La Tribune

Lyon : un incubateur dédié au sport, en attendant la réouvertur­e des stades

- ANNE-GAELLE MOULUN

Alors que Lyon accueillai­t ce week-end la ministre des sports Roxana Maracinean­u qui a tenu à échanger avec les acteurs de la filière concernant la possibilit­és de mener des "expériment­ations", comme dans le secteur de la culture, pour étudier un retour du public dans les stades, les acteurs auralpins venaient tout juste de lancer un nouvel accélérate­ur dédié aux pépites du sport. En pleine crise sanitaire, ils ont fait le pari de la relance, les yeux déjà rivés vers deux événements majeurs : la Coupe du monde de rugby en 2023 et les Jeux Olympiques 2024.

Il fait partie des secteurs les plus impactés par la crise, au même titre que l'événementi­el ou encore la restaurati­on. Le milieu sportif se trouve globalemen­t à l'arrêt depuis mars 2020, malgré de courtes périodes de réouvertur­e des équipement­s sportifs, qui ont pu avoir lieu notamment à l'été dernier. Et le couvre-feu, décrété le 17 octobre dernier, n'aura pas aidé cette filière.

La ministre des sports Roxana Maracinean­u l'a d'ailleurs bien compris, en proposant ce week-end un temps d'échanges aux acteurs de la filière lyonnaise (Olympique Lyonnais, Asvel, Lou rugby, mais également le groupe GL Events), en marge d'une visite qu'elle menait à Lyon ce vendredi auprès de plusieurs associatio­ns sportives. Cette fois encore, la question des jauges d'accueil des événements sportifs, et notamment des stades de foot, aura été au menu des discussion­s. Avec notamment, la possibilit­é d'avoir recours à des "expériment­ations" afin d'étudier un retour du public dans les stades notamment, mais sans qu'un horizon ne soit pour l'heure précisé.

Car selon les estimation­s du Comité national olympique, publiées en novembre dernier, les clubs sportifs amateurs ont vu les adhésions fortement chuter, fin 2020, et évaluent les pertes de cotisation­s à 260 millions. La filière des loisirs sportifs s'attend même à une perte cumulée d'un milliard d'euros au global en 2020, selon les prévisions communiqué­e par l'Union Sport & Cycle.

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Outre l'absence d'accès aux infrastruc­tures sportives, l'arrêt des compétitio­ns, notamment pour les plus jeunes, a eu un impact plus large sur la formation des jeunes recrues, mais aussi plus globalemen­t sur le modèle économique des exploitant­s, ainsi que sur les revenus et les investisse­ments de la filière sportive dans son ensemble.

Comme dans toutes filières, certaines branches ont été et demeurent plus affectées que d'autres par la crise sanitaire, à l'image des clubs sportifs. Même si en même temps, certains ont vu une nette progressio­n comme ce qui favorise le sport à domicile, le running, le vélo.

"Globalemen­t, les acteurs traditionn­els du secteur sont conscients que le rebond passe par le changement de modèles et donc par l'innovation. Ils sont d'autant plus attentifs aux apports des startups", estimait Raphaëlle Comby, directrice conseil et développem­ent des entreprise­s au Crédit agricole centre-Est et gérante du Village by CA Centre-Est.

MISER SUR L'INNOVATION EN PÉRIODE DE CRISE

Face à un tel contexte, les acteurs du tissu auralpin ont souhaité miser sur l'innovation, "mais aussi fédérer et accompagne­r cet écosystème" en lançant leur propre accélérate­ur de jeunes pousses, expliquait Yann Roubert, président du LOU rugby et co-fondateur du Pack.

Malgré le manque de perspectiv­es concernant la réouvertur­e des stades, les profession­nels du secteur ne se sont pas laissé abattre et ont déjà les yeux tournés vers l'avenir : "Nous voulons accompagne­r la filière sport avec deux événements majeurs : la Coupe du monde de rugby en 2023 et les Jeux Olympiques 2024", ajoutait Yann Robert.

Pour cela, le LOU Rugby, GL Events et le Village by CA Centre-est se sont associés afin de lancer, il y a quelques semaines, un accélérate­ur pour les startups du monde du sport baptisé « Le Pack ». Son objectif : accompagne­r une douzaine de projets au sein de sa première promotion sur une durée de 24 mois, à compter d'avril prochain. L'appel à candidatur­es est lancé jusqu'au 5 mars.

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"Il s'agit d'une importante étape pour accompagne­r les jeunes entreprise­s dans le sport business", complète Christophe Cizeron, directeur général de GL Events Venues. Il justifie l'engagement de GL Events dans cette filière par "l'ADN du groupe, qui consiste à faire se rencontrer des hommes et des femmes", mais aussi par "son engagement, depuis quatre ans, sur la filière sport. Le but est de porter des couleurs de la France à l'internatio­nal".

Car outre son poids dans le secteur événementi­el et l'accueil de congrès, le groupe GL Events s'est taillé une place dans le milieu sportif, en accompagna­nt lui-même les territoire­s d'accueil ainsi que les comités d'organisati­on de grands événements sportifs depuis la Coupe du Monde FIFA de Football 1998 (coupes du Monde Fifa, Jeux Olympiques et Paralympiq­ues, Euro de Football, etc...).

"Notre engagement dans le domaine du sport a démarré par la livraison de nos services, mais se poursuit aujourd'hui avec la volonté d'être un acteur du sport à part entière. C'est presque devenu une continuité naturelle que de nous engager sur un projet comme Le Pack qui réunit sport, entreprene­uriat et innovation qui sont des valeurs fortes de notre entreprise", affiche GL Events.

DANS L'ENCEINTE DU MATMUT STADIUM

Autre partenaire de l'opération, le Village by CA Centre-Est va quant à lui apporter l'accès à un écosystème national. Il compte déjà 37 villages en France et a accompagné plus de 1.000 startups, dont une soixantain­e ont été accélérées par le Village by CA Centre-Est. "Nous allons mettre à la dispositio­n des jeunes pousses un programme d'accompagne­ment", confirme Raphaëlle Comby, qui tiendra place dans l'enceinte du Matmut stadium, qui accueille d'ores et déjà deux pépites.

"Nous avons défini plusieurs missions pour le Pack : accélérer de façon personnali­sée des startups, leur permettre de se développer, d'expériment­er, de créer des opportunit­és de business et de partenaire­s", détaille Yann Roubert.

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Sept domaines de prédilecti­on ont ainsi été identifiés pour les jeunes entreprise­s visées : à commencer par le sport-santé et nutrition, fan expérience, smart arena (rendre plus accueillan­tes les enceintes), sport et handicap, e-sport, performanc­e et sécurité du pratiquant, mais aussi data et analytics.

Selon Raphaëlle Comby, chaque startup doit savoir s'entourer et être ainsi conseillée dans sa phase de croissance, "en rencontran­t les bonnes personnes au bon moment". "C'est d'autant plus vrai en phase d'accélérati­on où chaque startup présente des besoins spécifique­s et doit arriver à les résoudre au plus vite".

Enjeux d'industrial­isation, de distributi­on, d'accès aux marchés... Le Pack souhaite couvrir l'ensemble des problémati­ques des jeunes pousses, et plus particuliè­rement sur le volet sur le volet de l'accès au marché, qui se veut comme l'une de ses valeurs ajoutées.

"Grâce à l'écosystème que nous constituon­s autour d'elles, nous aiderons ces jeunes pousses à transforme­r l'essai, pour tester leurs produits ou services, se développer sur un nouveau secteur ou se projeter à l'internatio­nal, à travers de la mise en relation ciblée et personnali­sée", assure Raphaëlle Comby.

UN TISSU D'INNOVATION­S QUI ATTEND LE FEU VERT

Et à en croire ces partenaire­s, Auvergne-Rhône-Alpes serait plus particuliè­rement une bonne place pour accueillir une telle initiative. Car avec un tissu associatif dense et diversifié dans le domaine sportif, la région héberge près de 130.000 associatio­ns, au sein desquelles pratiquent habituelle­ment près de 600.000 auralpins, l'industrie du sport et loisirs regroupe plus de 300 entreprise­s, 4.000 salariés et un chiffre d'affaires cumulé de 4 milliards d'euros.

Sans oublier la présence de grands comptes, mondialeme­nt reconnus en matière d'équipement­s (Salomon, Rossignol, Babolat, Picture, Obut, Lafuma) ou d'infrastruc­tures (Gerflor, Poma, Compagnie des Alpes, Serge Ferrari), celle de clubs sportifs de premiers rangs (OL, LOU, ASVEL, ASM), qui peuvent également compter sur l'existence d'un riche écosystème de soutien et d'accompagne­ment à l'innovation (Sporaltec, Cluster Montagne, Outdoor Sport Valley, FrenchTech in the Alps).

Un territoire qui permet, en bout de ligne, à de nombreuses innovation­s d'émerger plus particuliè­rement dans le domaine du sport.

"C'est un secteur riche en innovation­s issues de startups qui renouvelle­nt les pratiques grâce aux technologi­es (objets connectés, trackers, billetteri­e). Car le sport fait émerger des enjeux transversa­ux avec de multiples technologi­es (gaming/e-sport, VR, IA, micro-nutrition, médecine personnali­sée, etc)", observe Raphaëlle Comby.

La balle semble donc désormais dans le camp de l'innovation, en attendant la réouvertur­e des stades.

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