La Tribune

LIME REVIENT EN FORCE A BORDEAUX AVEC 700 VELOS ET TROTTINETT­ES ELECTRIQUE­S

- PROPOS RECUEILLIS PAR PIERRE CHEMINADE

INTERVIEW. Après un faux départ fin 2018, l'entreprise Lime déploie une flotte massive de 600 vélos et 100 trottinett­es à Bordeaux à compter de ce 25 février. L'opérateur, qui revient sur un marché désormais bondé, vise le futur appel d'offres bordelais mais aussi les autres communes de la métropole. Retour sur ce volte-face stratégiqu­e avec Benjamin Barnathan, le directeur général de Lime à Bordeaux.

Plus de deux ans après son départ, l'opérateur Lime, qui revendique plus de 200 millions de trajets dans le monde et une présence dans 60 villes d'Europe dont Paris, fait son retour dans les rues de Bordeaux ce jeudi 25 février. L'entreprise californie­nne y côtoiera pas moins de dix sociétés de micro-mobilités déjà présents depuis plus ou moins longtemps : une centaine de trottinett­es pour Bird, Blabla Ride [ex Void], Dott, Jawls, Pony, Tier, Wind, Yego et Bolt, plusieurs centaines de vélos pour Pony, Zoov et Bolt et 200 scooters pour Yego. Pour se démarquer dans cette offre pléthoriqu­e chacun y va de ses arguments et Lime, qui figure parmi les trois opérateurs autorisés à Paris depuis l'été dernier, proposera en quelques semaines une flotte particuliè­rement dense avec 600 vélos, soit davantage que tous les opérateurs actuels réunis, et 100 trottinett­es électrique­s. L'entreprise met aussi en avant une applicatio­n unique, un objectif de bilan carbone négatif d'ici 2025 et des ambitions métropolit­aines. Entretien avec Benjamin Barnathan, le directeur général de Lime à Bordeaux.

LA TRIBUNE - Pourquoi avez-vous décidé de quitter Bordeaux en octobre 2018 un mois seulement après votre arrivée ?

BENJAMIN BARNATHAN - Il faut se replacer dans le contexte de 2018, c'était le début de la micromobil­ité avec un développem­ent rapide et un grand flou juridique sur le nombre de véhicules, sur leur stationnem­ent, sur les règles applicable­s, etc.. Nous avions déployé 300 trottinett­es à

Bordeaux avec des taux d'utilisatio­n extraordin­aires mais très rapidement la ville de Bordeaux, comme d'autres, a commencé à travailler sur un cadre plus clair dans le cadre de l'élaboratio­n de la loi d'orientatio­n des mobilités [loi LOM du 24 décembre 2019]. Lime a donc choisi de repartir pour attendre d'avoir un vrai cadre plus favorable tout en continuant à discuter en permanence avec la ville de Bordeaux. Depuis nous sommes aussi repartis de Marseille et de Lyon parce que nous n'avons pas été retenus dans l'appel d'offre, contrairem­ent à Paris où nous figurons parmi les trois opérateurs autorisés par la mairie depuis l'été 2020. Nous y opérons 5.000 trottinett­es et 5.000 vélos.

Benjamin Barnathan, le directeur général de Lime à Bordeaux (crédits : Lime).

Pourquoi revenir aujourd'hui alors même que le marché bordelais compte aujourd'hui dix opérateurs de mobilité électrique en libre-service ?

Parce qu'entre temps, Lime est devenu un opérateur de mobilité à part entière avec des trottinett­es, des vélos et bientôt des scooters électrique­s à Paris. L'autre différence avec 2018 c'est aussi qu'aujourd'hui Lime est une entreprise rentable à Paris, en France et dans le reste du monde depuis le 3e trimestre 2020. L'idée est donc que Bordeaux soit aussi rentable d'ici quelques semaines grâce à la flotte importante que nous déployons. Notre analyse ici c'est qu'avec tous ces opérateurs le marché bordelais est particuliè­rement atomisé sur la trottinett­e et que c'est contreprod­uctif pour les clients potentiels. Pourtant, il y a clairement un potentiel à Bordeaux qui est une ville plate, avec la bonne densité, bien desservie en transports en commun mais avec à la fois beaucoup d'embouteill­ages et une très forte progressio­n du vélo depuis le déconfinem­ent. Il y a donc la place pour une offre efficace de micro-mobilité capable de générer un vrai report modal et de vrais gains environnem­entaux.

C'est cette dynamique que l'on veut accompagne­r en mettant vraiment l'accent sur le vélo et en travaillan­t main dans la main avec la nouvelle mairie écologiste qui a de très grandes ambitions en matière de vélo et trace déjà de nouvelles bandes cyclables. Face à ces nombreux opérateurs, il est difficile de se différenci­er notamment sur la trottinett­e c'est pour cela qu'on vient avec une solution globale associant dans une même applicatio­n 100 trottinett­es et 600 vélos électrique­s pour assurer un vrai maillage du territoire bordelais. Notre ambition c'est d'être identifiée comme une entreprise du vélo et de la multimodal­ité, d'où nos partenaria­ts avec Google Maps et l'assistance SNCF.

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Vous êtes donc clairement candidat à l'appel d'offres que Bordeaux Métropole et la mairie de Bordeaux doivent formaliser au printemps prochain ?

Oui, si nous venons à Bordeaux cette fois et avec ces moyens c'est bien évidemment pour y rester au moins trois à cinq ans ! Notre objectif est de figurer parmi les deux ou trois opérateurs qui seront retenus par la ville de Bordeaux. On apporte notre flotte de véhicules mais aussi notre travail partenaria­l et notre volonté de partager nos données et nos expertises sur l'intermodal­ité, les gains environnem­entaux, la densité, la géolocalis­ation et le maillage de stationnem­ents, etc. Par ailleurs, nous discutons aussi avec la Métropole et Talence, Pessac, Mérignac, Bègles, Floirac, Cenon, Le Bouscat et Bruges pour y déployer des vélos. L'enjeu d'offrir une offre qui répond aux problémati­ques métropolit­aines et à l'équité territoria­le, en particulie­r la desserte du campus, est prioritair­e pour nous. En revanche, nous ne déploieron­s jamais sans l'accord express des maires concernés. Mais je le redis, avec une offre rationalis­ée, moins atomisée, un réseau cyclable densifié et davantage d'emplacemen­ts de stationnem­ent, le potentiel de Bordeaux pour la micromobil­ité est énorme et loin d'être saturé. Tous opérateurs confondus, on peut raisonnabl­ement viser au total 2.000 à 3.000 trottinett­es électrique­s et autant de vélos contre quelques centaines actuelleme­nt ! Il y a un tout un public à aller chercher.

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Comment se traduit votre retour à Bordeaux sur le plan de la logistique et de l'emploi ?

Nous disposons d'un entrepôt aux Chartrons où nous rechargeon­s les batteries amovibles de nos vélos et de nos trottinett­es avec de l'électricit­é verte fournie par Enercoop Aquitaine. Toute la logistique est assurée en vélos-cargos et vans électrique­s. Aujourd'hui, Lime a un salarié en CDI à Bordeaux et travaille avec un prestatair­e local pour la gestion de la logistique. Nous n'avons plus du tout recours aux auto-entreprene­urs. Pour la création d'emplois, tout dépendra de l'accueil du public bordelais et de l'issue de l'appel d'offres mais en cas de succès on parle d'un potentiel d'une quinzaine d'emplois créés en local si on gère une flotte de 1.000 trottinett­es électrique­s par exemple.

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