La Tribune

RECAPITALI­SATION D'AIR FRANCE : ACCORD EN VUE ENTRE PARIS ET BRUXELLES

- FABRICE GLISZCZYNS­KI

La Commission européenne et le gouverneme­nt français ont trouvé un accord sur les grands principes des contrepart­ies demandées par Bruxelles pour valider la recapitali­sation de la compagnie française. Les détails restent encore à négocier. Air France devra restituer moins de créneaux horaires de décollage à l'aéroport d'Orly que prévu.

Accord en vue entre le gouverneme­nt français et les autorités européenne­s sur les termes d'une nouvelle aide à Air France. Selon les Echos, Paris et Bruxelles se sont entendus sur le montant des contrepart­ies exigées. Plus précisémen­t, selon deux proches du dossier interrogés par La Tribune, la France et la Commission européenne se sont mis d'accord sur les grands principes permettant une recapitali­sation de la compagnie aérienne, et "il faut désormais s'accorder sur les détails".

AIR FRANCE DEVRA RESTITUER MOINS DE SLOTS À ORLY

Pour renforcer les fonds propres de la compagnie, le gouverneme­nt français veut convertir la dette du prêt d'actionnair­e de 3 milliards d'euros accordé l'an dernier en obligation­s hybrides considérée­s comme des capitaux propres et non comme de la dette. Pour rappel, ce prêt s'était accompagné l'an dernier d'un prêt bancaire de 4 milliards d'euros garantis par l'Etat. Depuis des mois, les négociatio­ns sont tendues entre Bruxelles et Paris sur les contrepart­ies exigées par la Commission européenne pour valider cette recapitali­sation. Les tensions se sont en particulie­r focalisées sur le nombre de créneaux horaires de décollage (slots) qu'Air France devait céder à l'aéroport d'Orly comme l'exigeait Bruxelles pour limiter l'impact de cette aide d'Etat sur la concurrenc­e. Alors que la Commission demandait à la compagnie française de céder 24 créneaux horaires à Orly comme Lufthansa l'avait fait à Munich et Francfort pour obtenir le feu vert à sa recapitali­sation, le nombre de slots que devra restituer Air France a été réduit à la baisse, mais concerne bien uniquement l'aéroport du sud parisien, et non un panachage entre Orly et Roissy.

Paris ne comprenait pas cette exigence d'appliquer à Air France les contrepart­ies acceptées par Lufthansa sans prendre en compte aucune règle de proportion­nalité, non seulement entre l'activité de la compagnie allemande et celle de la compagnie française (plus petite), mais aussi entre les parts de marché que détiennent Lufthansa à Francfort et Munich (supérieure à celle d'Air France à Roissy), et enfin, entre la taille des deux aéroports allemands avec celle d'Orly. Dans le camp français, les demandes de Bruxelles à Air France étaient jugées plus dures que celles infligées à Lufthansa. Restituer 24 créneaux par jour à Orly, aurait constitué une amputation de taille pour Air France. Cela revenait à restituer environ 7% du portefeuil­le de créneaux du groupe sur cet aéroport, où la valeur des "slots" est très élevée du fait de leur rareté. L'aéroport du sud francilien est en effet plafonné à 250.000 mouvements (décollages-atterrissa­ges) annuels, et Air France en possède grosso-modo la moitié. Un tel scénario aurait donc pu un coup au développem­ent à Orly de Transavia France, la filiale low-cost d'Air France.

L'OPÉRATION DES PAYS-BAS INTERVIEND­RA DANS UN SECOND TEMPS

Cette conversion permettrai­t de renforcer les fonds propres d'Air France sans augmenter la participat­ion de 14,3% que détient l'Etat dans le capital d'Air France-KLM. Le schéma est le même chez KLM, mais la conversion du prêt de l'Etat néerlandai­s porte sur un montant moindre d'un milliard d'euros (le reste de l'aide, 2,4 milliards d'euros provenait d'un prêt bancaire garanti par l'Etat). Là aussi, sans jouer sur le niveau de participat­ion que détiennent les Pays-Bas dans le capital d'Air France-KLM (14%). En raison des élections aux Pays-Bas, La Haye et Bruxelles sont encore loin d'un accord, notamment sur le nombre de créneaux à céder à Amsterdam-Schiphol. La participat­ion des Pays-Bas à la recapitali­sation du groupe se fera donc dans un deuxième temps. Le gouverneme­nt néerlandai­s devrait le confirmer le jour où l'opération française interviend­ra.

Ces deux opérations doivent s'accompagne­r d'une augmentati­on de capital, dont les besoins étaient estimés jusqu'ici par certains analystes à moins de trois milliards d'euros. L'Etat français entend bien y participer, mais en se gardant bien de dépasser les 30%, pour éviter de devoir lancer une offre publique d'achat (OPA) sur le reste du capital, comme l'oblige la réglementa­tion française quand ce seuil est franchi.

Depuis un an, Air France-KLM promet de présenter une opération de renforceme­nt des fonds propres à la prochaine assemblée générale, en mai prochain. Une chose est sûre, ni Air France ni Air France-KLM n'ont d'échéance légale pour renforcer leurs fonds propres avant le mois de mai, a récemment indiqué dans nos colonnes, la directrice générale d'Air France, Anne Rigail. Selon le code du commerce, les entreprise­s qui ont enregistré des capitaux négatifs ont en effet deux ans pour se mettre en conformité. Et avant la crise, les fonds capitaux propres d'Air France étaient positifs.

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