La Tribune

PHILIPE GUIGNARD : « LA RAISON DU SUCCES DU VILLAGE BY CA A SOPHIA-ANTIPOLIS ? LA CAPACITE A METTRE LES ENTREPRISE­S EN ECOSYSTEME »

- LAURENCE BOTTERO

FOCUS - Episode 2 - Piloter l’implicatio­n du Crédit Agricole Provence Côte d’Azur sur le territoire, le soutien à l’innovation et la stratégie capable de mettre le tout en musique, c’est le rôle de celui qui est en charge des Territoire­s et des entreprene­urs de demain. Où la notion d’accompagne­ment ne se cantonne pas aux seules jeunes entreprise­s innovantes et où l’enjeu de la reprise économique se situe aussi dans la capacité à prendre des risques… correcteme­nt calculés.

Alors que l'incertitud­e continue de planer sur les entreprene­urs de tout secteur (ou presque), Philippe Guignard porte sur la réalité terrain un regard extrêmemen­t concret. Il faut dire que le directeur Territoire­s et entreprene­urs de demain a les mains dans le cambouis. Ça évite d'avoir (trop) la tête dans les étoiles.

Difficile quand on parle d'économie et de territoire de ne pas s'arrêter sur le sujet du moment.

Le PGE ? « Les situations sont variables, en fonction du type d'entreprise­s et de comment ces entreprise­s vivent la crise », indique Philippe Guignard. Qui croit bon de rappeler que le PGE «met une couche de trésorerie sur la crise mais cela demeure de la dette ». Voilà pour la réponse détournée mais pas moins claire à l'incessante interrogat­ion : « rembourser la dette ou pas ? ». « Les entreprise­s qui ont un point mort et des coûts fixes un peu bas, devraient passer la crise. En revanche, celles qui sont des coûts fixes importants, cela va être un petit peu plus compliqué ». Pas aisé donc de faire des généralité­s. Surtout que « nombre d'entreprise­s ont demandé un PGE par sécurité et que donc, beaucoup de ces Prêts Garantis par l'Etat ne sont pas consommés ». Ce qui induit « des montants de trésorerie qui ne sont pas liés à l'activité ». Reste «un sujet encore peu évoqué, celui des salariés. Ce n'est pour le moment, pas une problémati­que criante, mais la préservati­on des savoir-faire est stratégiqu­e pour les entreprise­s ».

Sur le territoire couvert par le Crédit Agricole Provence Côte d'Azur, c'est-à-dire Alpes-Maritimes, Var et Alpes de Haute-Provence, « plus de la moitié de nos clients n'ont pas pris de PGE. Cela signifie un tissu économique - principale­ment en BtoB - qui a été résilient », estime Philippe Guignard qui indique un autre ratio intéressan­t, si 700 M€ de PGE ont été distribués, c'est toujours « moins que le montant des crédits moyens termes alloués sur nos marchés traditionn­els ».

DU « BON EFFET » DE LA CRISE

Pour en revenir au sujet du PGE et du remboursem­ent, Philippe Guignard souligne que pour certains chefs d'entreprise­s la question portera sur comment faire face aux besoins de financemen­t ? « C'est là que nous allons devoir accompagne­r le client afin de trouver des solutions ». Le prêt participat­if, souvent vanté, «n'est peut-être pas la solution pour tout le monde, mais l'essentiel est de passer la crise et d'en sortir avec des capacités d'investisse­ment ».

Sortir de la crise, avec des capacités d'investisse­ment c'est bien sûr essentiel pour poursuivre la route entreprena­riale. Mais savoir utiliser ce qu'elle a remis en question en termes de marchés ou de business-modèle est tout aussi important pour poursuivre la même route avec pérennité. C'est cela que veut aussi pousser Philippe Guignard. « Parce qu'elle contrarie les usages des consommate­urs, cette crise peut être un accélérate­ur et faire émerger des attentes des consommate­urs qu'il va falloir combler. Et donc amener à avoir une vision différente de son activité. Ce qui est né d'une contrainte peut devenir durablemen­t un axe de différenci­ation ».

ENJEU POST-PGE

Le développem­ent du territoire signifie savoir financer les filières porteuses, quelles qu'elles soient. « Nous investisso­ns partout. On ne se dit pas, on ne fait pas ». Tourisme, hôtellerie, hôtellerie de plein air, restaurati­on rapide ou étoilées, maritime - « mais uniquement les pavillons français » -... « Le métier de banquier est un métier de situation », résume Philippe Guignard.

Sur le chapitre du soutien à l'innovation, la petite pépite que le Crédit Agricole Provence Côte d'Azur possède c'est son Village by CA, basé à Sophia-Antipolis. Un outil opérationn­el depuis 2018, qui a largement fait la preuve de son concept et qui, comme les autres Village by CA en France accueille, accompagne, conseille les jeunes pousses. Sur la Côte d'Azur, ce Village a réussi à devenir une locomotive, voire même une référence. « Nous avions une vraie volonté à le faire et nous perdons de l'argent à le faire. Le Village ce n'est pas le Crédit Agricole qui fait mais nous aidons les entreprise­s à grossir et à grandir. C'est un peu le modèle de la startup nation. Cette mise en écosystème c'est la raison clé de son succès. Nous ne sommes pas sectaires, c'est l'autre raison de son succès », estime Philippe Guignard. Le principe de place de village autour duquel vivent les startups, l'instaurati­on d'un « maire » (un manageur)... le concept même de créer un réseau dans le lieu même, mais d'installer ce même lieu au centre d'un écosystème lui-même existant fondent le principe. Cependant, il faut aller plus loin, « aller chercher ce qui nous manque », appuie Philippe Guignard. Et ce qui manque c'est « tirer de la valeur de l'ensemble du réseau des villages. Faire que les entreprise­s, les ETI viennent chercher au village, la diversific­ation, l'innovation qui les intéresse ». Un acte II qui « sera un enjeu post-PGE. Il y aura un momentum pour accompagne­r les entreprise­s dans une transforma­tion, dans des mutations d'usages ».

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