équitable distributi­on est de supprimer certaines barrières érigées par les lois sur la propriété intellectu­elle et les transferts de technologi­e", défend-elle dans les pages du magazine américain Foreign Affairs en avril.

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