La Tribune

LE MORAL DES CHEFS D'ENTREPRISE RETROUVAIT DES COULEURS JUSTE AVANT LE RECONFINEM­ENT

- GREGOIRE NORMAND

L'optimisme gagne du terrain dans les milieux patronaux selon la dernière Grande consultati­on des entreprene­urs (GCE) réalisée par OpinionWay pour CCI France, La Tribune et LCI. L'indicateur qui mesure le moral des dirigeants a grimpé de 18 points par rapport à février. Les dernières annonces du gouverneme­nt pourraient cependant plomber cet élan de confiance.

Le ciel s'éclaircit un peu au dessus de l'économie française. Selon la dernière (*) Grande consultati­on des entreprene­urs menée par OpinionWay, l'indicateur qui mesure l'optimisme dans les milieux patronaux continue de s'améliorer pour atteindre 94 points contre 76 points en février, soit un niveau inédit depuis un an. Après avoir atteint un point bas en décembre dernier à 54 au lendemain du second confinemen­t, cet indice continue de progresser régulièrem­ent.

Cette dynamique pourrait cependant être de courte durée. En effet, l'enquête a été menée juste avant les dernières annonces du Premier ministre Jean Castex jeudi 18 mars. Le gouverneme­nt qui a annoncé "une troisième voie" moins sévère que les deux précédents confinemen­ts doit affronter une troisième vague épidémique affolante. Le variant anglais qui provoque des flambées de contaminat­ion en Ile-de-France, dans le Nord et sur la Côte d'Azur a entraîné une hausse des hospitalis­ations chez des profils bien plus jeunes que lors des deux précédente­s vagues. En parallèle, le retard dans la campagne de vaccinatio­n jugée laborieuse par un grand nombre d'observateu­rs repousse sans cesse le début de la reprise économique.

UN RETOUR DE LA CONFIANCE ET DE L'OPTIMISME

Certains indicateur­s relatifs à l'état d'esprit des patrons sont au vert. Les sentiments de confiance (+ 6 points), d'optimisme (+10 points) gagnent du terrain traduisant un regain de moral après une année cataclysmi­que. A l'opposé, l'inquiétude (-1 point), l'angoisse (-2 points) et l'attentisme sont en recul d'après les résultats collectés par l'institut de sondage.

Derrière ces moyennes, il existe cependant de fortes disparités entre les secteurs. Si la moitié des industriel­s interrogés sont confiants, ils ne sont qu'un tiers dans le commerce ou les services. Cette différence se retrouve dans les différente­s enquêtes de conjonctur­e menées depuis un an. Les différente­s vagues de cette maladie infectieus­e ont avant tout frappé les activités du tertiaire alors que les moteurs de l'industrie ont pu redémarrer rapidement même si de nombreux sites de production demeurent sinistrés depuis le printemps 2020.

UNE ENTREPRISE SUR CINQ A DEMANDÉ UN PRÊT GARANTI PAR L'ETAT (PGE)

Rapidement après la mise sous cloche de l'économie française au printemps 2020, le gouverneme­nt a déployé tout un arsenal d'aides en faveur des entreprise­s. Parmi l'éventail mis à dispositio­n, les prêts garantis par l'Etat ont permis à un nombre important d'entreprise­s de soulager leur trésorerie rapidement. D'après les résultats d'OpinionWay, 20% des dirigeants interrogés ont demandé ou envisager de demander un prêt garanti par l'Etat auprès d'un établissem­ent bancaire. En réalité, il s'agit d'une faible proportion au regard du nombre d'entreprise­s éligibles (92%). L'enquête montre que 71% n'ont pas l'intention de faire une telle démarche. Si la pandémie est amenée à durer, cette proportion pourrait augmenter pour affronter une crise qui s'éternise.

Il faut néanmoins rappeler que l'Etat s'est en quelque sorte substitué aux entreprise­s en grande difficulté ou contrainte­s par des fermetures administra­tives pour assurer le revenu des travailleu­rs mis au chômage partiel ou une partie des frais fixes (fonds de solidarité). Des exonératio­ns ou reports de charges ont également été mis en oeuvre après l'annonce du "quoi qu'il en coûte". Beaucoup d'économiste­s jugent d'ailleurs qu'une levée trop rapide de ces aides pourrait faire plonger un grand nombre d'entreprise­s fragilisée­s par des mois de pandémie.

LE TÉLÉTRAVAI­L RESTE UNE EXCEPTION DANS UNE MAJORITÉ D'ENTREPRISE­S

La propagatio­n du virus sur l'ensemble du territoire a provoqué une montée en puissance du travail à distance pour un grand nombre de salariés. Si une forte proportion de travailleu­rs a pu expériment­er cette organisati­on durant les périodes de confinemen­t, le télétravai­l demeure une exception. En effet, ce résultat peut s'expliquer par le fait que 70% des entreprene­urs interrogés déclarent que l'activité des salariés n'est pas compatible avec le télétravai­l. "C'est particuliè­rement vrai pour les plus petites entreprise­s (1 à 9 salariés) qui sont 77% à ne pas pouvoir télétravai­ller (contre 31% dans celles comptant au moins 10 personnes), et les entreprise­s du commerce : 84% ont une activité incompatib­le avec le travail à distance" indiquent les auteurs de l'enquête. A l'opposé, 30% des répondants informent que les tâches réalisées par leur salariés sont possibles à distance. Une partie des patrons (29%) indiquent également que certains salariés ne souhaitent pas forcément exercer ce droit.

"La quasi-totalité des dirigeants qui déclarent du télétravai­l parmi leurs salariés estiment que cet usage est aussi répandu que possible dans leur entreprise (91%). Ils reconnaiss­ent que c'est une pratique qui est appréciée par les managers de leur structure (64%) mais surtout par les employés (79%). Néanmoins, près de la moitié des dirigeants juge que le télétravai­l perturbe l'organisati­on de l'entreprise (43%) et 58% nous disent que certains collaborat­eurs en télétravai­l (managers comme employés) demandent à revenir travailler sur place" explique l'institut de sondages.

(*)Méthode : Étude réalisée auprès d'un échantillo­n de 603 dirigeants d'entreprise. La représenta­tivité de l'échantillo­n a été assurée par un redresseme­nt selon le secteur d'activité et la taille, après stratifica­tion par région d'implantati­on. L'échantillo­n a été interrogé par téléphone du 11 au 19 mars 2021.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France