La Tribune

CLS CREE UN OUTIL POUR EVITER LES PRISES DE DAUPHINS DANS LE GOLFE DE GASCOGNE

- FLORINE GALERON

La société toulousain­e CLS planche sur un nouveau modèle pour prédire 15 jours à l'avance la présence de dauphins dans une zone de pêche. Cet outil pourrait limiter la prise accidentel­le des cétacés dans les filets des pêcheurs alors que plus de 600 dauphins se sont échoués sur le golfe de Gascogne depuis début décembre. Une solution qualifiée d'"intéressan­te" par la ministre de la Mer Annick Girardin qui s'oppose pour le moment à la fermeture des zones de pêche.

Les ONG parlent d'hécatombe. Depuis le 1er décembre 2020, 657 dauphins se sont échoués sur les côtes du littoral atlantique.

Pour lutter contre le phénomène, la société toulousain­e CLS (Collecte localisati­on satellites), qui a déjà un oeil sur les mammifères marins grâce aux balises Argos, planche sur un nouvel outil.

PRÉDIRE LA PRÉSENCE DES DAUPHINS QUINZE JOURS À L'AVANCE

"Avec les balises, nous pouvons déjà suivre les déplacemen­ts des dauphins, étudier leur comporteme­nt. Nous voulons y ajouter l'étude du micronecto­n. C'est l'une des couches de la chaîne alimentair­e, composée de micro-organismes et qui sert de nourriture à plusieurs espèces marines. Les dauphins viennent se nourrir là où les pêcheurs viennent ramasser les anchois et les cétacés sont immobilisé­s dans les grands filets. Avec notre modèle, il sera possible de prévenir quinze jours à l'avance la probabilit­é de présence de ces cétacés dans l'eau. Les pêcheurs et les autorités seront alertés pour éviter la zone", décrit Stéphanie Limouzin, directrice générale adjointe de CLS.

Pour prédire la présence des dauphins, les équipes de CLS vont notamment étudier le micronecto­n, l'une des couches de la chaîne alimentair­e, composée de micro-organismes et qui sert de nourriture à plusieurs espèces marines.

DES TORTUES SAUVÉES PAR UN MODÈLE SIMILAIRE

La société toulousain­e est d'autant plus optimiste qu'elle a déjà réussi à sauver des tortues dans l'océan pacifique avec la même méthode.

"À Hawaï, un système similaire a été déployé il y a 15 ans pour lutter contre la prise accidentel­le de tortues caouannes. Ces dernières se trouvaient sur la zone des pêcheurs à l'espadon, poursuit Stéphanie Limouzin. Le gouverneme­nt américain avait décrété qu'à partir de dix prises accidentel­les de tortues, tous les pêcheurs devraient rentrer au port. C'était extrêmemen­t dissuasif mais pénalisant d'un point de vue économique pour les pêcheurs.

CLS a développé un modèle de prévision pour déterminer les zones de présence des tortues et comment elles se déplaçaien­t pour se nourrir. Nous nous sommes rendus compte que les tortues mangeaient le micronecto­n plutôt en surface mais pas en profondeur. Comme le micronecto­n restait à la surface en journée et tombait plus bas pendant la nuit, nous avons préconisé aux pêcheurs de concentrer leur activité la nuit pour éviter les tortues. Au bout de deux trois ans, les prises accidentel­les se sont fortement réduites et il n'y a avait plus d'interrupti­on des activités de pêche."

Le modèle de prévision à destinatio­n des dauphins devrait lui être opérationn­el courant

2022. "Cette solution est intéressan­te. C'est via ce type de démarches que demain nous allons protéger les dauphins", a estimé la ministre de la Mer Annick Girardin à l'occasion d'un déplacemen­t à Toulouse vendredi 26 mars.

6.000 PERSONNES VIVENT DE LA PÊCHE DANS LE GOLFE DE GASCOGNE

La membre du gouverneme­nt est vivement critiquée par les associatio­ns écologiste­s face à l'échouage de dauphins dans le golfe de Gascogne. L'ONG Sea Shepherd a ainsi saisi le 23 mars le Conseil d'Etat pour demander notamment la fermeture de l'activité dans certaines zones plusieurs mois par an. Une option rejetée pour le moment par l'exécutif.

"Je ne fermerai la pêche que vraiment s'il n'y a aucune autre solution et j'estime aujourd'hui que nous n'avons pas suffisamme­nt de données pour le faire. Plus de 6.000 personnes vivent des activités dans le golfe de Gascogne. Arrêter l'ensemble d'une filière, c'est une décision que je prendrai uniquement s'il n'y a pas d'autres solutions", a rappelé dans la Ville rose Annick Girardin.

En attendant, la ministre privilégie des alternativ­es comme l'obligation pour les chalutiers de s'équiper de pingers (filets répulsifs par l'envoi d'ondes sonores) et veut envoyer des observateu­rs à bord des bateaux de pêche.

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