Le test salivaire rapide, un outil majeur pour contrôler l'épidémie de la Covid
OPINION. La Haute Autorité de Santé s'est déclarée favorable à l'utilisation des tests RT-PCR sur des échantillons salivaires, mais la vraie avancée pourrait être d'autoriser leur analyse par tests rapides. Par Lulla Opatowski, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) - Universi ...
OPINION. La Haute Autorité de Santé s’est déclarée favorable à l’utilisation des tests RTPCR sur des échantillons salivaires, mais la vraie avancée pourrait être d’autoriser leur analyse par tests rapides. Par Lulla Opatowski, Université de Versailles Saint-Quentin-enYvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay et Laura Temime, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) (*)
Dans un contexte de circulation épidémique soutenue tel que celui que nous traversons, de nombreuses épidémies localisées - dites « clusters » - sont fréquemment rapportées dans les établissements de soins, les EHPAD, mais aussi en milieu scolaire ou en entreprise.
Limiter la diffusion du virus dans ces lieux où les contacts ne peuvent être évités est crucial, non seulement pour protéger les personnes concernées (soignants et patients, professionnels, enseignants et élèves...), mais aussi parce que ces clusters jouent un rôle dans la diffusion du virus dans la communauté en général. Il s'agit donc d'un enjeu majeur pour le contrôle épidémique global.
Pour y parvenir, les tests constituent la première étape de la stratégie « tester, alerter, protéger » mise en place en France. L'arrivée d'un nouvel outil de dépistage, les tests salivaires rapides, pourrait encore la renforcer.
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UN ACCÈS AUX TESTS EN CONSTANT DÉVELOPPEMENT
Depuis le début de la pandémie, l'accès aux tests a été largement développé et facilité en France. Deux types de tests évaluant la présence du coronavirus SARS-CoV-2 sont aujourd'hui accessibles au grand public.
Les premiers sont utilisés pour détecter la présence du matériel génétique du SARS-CoV-2 (son ARN) chez les patients, signe d'une infection par ce coronavirus. Un prélèvement nasopharyngé est effectué sur la personne à tester, puis l'échantillon est analysé par RT-PCR. Ces tests sont réalisés en laboratoire, le résultat est obtenu dans un délai pouvant varier de 8h à 48h, voire plus, selon le laboratoire et le flux de demandes.
Les seconds tests disponibles sont les tests dits « antigéniques » : ils détectent la présence de protéines de structure du virus (lesquelles sont des « antigènes », un terme qui désigne tout élément étranger à l'organisme capable de déclencher une réponse immunitaire), avec une bonne sensibilité durant la période se situant autour du pic de charge virale. Ces tests sont réalisés par prélèvement nasopharyngé en pharmacie. Le résultat est obtenu rapidement, 15 à 30 minutes plus tard. La mise à disposition des tests antigéniques a permis de désengorger les laboratoires qui étaient submergés par les demandes de tests PCR.
Une des limitations de ces deux types de tests est que le prélèvement nasopharyngé sur lequel ils reposent doit nécessairement être réalisé par des professionnels.
Une alternative à un tel prélèvement nasopharyngé est le prélèvement salivaire, plus facilement accepté car moins désagréable : selon le type de tests, il suffit de cracher un peu de salive dans un tube ou de frotter un coton-tige dans la bouche.
Les échantillons ainsi recueillis peuvent ensuite être analysés par RT-PCR dans les mêmes conditions que lors d'un prélèvement nasopharyngé. Ils peuvent également faire l'objet d'un autre type de tests : les tests rapides antigéniques ou RT-LAMP. Avantages de ces derniers : leurs résultats sont obtenus rapidement, et le coût de ces analyses est moindre que celui des tests RTPCR, la logistique étant simplifiée. Inconvénient : ils peuvent être moins sensibles, ce qui explique pourquoi ils ne sont pas recommandés pour le diagnostic des personnes symptomatiques.
Les tests salivaires ont été déployés largement au Royaume-Uni depuis le mois de janvier. En France, ils ne sont pas encore disponibles, les autorités restant réservées quant à leur autorisation. Pourtant, les bénéfices à tirer de ces tests plus simples à mettre en oeuvre pourraient largement dépasser leurs inconvénients.
LA STRATÉGIE FRANÇAISE
La stratégie mise en place en France consiste à inciter les individus symptomatiques, puis leurs contacts à risque une fois qu'ils ont été identifiés, à aller se faire tester de façon volontaire. Cette stratégie n'a malheureusement pas ou peu d'effet sur les clusters, pour plusieurs raisons.
D'une part, une portion significative des personnes infectieuses sont asymptomatiques ou paucisymptomatiques, et ce notamment en milieu scolaire. Même s'il est vraisemblable que les asymptomatiques transmettent moins intensément, possiblement du fait d'une charge virale plus faible, ce n'est pas le cas des individus en phase présymptomatique, la période de 2 jours environ qui précède la phase symptomatique, durant laquelle la charge virale est déjà importante.
D'autre part, l'inconfort des prélèvements nasopharyngés engendre des réticences à se faire tester régulièrement. Au Royaume-Uni, il a été estimé que 57% des individus symptomatiques ne se font pas tester.
Enfin, le mode de traçage des contacts, basé sur la déclaration des personnes détectées positives, est imparfait ; le risque de saturation du système est important et l'adhésion de la population aux applications de traçage sur smartphone de type TousAntiCovid reste limitée en France.
Dans ce contexte, la Haute Autorité de Santé (HAS) vient de se déclarer favorable à l'usage de tests RT-PCR sur prélèvement salivaire dans le cadre de dépistages ciblés à large échelle répétés régulièrement. Les données les plus récentes suggèrent en effet que les tests RT-PCR salivaires ont une sensibilité proche de celle des tests RT-PCR nasopharyngés, tout en offrant une meilleure acceptabilité. Un programme de dépistage dans les écoles a notamment été lancé à l'occasion de la rentrée des vacances d'hiver.
Mais l'analyse par RT-PCR demeure justement le facteur limitant de l'emploi de ce type de tests.
LES LIMITATIONS DE L'ANALYSE PAR RT-PCR
Le recours aux tests RT-PCR pour des dépistages populationnels régulièrement répétés pose plusieurs problèmes. Techniques et logistiques, tout d'abord, notamment parce que ces tests nécessitent le recours à du personnel de laboratoire formé, ainsi qu'à du matériel spécifique. De coût, ensuite. En effet, l'État reverse aux laboratoires 43 euros par test, avec majoration en cas de résultats rapides.
Il donc probable que la généralisation de ces tests à grande échelle à l'occasion de dépistages massifs générerait une saturation des laboratoires, pour un coût important. Et ce, pour combien de tests positifs en proportion ?
Autre problème : le délai pour obtenir les résultats de ces tests RT-PCR peut, on l'a vu, aller de 24 à 48H en pratique, dans les laboratoires de ville. Ce délai augmente avec le nombre de tests réalisés, donc avec l'intensité de l'activité épidémique. Or, un résultat obtenu après ne serait-ce qu'une journée signifie qu'une personne infectée peut transmettre le coronavirus pendant cette journée, réduisant en partie le bénéfice de cette mesure pourtant clé dans le contrôle de l'épidémie.
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