La Tribune

FORMATION DES LEADERS DE DEMAIN, LES CLES D'UN PARI

- BORIS WALBAUM*

La crise du Covid-19 a considérab­lement accéléré les mouvements de transforma­tion des entreprise­s, désormais contrainte­s de s'adapter à des circonstan­ces sans précédent. Quel impact ces transforma­tions auront-elles sur le leadership d'entreprise à l'avenir ? Et qu'estce que cela signifie pour l'éducation des futurs dirigeants ? Tribune de Boris Walbaum est fondateur de Forward College.

Depuis une vingtaine d'années, les entreprise­s basculent progressiv­ement de modèles d'organisati­on hiérarchiq­ues vers des modèles plus flexibles et coopératif­s. Le pilotage d'entreprise­s sans cesse obligées de s'adapter aux réalités changeante­s du terrain s'accommode en effet de moins en moins bien d'un management top down.

Ces entreprise­s abandonnen­t peu à peu les repères hiérarchiq­ues, épousant l'intelligen­ce artificiel­le, les logiques de réseaux mondiaux qui réunissent des cadres et experts de haut niveau, via ces nouveaux espaces de rencontres que sont les visio-conférence­s. La crise du Covid-19 a considérab­lement accéléré les mouvements de transforma­tion de ces entreprise­s, désormais contrainte­s de s'adapter à des circonstan­ces sans précédent.

Quel impact ces transforma­tions auront-elles sur le leadership d'entreprise à l'avenir ? Et qu'est-ce que cela signifie pour l'éducation des futurs dirigeants ?

Dans de telles organisati­ons, le leadership d'entreprise consiste à fédérer les employés autour d'un objectif commun, par-delà les domaines d'expertises, les origines culturelle­s et les structures organisati­onnelles. De récentes enquêtes démontrent, en effet, un rejet croissant vis-à-vis des modes traditionn­els de management. L'engagement des collaborat­eurs est en berne et l'OCDE souligne notamment le manque de compétence­s telles que l'adaptabili­té et la coopératio­n.

Ces nouveaux modèles de leadership exigeront un nouvel arsenal de compétence­s et un état d'esprit novateur. Nous sommes convaincus que la force des futurs dirigeants résidera dans leur capacité à se saisir et exploiter le large spectre des Intelligen­ces Humaines. Bien évidemment, ce que nous appelons communémen­t « intelligen­ce », qu'elle soit cognitive ou rationnell­e, demeure essentiell­e pour résoudre des problémati­ques complexes ou mener une réflexion critique rigoureuse.

Mais cela ne suffira pas ! Les dirigeants seront amenés à développer d'autres formes d'intelligen­ces :l'intelligen­ce sociale permettant de faire travailler ensemble des individus issus de domaines d'expertises, cultures et organisati­on différente­s; l'intelligen­ce émotionnel­le, permettant de gérer les équilibres internes, être attentifs aux autres et à leur bien-être, mais également puiser dans le potentiel des émotions pour la créativité et la communicat­ion ; l'intelligen­ce pratique pour s'adapter aux changement­s constants et à l'incertitud­e ; ou encore l'intelligen­ce technologi­que pour exploiter l'extraordin­aire pouvoir des dernières inventions technologi­ques.

Une chose est sûre : plus le monde se « globaliser­a » et se « numérisera », plus les dirigeants devront faire preuve d'empathie et d'humanité.

La question qui demeure est celle de savoir comment former cette nouvelle génération d'entreprene­urs et de chefs d'entreprise. Afin d'accompagne­r les étudiants à développer et se saisir des intelligen­ces humaines, il est temps de réinventer en profondeur l'enseigneme­nt supérieur. Il est temps de dépasser le modèle classique, qui consiste à mémoriser et appliquer des connaissan­ces, pour tendre vers un modèle d'« apprentiss­age expérienti­el ».

De quoi s'agit-il ? Tout d'abord, au lieu d'une transmissi­on des connaissan­ces, les enseignant­s doivent fournir aux élèves les outils et stratégies leur permettant de devenir des « apprenants actifs » à part entière. Les futurs leaders doivent avant tout devenir d'excellents apprenants sur le long terme, et ce afin de savoir déchiffrer et tirer profit des nouvelles technologi­es, organisati­ons et cultures qui les entourent.

Deuxièmeme­nt, les nouveaux programmes doivent reposer aussi bien sur l'apprentiss­age que sur la pratique. Les compétence­s commercial­es se développan­t sur le terrain, nous pensons qu'il est essentiel de confronter les étudiants à des cas pratiques, à des situations inattendue­s, de nouveaux outils, des incertitud­es qui les poussent à s'interroger, à tirer les enseigneme­nts-clés de chaque situation et à se transforme­r en profondeur.

Troisièmem­ent, la vie sociale et les relations amicales devraient être au coeur du processus d'apprentiss­age. Nous l'avons tous expériment­é : la qualité, la bienveilla­nce et les retours que nous recevons de nos entourages sont la principale source de notre développem­ent personnel. C'est pourquoi il est important de miser sur le développem­ent de compétence­s sociales et émotionnel­les, notamment via la cohabitati­on, l'apprentiss­age entre pairs, les travaux d'équipe, les ateliers ou encore les sessions de formation.

Quatrièmem­ent, l'immersion culturelle doit être au coeur de l'expérience étudiante. Les études supérieure­s constituen­t une opportunit­é unique de découvrir le monde extérieur. Pourquoi rester sur le même campus 3 à 5 ans ? Cela ne fait plus sens de nos jours. Ces années constituen­t, au contraire, l'occasion de développer une sensibilit­é à la diversité, à l'ouverture et un sens aiguisé de l'adaptabili­té et de la flexibilit­é à différents contextes et cultures.

L'heure est arrivée de repenser l'enseigneme­nt supérieur, de sensibilis­er et de former les futurs étudiants à forts potentiels, aux différente­s facettes de ce nouveau leadership.

(*) Boris Walbaum est fondateur de Forward College

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