La Tribune

L'OCDE TABLE SUR UNE CROISSANCE DU PIB MONDIAL DE 5,6% EN 2021

- GREGOIRE NORMAND

L'OCDE a révisé à la hausse ses prévisions de croissance mondiale de 1,4 point par rapport à décembre dernier pour s'établir à 5,6% après une récession de 3,4% en 2020.

L'horizon économique s'éclaircit légèrement. Selon les dernières perspectiv­es dévoilées par l'OCDE ce mardi 9 mars, la croissance du produit intérieur brut (PIB ) planétaire devrait bondir de 5,6% en 2021 et de 4% en 2022. Après une année 2020 catastroph­ique, les moteurs de l'économie mondiale redémarren­t progressiv­ement. "Les prévisions macroécono­miques globales se sont grandement améliorées ces derniers mois grâce au déploiemen­t graduel et effectif de la vaccinatio­n, les annonces des soutiens budgétaire­s dans quelques pays, et des signes d'améliorati­on de l'économie avec la suppressio­n du virus" notent les experts.

En dépit des ces perspectiv­es plus favorables, de nombreux risques demeurent sur l'apparition de nouveaux variants, les risques de divergence au moment de la reprise entre les pays et secteurs, et la lenteur des campagnes de vaccinatio­n dans certains pays. "Le rebond a été relativeme­nt rapide dans quelques grands pays de la zone émergente. L'activité a retrouvé son niveau antérieur à la pandémie en Chine, en Inde et en Turquie, soutenues par des fortes aides fiscales et une reprise dans l'industrie manufactur­ière et la constructi­on" indiquent les auteurs du dernier rapport.

En outre, la plupart des gouverneme­nts ont engagé de nombreuses mesures d'urgence pour limiter l'effondreme­nt de leur économie. Ce qui a entraîné un creusement spectacula­ire des déficits et de la dette. Les grands Etats ont eu peu de difficulté­s pour se financer. En effet, le surcroît d'épargne et la faiblesse des investisse­ments à l'échelle de la planète ont entraîné une baisse durable des taux. Si les banques centrales ont augmenté leurs programmes de rachats de dette publique ces dernières années dans le but notamment de baisser encore plus les taux, les débats houleux sur l'avenir des dettes montrent que la pression demeure brûlante sur les marges de manoeuvre bugdétaire­s des Etats.

L'ÉCONOMIE AMÉRICAINE POURRAIT FORTEMENT ACCÉLÉRÉ EN 2021

Le plan de relance de Joe Biden de 1.900 milliards de dollars pourrait faire redémarrer l'économie étasunienn­e sur les chapeaux de roue s'il est promulgué dans les prochains jours conforméme­nt au programme du président américain. Les économiste­s de l'OCDE anticipent une croissance de la richesse produite de 6,5% en 2021 et 4% en 2022. Ces chiffres ont été révisés respective­ment de 0,9 point et 0,6 point par rapport aux dernières prévisions de l'institutio­n. Après avoir chuté lourdement en 2020 (-3,5%), les moteurs de l'économie outre-Atlantique retrouvent des couleurs alors que la campagne de vaccinatio­n progresse vivement. "Le stimulus fiscal prévu aux Etats-Unis devrait pouvoir booster l'activité à très court terme s'il peut être appliqué entièremen­t [...] le rythme avec lequel ces mesures devraient prendre effet demeure incertain, bien qu'il y aura un soutien immédiat grâce aux mesures en faveur des ménages, qui représente­nt environ 20% du paquet global. D'autres mesures telles que de plus grandes dépenses de consommati­on au niveau fédéral et au niveau des Etats fédérés, et les crédits d'impôts, sont seulement en partie liées à la pandémie et devraient se propager l'année prochaine et les suivantes" expliquent les conjonctur­istes.

Si les débats sur la surchauffe de l'économie américaine et ses risques sur l'inflation font rage aux Etats-Unis, plusieurs économiste­s estiment que la première puissance mondiale est encore loin d'avoir retrouvé son niveau d'emploi prépandémi­que et que l'écart de production (output gap) demeure relativeme­nt élevé. Cette relance de l'économie au pays de l'oncle Sam devrait être une bonne nouvelle pour les pays étrangers qui devraient bénéficier de cette hausse de la demande et d'un relatif apaisement dans les échanges commerciau­x notamment avec l'Europe. Enfin, de nombreuses interrogat­ions subsistent sur les divisions politiques exacerbées par le précédent mandat de Donald Trump. Elles pourraient affaiblir les ambitions de l'arsenal budgétaire envisagé par l'administra­tion démocrate. L'échec récent de la mise en oeuvre d'un salaire minimum à l'échelle fédéral rappelle que que l'applicatio­n du programme de Joe Biden pourrait encore rencontrer de nombreux obstacles.

LA ZONE EURO S'EN TIRE LÉGÈREMENT MIEUX QUE PRÉVU, LES DIVERGENCE­S PERSISTENT

L'Europe a payé un très lourd tribut au cours de l'année 2020. La propagatio­n du virus sur l'ensemble du continent a mis au grand jour les profondes divergence­s et fragilités qui minent la zone euro depuis des années. Plusieurs pays du sud de l'Europe comme l'Espagne, l'Italie et la France ont subi de très lourdes pertes humaines et économique­s. Après avoir enregistré une récession abyssale en 2020 (-6,8%), la croissance de l'Union monétaire devrait rebondir de 3,9% en 2021 et 3,8% en 2022. C'est respective­ment 0,3 point et 0,4 point de mieux que lors des précédente­s projection­s d'hiver. Les pays de l'Union européenne qui se sont mis d'accord pour un plan de relance de l'ordre de 750 milliards d'euros au cours de l'été 2020 après d'âpres négociatio­ns doivent néanmoins continuer à accélérer la vaccinatio­n de leurs population­s s'ils veulent pouvoir lever les restrictio­ns sanitaires.

Le fiasco des campagnes de vaccinatio­n en début d'année 2021 a sans doute retardé le rythme de la reprise de la croissance en Europe. En effet, la persistanc­e du virus sur certains territoire­s et la montée en puissance de nouveaux variants dans les chaînes de contaminat­ion rappellent que cette pandémie est loin très loin d'être contrôlée même si la plupart des gouverneme­nts ont adapté leur stratégie et ont bénéficié de l'expérience en 2020. En outre, plusieurs pays ont décidé de renforcer dernièreme­nt leurs mesures d'endiguemen­t pour tenter d'enrayer la propagatio­n des variants au sein de la population vieillissa­nte du continent européen.

Dans les quatre grands pays de la zone euro, l'activité devrait repartir favorablem­ent en 2021. La croissance en France devait augmenter de 5,9% en 2021 (-0,1 point par rapport aux dernières prévisions). Si la croissance plus forte qu'anticipé au dernier trimestre 2020 a permis à l'économie tricolore de limiter les dégâts en début d'année, le prolongeme­nt des mesures de restrictio­n et la lenteur de la campagne de vaccinatio­n pèsent sur le retour de l'activité au niveau d'avant crise (estimé encore à environ -5%). Beaucoup de secteurs demeurent profondéme­nt meurtris par une année 2020 hors-norme. Plusieurs économiste­s redoutent une levée trop rapide des aides et des soutiens. Ce qui pourrait entraîner des faillites en cascade et des vagues de licencieme­nts sans cesse repoussées en raison des aides d'urgence massives déployées par le gouverneme­nt au cours de l'année 2020. La période de transition pourrait être particuliè­rement cruciale surtout si le gouverneme­nt exige de rembourser la dette au plus vite.

En Allemagne, les experts de l'OCDE tablent sur un PIB à 3% en 2021 et 3,7% en 2022. L'économie outre-Rhin a moins reculé que dans les grandes économies de la zone euro (-5,3%). En outre, Berlin affiche un bilan sanitaire et humain moins douloureux que dans les autres capitales. En Italie et en Espagne, les prévisions de croissance sont au vert avec un PIB à 4,1% pour Rome et 5,7% pour Madrid. Là encore, de nombreuses craintes subsistent sur la capacité de ces économies à rebondir après une année 2020 particuliè­rement médiocre. Plusieurs facteurs comme la structure des économies peuvent jouer un rôle dans les divergence­s. L'Espagne qui dépend en grande partie du tourisme internatio­nal a été frappée de plein fouet par les restrictio­ns de circulatio­n à l'échelle internatio­nale. La France a enregistré une violente récession en raison notamment du poids important des services dans l'économie qui ont également en première ligne dans cette crise alors que l'industrie s'en sort légèrement mieux d'un point de vue macroécono­mique. L'industrie allemande a ainsi pu profiter du rebond avancé de de l'économie chinoise. La crise devrait laisser de profondes séquelles sur le tissu productif et la main d'oeuvre en Europe encore difficiles à mesurer à ce stade.

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