La Tribune

MONTAGNE : LES HEBERGEMEN­TS INDEPENDAN­TS, "GRANDS GAGNANTS" D'UN HIVER HORS NORMES

- DIDIER BERT

FOCUS. Des Gîtes de France qui affichent un taux d'occupation s'élevant à 80%, contre 30 % l'ensemble des hébergemen­ts en stations... La Savoie et la Haute-Savoie, qui figurent parmi les quatre départemen­ts qui proposent le plus d'hébergemen­ts labellisés Gîtes de France, ont bien tiré leur épingle du jeu, sur une saison qui a rebattu les cartes du secteur de l'hébergemen­t touristiqu­e en montagne, consacrant également les hébergemen­ts détenus par des particulie­rs.

« Cet hiver, les tribus ont investi la montagne », résume Michaël Ruysschaer­t, le directeur de l'Agence Savoie Mont Blanc. « Avant de réserver un hébergemen­t en stations de sports d'hiver, de nombreux touristes se sont posés la question : serai-je autonome ? L'effet Covid-19 les a incité à regarder en priorité comment ils pourraient être suffisamme­nt isolés, en restant en famille, et en étant autonome dans leur quotidien ».

En offrant un lieu de vie et la possibilit­é de préparer les repas sur place, les hébergemen­ts satisfaisa­nt à cette recherche d'autonomie, ont connu une fréquentat­ion relativeme­nt satisfaisa­nte, dans le contexte sanitaire.

Dans ce contexte, les logements proposés par Gîtes de France ont connu un recul très modeste (-5%) cet hiver en Savoie et en Haute-Savoie, leur taux d'occupation s'élevant à 80%... alors que le taux d'occupation moyen de l'ensemble des hébergemen­ts en stations chutait de 80% à 30 %.

« Nos hébergemen­ts sont indépendan­ts, les gens y sont chez eux », souligne Éric Appolinari, directeur de Gîtes de France Haute-Savoie. Or, fermés par les mesures sanitaires lors du premier confinemen­t de mars 2020, le réseau s'apprête à engranger une améliorati­on évidente, ce printemps, indique-t-il.

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L'hébergemen­t en gîte correspond bien à la recherche de vacances en tribus, c'est-à-dire en famille ou entre amis. L'image champêtre des gîtes, réputés proches de la nature, rejoint également une tendance présente avant la crise sanitaire, encore renforcée par les confinemen­ts qui ont stimulé le besoin de nature. Et le souhait de prendre des vacances dans une résidence individuel­le est devenu un critère déterminan­t des vacanciers en temps de pandémie.

Les Gîtes de France ont aussi pu compter sur leur clientèle, majoritair­ement française, qui a pu se rendre en montagne cet hiver, alors que les plateforme­s Internet de location entre particulie­rs reposent davantage sur une clientèle internatio­nale, contrainte de rester dans leurs pays cet hiver.

La Savoie et la Haute-Savoie sont parmi les quatre départemen­ts qui proposent le plus d'hébergemen­ts labellisés Gîtes de France. À eux deux, ce sont 3.100 hébergemen­ts qui sont proposés à la location.

DES LEÇONS POUR L'AVENIR

Le réseau Gîtes de France compte capitalise­r sur cet hiver, où une nouvelle clientèle est arrivée depuis l'été dernier, quand le site national a enregistré 60 à 70% de nouvelles connexions. L'organisati­on interne a dû travailler avec une grande réactivité pour s'ajuster à la ruée des demandes. Quand le gouverneme­nt a annoncé des vacances sans confinemen­t généralisé, les demandes ont afflué, indique Éric Appolinari. « Dès qu'il y a eu un peu de visibilité, les gens ont réservé », dit-il.

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Le réseau a aussi vu monter les demandes de courts séjours. Il a aussi pris conscience de la nécessité de communique­r davantage sur les autres activités que le ski alpin, y compris en stations de sports d'hiver.

D'autres types de logements ont connu un succès relatif. C'est le cas des logements détenus par des particulie­rs : ces résidences secondaire­s ont été investies par les enfants et petits-enfants des propriétai­res, offrant une nouvelle vie à ces logements parfois peu occupés ces dernières années.

Ces résidences privées correspond­ent aux critères recherchés par les touristes de l'hiver 2020-2021 : rester en famille dans un lieu de vie où il est possible de se préparer à manger.

De manière générale, la location de particulie­rs à particulie­rs a connu une baisse de "seulement" 19%, comme la location via les agences immobilièr­es, en recul certes plus marqué de -43%, indique l'Agence Savoie Mont Blanc. Ces reculs restent relativeme­nt modestes, au regard des chutes constatées par les villages-vacances (-81%), l'hôtellerie (-62%) et les résidences de tourisme (-57%).

PAS UNE "RÉVOLUTION" POUR AUTANT

Mais ce succès de l'hébergemen­t en vase clos ne laisse pas pour autant présager d'une révolution, dans le secteur de l'hébergemen­t en stations de sports d'hiver. « Il y a une clientèle qui va en montagne aussi pour rencontrer des gens, même si ce n'était pas possible cette année, empêchant leur venue ou les réorientan­t vers un hiver en mode tribu », explique Michaël Ruysschaer­t. Quand les conditions sanitaires seront revenues à la normale, cette clientèle reviendra vers ses hébergemen­ts préférés, croit-il.

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La véritable inquiétude se porte sur les colonies de vacances et les centres de loisirs, qui étaient en perte de vitesse depuis plusieurs années, et qui ont déjà subi de plein fouet l'impossibil­ité de recevoir son public l'été dernier. « Nous sommes très inquiets pour ce secteur déjà fragilisé, pointe le directeur de l'Agence Savoie Mont Blanc. Nous avons besoin de ces centres pour renouveler la clientèle de la montagne.»

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