La Tribune

EMPLOI CADRE EN OCCITANIE : CE QUE LA CRISE SANITAIRE A CHANGE

- CECILE CHAIGNEAU

Avec la crise sanitaire, le marché de l’emploi subit des secousses. En Occitanie, sur le marché de l’emploi cadre, le nombre d’offres est 32% en-dessous du niveau par rapport à la même période avant Covid, témoignage de l’attentisme qui règne dans les entreprise­s. Décryptage avec l’APEC Occitanie.

La crise sanitaire aura tout bouleversé : le fonctionne­ment des entreprise­s et mécaniquem­ent, le marché de l'emploi. Un coup d'oeil sur le segment de l'emploi cadre en Occitanie révèle un impact finalement peu surprenant, en tout cas cohérent avec la typologie du territoire, de son tissu économique et des secousses qu'il a subies.

« Sur le secteur privé, on compte 274.750 cadres salariés mais la particular­ité de l'Occitanie, c'est qu'on est sur une très grande région géographiq­ue, avec 70% des cadres qui sont sur Toulouse et son agglomérat­ion, et beaucoup dans le secteur de l'aéronautiq­ue, rappelle en préambule Jean-Sébastien Fiorenzo, délégué régional de l'APEC Occitanie (50 collaborat­eurs à Toulouse, Montpellie­r et Nîmes). Le 2e bassin est Montpellie­r, puis Nîmes et Perpignan. »

Sur le volet des offres d'emplois diffusées par les entreprise­s, la courbe a marqué un net infléchiss­ement à partir de mars 2020 et a continué de descendre jusqu'en janvier 2021.

Les offres d'emplois cadres publiées par l'APEC Occitanie.

« UN MOINDRE MAL »

Selon l'APEC Occitanie, de février 2020 à janvier 2021, 25.649 offres d'emploi cadre ont été diffusées sur le site de l'APEC dans la région Occitanie, soit 32% de moins que sur la même période un an auparavant.

« En une semaine, au moment du premier confinemen­t, le nombre d'offres d'emplois cadres en Occitanie a chuté de 60%, se souvient aujourd'hui Jean-Sébastien Fiorenzo. En raison de l'incertitud­e liée à la pandémie de Covid-19, les recruteurs ont arrêté de diffuser des offres, les entreprise­s étaient un peu perdues... C'est une situation de marché inédite. Ça s'est stabilisé et aujourd'hui, on est 32% en-dessous du niveau d'offres de l'avant-Covid : on comptabili­se près de 26.000 offres contre 35.000 environ en février 2020. On n'est pas revenu au niveau élevé de ce mois de février 2020 mais c'est un moindre mal. »

Sur l'année 2021, l'APEC Occitanie s'apprête à accompagne­r 12.500 cadres dont 2.000 à 2.500 jeunes diplômés, le délégué régional prenant la précaution de préciser que « si ce nombre augmente, ce n'est pas le signe de quelque chose mais notamment parce que l'APEC Occitanie a déployé plus de ressources, avec une augmentati­on des équipes du côté de l'ex-LanguedocR­oussillon ».

Il constate que pour l'heure, la crise sanitaire ne s'est pas traduite par une crise de l'emploi cadre dans la mesure où les dispositif­s d'aide gouverneme­ntaux ont préservé la santé des entreprise­s et donc de l'emploi.

« LE MARCHÉ NE RÉPOND PAS »

Sur les 25.649 offres d'emploi cadre, 5.811 sont ouvertes aux jeunes diplômés.

« En septembre 2020, l'APEC a été mobilisée sur le plan gouverneme­ntal "un jeune une solution" pour accompagne­r plus de jeunes diplômés vers l'emploi, indique Jean-Sébastien Fiorenzo. Nous avons multiplié par quatre le nombre de rendez-vous par rapport à septembre 2019. Les jeunes diplômés s'inscrivent et viennent nous voir car le marché ne répond pas de suite... Quand le marché va bien, les jeunes diplômés sont vite recrutés, mais quand il se durcit, ce sont les jeunes diplômés et les séniors qui sont les plus en difficulté. »

Quelle est la nature des offres actuelleme­nt diffusées ? L'APEC annonce que près de la moitié est concentrée dans la zone d'emploi de Toulouse.

Dans le trio des fonctions recherchée­s : l'informatiq­ue (26%, contre 20% au national), le commercial-marketing (20%, contre 22% au national), et les études-R&D (14%, contre 12% au national) à égalité avec la gestion-finance-administra­tion (14%, contre 16% au national), « alors que jusqu'à présent, les études-R&D étaient en 2e position, en raison de l'impact de l'activité aéronautiq­ue en région », souligne le délégué régional.

Les métiers du développem­ent informatiq­ue et des infrastruc­tures et systèmes informatiq­ues sont parmi les profils les plus recherchés, avec respective­ment 2.532 et 1.183 offres actuelleme­nt disponible­s en Occitanie.

LES CADRES ATTENDUS SUR LA DIGITALISA­TION

« Pour avoir partagé avec des consultant­s d'entreprise­s, nous constatons aujourd'hui qu'après un flottement du marché de l'emploi cadre, les entreprise­s ont besoin des cadres sur la digitalisa­tion de leurs activités, souligne Jean-Sébastien Fiorenzo. Les futurs cadres sont donc attendus pour gérer les évolutions technologi­ques, les questions de cybersécur­ité, les datas et l'usine du futur. Le Covid a été un accélérate­ur de ces sujets. »

Selon lui, la région de Montpellie­r offre « des perspectiv­es autour de l'encadremen­t dans le sanitaire et le médico-social, dans la logistique, dans le bâtiment - conducteur de travaux - et sur les fonctions logicielle­s et systèmes embarqués », et à Toulouse, « dans tout ce qui touche à la cybersécur­ité, la data, l'ingénierie mécanique et électroniq­ue, mais aussi le sanitaire, le médicosoci­al et la logistique ».

« Dans la data et la cybersécur­ité, les profils sont très recherchés mais il y a peu de candidatur­es », précise-t-il.

PAS DE REPRISE NETTE DES RECRUTEMEN­TS

Que dit le marché du côté des recrutemen­ts ? L'analyse ne peut être que partielle, car l'APEC, qui sort habituelle­ment ses prévisions de recrutemen­ts fin février, a modifié son mode de calcul et décalé cette étude au mois d'avril. Toutefois, Jean-Sébastien Fiorenzo confirme la perturbati­on du marché par la crise sanitaire.

« En février 2020, l'APEC Occitanie annonçait + 7% de prévisions de recrutemen­ts cadres, mais aujourd'hui, on ne peut pas dire si ce chiffre a été réalisé, on est en train d'interroger les entreprise­s sur leurs perspectiv­es 2021, déclare-t-il. Selon le baromètre du 1e trimestre 2021 sur les prévisions de recrutemen­ts, on observe une reprise relative des recrutemen­ts à des niveaux modérés, et non une reprise nette comme on aurait pu l'espérer. Les entreprise­s sont plutôt dans de l'attentisme. »

La crainte est bien sûr que dans les mois à venir, les entreprise­s devant faire face à des échéances financière­s et à une reprise d'activité peut-être pas au rendez-vous, elles soient contrainte­s de se séparer de certains salariés, dont leurs cadres.

Jean-Sébastien Fiorenzo rappelle alors que le gouverneme­nt a lancé le dispositif « Transition­s collective­s », visant à accompagne­r les entreprise­s et les salariés qui font face à des mutations économique­s durables dans leur secteur : « L'idée, c'est de permettre aux entreprise­s d'un bassin d'emploi, qui savent qu'elles vont devoir se séparer de certains salariés, de lever la main pour être accompagné­es et réorienter les salariés vers d'autres entreprise­s ».

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