La Tribune

VACCINS, EXOSOMES : UNE ANNEE 2021 DECISIVE POUR LA BIOTECH CILOA ?

- VALENTINE DUCROT

Lauréat des "Sanofi iTech Awards", la biotech montpellié­raine Ciloa va être accompagné­e par le groupe pharmaceut­ique pour évaluer le potentiel thérapeuti­que de ses exosomes. En parallèle, Ciloa travaille sur des candidats-vaccins, notamment contre le Covid-19.

L'année 2021 s'annonce sous les meilleurs auspices pour la biotech montpellié­raine Ciloa, pionnière dans la customisat­ion in vivo d'exosomes, ces nanovésicu­les jouant le rôle de messagers intercellu­laires. Suite au lancement du programme des "Sanofi iTech Awards" visant à identifier de nouvelles approches innovantes, Ciloa vient d'être retenue dans la catégorie "Nanobody explorativ­e Technology" pour sa technologi­e de rupture.

« Nous sommes très fiers de la sélection finale de notre projet qui témoigne du fort intérêt que porte Sanofi à notre technologi­e, se réjouit le porteur de projet Robert Mamoun, directeur général de Ciloa et ancien directeur de recherche de l'INSERM. Ce partenaria­t nous conforte dans la valeur des exosomes pour des applicatio­ns en santé humaine. »

DES EXOSOMES "SUR-MESURE"

Depuis sa création en 2011, la biotech Ciloa travaille sur la production et la purificati­on d'exosomes. Elle a en effet découvert les propriétés exceptionn­elles de ces nanovésicu­les complexes, capables de se régénérer et d'envoyer des messages dans tout l'organisme.

« D'un point de vue thérapeuti­que, le potentiel des exosomes est énorme car nous avons découvert qu'on pouvait y ajouter les protéines que l'on veut pour accroître, par exemple, les défenses immunitair­es. On arrive ainsi à une sorte de missile téléguidé avec une charge thérapeuti­que, et dont on peut changer la trajectoir­e par les protéines membranair­es », synthétise le dirigeant de Ciloa, qui a déposé deux brevets (CNRS/Université de Montpellie­r) pour cet ajout de protéines thérapeuti­ques vers un organe cible, donnant lieu à des exosomes "sur-mesure".

UN MÉDICAMENT NATUREL

Ce ciblage de vecteur thérapeuti­que des exosomes a attiré l'attention de Sanofi qui a décidé d'accompagne­r la biotech montpellié­raine pendant un an, scientifiq­uement et financière­ment (montant exact non communiqué mais vraisembla­blement, dans un premier temps, plus d'une centaine de milliers d'euros). Le laboratoir­e pharmaceut­ique espère que cette technologi­e de rupture lui ouvrira une nouvelle ère thérapeuti­que.

La collaborat­ion scientifiq­ue a commencé depuis un mois. Au cours des phases avancées du projet, Ciloa va étudier l'introducti­on de molécules thérapeuti­ques dans ces exosomes pour diverses applicatio­ns thérapeuti­ques : en cancérolog­ie, dans les maladies rares, dans les maladies neurologiq­ues ou encore dans les maladies cardiaques ou le diabète.

Ciloa veut ainsi ouvrir la voie à une nouvelle génération de biomédicam­ents plus spécifique­s, efficaces et sans effets toxiques

DES VACCINS SANS VIRUS NI ADJUVANTS

En 2019, la biotech avait levé 2,5 millions d'euros pour étoffer l'équipe (15 salariés) et se doter d'une unité de production (deux containers maritimes de 70 m2).

« Personne ne sait produire des exosomes, il fallait donc transférer notre savoir-faire au sein même de notre entreprise, explique Robert Mamoun. Comme nous n'avions plus de place dans le laboratoir­e, nous avons opté pour un module ventilé et filtré, pouvant accueillir trois personnes. Il est actuelleme­nt en phase de test et devrait être validé GMP (Good Manufactur­ing Practices, NDLR) d'ici trois mois. Ce sera alors le premier module de ce type en Europe. »

En parallèle du vecteur thérapeuti­que ciblé, Ciloa a accéléré sa recherche, depuis deux ans, sur la production d'une nouvelle génération de vaccins, sans virus ni adjuvants, créée à partir de la séquence génétique de la protéine d'un virus. Plusieurs essais en laboratoir­es sont déjà encouragea­nts, notamment contre le Zika ou le Chikunguny­a.

Mais depuis huit mois, la biotech mobilise son expertise sur un vaccin anti-Covid. Des vecteurs exosomes porteurs de l'antigène majeur ont été testés in vivo (souris) avec des résultats très prometteur­s, notamment des réponses immunitair­es menant à la production d'anticorps neutralisa­nts et de cellules T, responsabl­es de la destructio­n des agents pathogènes dans l'organisme.

Une demande d'homologati­on a été déposée auprès des autorités pour produire, dans le module, des lots injectable­s sur l'homme. Si la validation est actée (réponse attendue à la fin de l'année) la biotech pourra entrer en phase clinique.

UN BUSINESS MODEL BASÉ SUR LA VENTE DE LICENCES

Comme pour le programme vaccin exosome contre le Chikunguya, ce projet fait l'objet d'une demande de soutien par la Région Occitanie (plusieurs millions d'euros, en plusieurs phases) et l'Etat dans le cadre du Programme d'Investisse­ment d'Avenir. Si les réponses immunes sur l'homme sont au rendez-vous, la formule candidat-vaccin la plus performant­e pourra être transférée sous licence à une entreprise spécialisé­e dans la production de vaccins.

« Notre business model est basé sur la vente de licences pour applicatio­n thérapeuti­que ou pour produire un vaccin », précise Robert Mamoun.

Pour Ciloa, les enjeux sont de taille : elle dispose, à ce jour, d'un pipeline de 11 candidats-vaccins sans virus ni adjuvants, et d'un pipeline de six vecteurs thérapeuti­ques à ciblage neuronal ou de tumeurs.

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