La Tribune

ACQUISE PAR LAVOLLEE, PIGM'AZUR OUVRE LE CHAMP DES POSSIBLES INDUSTRIEL­S A SES PIGMENTS NATURELS

- GAELLE CLOAREC

Spécialisé­s dans la distributi­on de matières premières industriel­les, le groupe originaire d’Ile-de-France et son partenaire italien Urai ont mis la main sur la jeune pousse basée à Nice et qui est à l’origine d’un procédé de fabricatio­n de pigments naturels innovant, inspiré du savoir-faire maya. Elle est désormais armée pour servir les besoins d’une industrie qui se veut plus durable, à commencer par le segment de la cosmétique.

A l'origine de Pigm'Azur, il y a une grande et une petite histoire. Celle des fresques mayas dont les couleurs ont su défier les siècles. Et celle d'une poignée de scientifiq­ues de l'Université de Nice et de Mines ParisTech qui a réinventé et adapté le procédé artisanal de fabricatio­n de ces pigments naturels ultra-résistants aux technologi­es industriel­les actuelles. Une innovation entrée l'été dernier dans l'escarcelle de la société de distributi­on de matières premières industriel­les Lavollée, basée en Ile-de-France, et de son homologue italien, Urai. Chacun détenant 50% des parts de la jeune pousse.

"Investir dans des produits innovants comme les pigments naturels, c'est une façon pour un distribute­ur comme nous de pérenniser notre futur et notre développem­ent", souligne Hervé Lavollée, dirigeant de la PME familiale dont le chiffre d'affaires consolidé s'affiche à 55 millions d'euros pour une quarantain­e de collaborat­eurs. Elle importe et distribue près de 900 matières premières pour différents pans de l'industrie dont les sciences de la vie (cosmétique­s, pharmacie, alimentair­e, arômes et parfums), la peinture et les encres, les plastiques et lubrifiant­s ou encore le traitement des eaux et la chimie fine. L'entreprise signe-là sa deuxième prise de participat­ion après le rachat, en partenaria­t cette fois-ci avec les groupes Mane (originaire de Grasse NDLR) et Cristalco, de 80% des parts de la société clermontoi­se Stevia Natura, spécialisé­e dans la production de stevia. "Nous y avons vu une opportunit­é extraordin­aire pour aider à résoudre la problémati­que de surconsomm­ation de sucre avec un produit végétal et sans calories. Aujourd'hui, nous sommes leaders européens", indique Hervé Lavollée. Qui entend bien réitérer la bonne opération avec Pigm'Azur.

CONTEXTE PORTEUR

Il faut dire que Pigm'Azur coche de nombreuses cases. "C'est la seule société au monde capable de développer des pigments naturels allant jusqu'à 100% de naturalité". Et ce, dans un contexte extrêmemen­t porteur qui pousse l'industrie à privilégie­r l'utilisatio­n de la chimie verte ou de produits issus du végétal comme du minéral. "C'est une tendance de fonds qui touche tous les segments : la cosmétique bien sûr qui en a été le précurseur, mais aussi l'industrie du détergent, du papier, du bâtiment avec les ciments colorés ou encore du plastique pour emballage". Un secteur aujourd'hui au milieu du gué, à la recherche de solutions pour s'affranchir de la pétrochimi­e. "Il existe des solutions comme le PLA - acide polylactiq­ue - mais elles ne sont pas complètes, notamment en termes de pigments ou d'additifs qu'on ne savait pas trouver en dehors du monde de la synthèse. Avec Pigm'Azur, on est capable d'apporter la touche couleur de façon naturelle à un plastique biosourcé." Et ce, de façon écorespons­able grâce à un procédé, breveté, qui consiste à encapsuler un colorant naturel dans un minéral spongieux. Les pigments ainsi obtenus apparaisse­nt très colorés et surtout résistants aux environnem­ents agressifs.

CERCLE VERTUEUX

Basée à Nice, Pigm'Azur disposait déjà d'un atelier d'analyse, de R&D et de fabricatio­n d'une capacité de 50 tonnes par an, auquel est venu s'ajouter un laboratoir­e d'applicatio­ns. "Nous avons investi massivemen­t dans des outils de formulatio­n afin d'être capable de présenter à nos clients des pré-formulatio­ns et de leur montrer ainsi une crème visage, un rouge à lèvres, un morceau de béton ou encore un bout de plastique incorporan­t nos pigments". Des efforts importants ont été également consentis sur le volet réglementa­ire afin d'être compatible avec les normes régissant chacune des industries visées. A commencer par la cosmétique, un marché défriché il y a déjà quelques années par la jeune pousse et sur lequel elle accélère désormais. Sa collaborat­ion avec l'un des poids lourds du secteur devrait déboucher sur le lancement d'une nouvelle gamme de maquillage et de soin de la peau, programmée à la fin de l'année 2021. "C'est très encouragea­nt," se réjouit Hervé Lavollée qui table sur un chiffre d'affaires de 2 à 3 millions d'euros d'ici à deux ans. Cette montée en puissance permettra de débloquer un plan d'embauches visant à renforcer une équipe aujourd'hui composée de 4 alternants chapeautés par le docteur Nicolas Volle, co-inventeur du brevet et directeur opérationn­el. "L'idée, reprend-il, est de s'inscrire dans un cercle vertueux en collaboran­t avec des industries riches comme la cosmétique qui travaillen­t beaucoup l'image afin d'optimiser nos coûts et servir par la suite d'autres industries comme la constructi­on pour laquelle nous sommes 10 à 15 fois plus cher que ce qu'elle connaît".

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