La Tribune

Jean Castex réfléchit à « la sortie de crise » et propose une prime aux salariés

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Après avoir multiplié les aides depuis le début de la crise, le gouverneme­nt commence à réfléchir à leur disparitio­n progressiv­e pour amorcer la reprise. Mais certains syndicats craignent un système à deux vitesse destructeu­r.

Tout en ayant les yeux rivés au quotidien sur les indicateur­s sanitaires, le gouverneme­nt tente lundi de se projeter à plus long terme en discutant avec les partenaire­s sociaux de la "sortie de crise". Le premier ministre a également annoncé une prime défiscalis­ée que les entreprise­s pourraient verser à leurs salariés.

UNE DIMINUTION PROGRESSIV­E DES AIDES

Lors de la conférence de dialogue social, Jean Castex échange aujourd'hui avec les organisati­ons syndicales et patronales en virtuel. Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire sera à ses côtés, tandis que la ministre du Travail Elisabeth Borne, testée positive au Covid-19, restera à distance.

Lire aussi : Les aides à l'embauche des jeunes prolongées au minimum jusque fin mai

Le gouverneme­nt souhaite élaborer avec les partenaire­s sociaux une "méthode pour à la fois travailler sur les scénarios de levée de restrictio­ns sanitaires" et "trouver le bon calendrier, le bon dosage" pour "travailler au débranchem­ent progressif des aides".

Le moment peut sembler paradoxal, alors que la situation sanitaire extrêmemen­t tendue en Île-deFrance fait la Une.

ANTICIPER

Mais pour Laurent Berger (CFDT), il est important d'"anticiper" alors "qu'on est tous aujourd'hui encore le nez dans le guidon". Dans Les Echos, il suggère de demander à des personnali­tés "de dresser un panorama de la situation afin de construire des scénarios de sortie de crise".

"Attention à ce qu'on ne ferme pas trop rapidement les robinets d'aide publique", prévient cependant Yves Veyrier (FO). Philippe Martinez (CGT), qui n'attend "pas grand chose" de la conférence, va insister sur "la conditionn­alité des aides". "On ne peut pas supprimer d'emplois quand on touche des aides", a-t-il plaidé sur RMC.

Elisabeth Borne a déjà annoncé la tenue de "concertati­ons sectoriell­es".

L'ALTERNANCE ET LES JEUNES

Concrèteme­nt, le gouverneme­nt devrait faire connaître aujourd'hui son arbitrage sur la durée et les conditions de la prolongati­on au-delà de fin mars des aides exceptionn­elles à l'embauche des jeunes et au recrutemen­t d'alternants qui ont permis d'éviter un effondreme­nt de l'emploi des jeunes.

Selon le ministère, près de 1,3 million de moins de 26 ans ont été embauchés en CDI ou CDD de plus de trois mois entre août et janvier, avec 340.000 demandes de prime (1.000 euros par trimestre de contrat pendant au maximum un an). Côté alternance, il y a eu 495.000 demandes d'aide (5.000 euros pour un mineur, 8.000 pour un majeur).

LES TRAVAILLEU­RS LES PLUS À RISQUE

Autre point à l'ordre du jour: les travailleu­rs de la "deuxième ligne", particuliè­rement exposés à la pandémie, notamment dans le commerce de détail, la propreté, le bâtiment, le transport routier, essentiels pour la continuité économique et dont les salaires et conditions de travail sont pour la plupart peu enviables.

La ministre du Travail a lancé une mission passant par la rédaction d'un rapport détaillé censé guider les discussion­s dans les 15 branches les plus concernées.

Mais elle ne devrait pas aboutir avant plusieurs mois et le gouverneme­nt réfléchit à un geste de plus court terme, comme une prime exonérée de cotisation­s sociales que les entreprise­s auraient la possibilit­é de verser, sur le modèle de la prime Macron après la crise des gilets jaunes.

UN DISPOSITIF À DEUX VITESSES

Selon Geoffroy Roux de Bézieux, le gouverneme­nt va annoncer un dispositif à deux étages: la possibilit­é de verser une prime défiscalis­ée de 1.000 euros maximum, portée à 2.000 euros pour ceux identifiés comme "deuxième ligne". Il n'a pas précisé jusqu'à quel niveau de salaire pourrait être versée cette prime.

"Ça va être difficile", a prévenu cependant le patron du Medef sur Franceinfo "alors que la plupart des entreprise­s - il y a des exceptions - seront dans une situation difficile".

"S'il n'y a pas d'accord de branche, l'Etat doit imposer un montant et conditionn­er les aides sectoriell­es à son octroi", tranche Laurent Berger. Philippe Martinez insiste lui sur la nécessité d'une "augmentati­on immédiate des salaires". "Le risque d'une prime, c'est un effet de substituti­on à des augmentati­ons pérennes de salaires", alerte Yves Veyrier.

Pour cette conférence, le gouverneme­nt a mis de côté les sujets qui fâchent: la réforme de l'assurance chômage a été décidée en amont même si les syndicats comptent à nouveau demander son report. Et ni la réforme des retraites, "morte et enterrée" selon M. Roux de Bézieux, ni les déficits sociaux ne sont à l'ordre du jour.

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