La Tribune

JEAN-LUC CHAUVIN - CCI AIX-MARSEILLE PROVENCE : LE MODELE POUR AIXMARSEIL­LE, C'EST PLUS CELUI DE SAN FRANCISCO QUE CELUI DE MIAMI »

- LAURENCE BOTTERO

Alors que le virus joue les prolongati­ons, continuant à malmener l’économie, le président de la chambre consulaire délivre sa vision du développem­ent du territoire, ce qui freine, ce qui mérite d’être accéléré. Ce qui mérite d’être inventé aussi. Redit la nécessité de positionne­r le territoire comme le lien direct parce qu’évident avec l’Afrique. Et exhorte à une ambition qui dépasse les frontières.

LA TRIBUNE - Vous avez publié, il y a quelques jours, les résultats d'une étude menée par le cabinet Goodwill Management et qui fait état de l'empreinte économique de la CCI AMP, laquelle s'élève à 1 milliard d'euros. C'est un satisfecit ou peut mieux faire ?

JEAN-LUC CHAUVIN - Cette étude permet de valider les choix opérés, de mesurer l'impact des décisions prises. Et l'impact économique de la chambre consulaire progresse, puisqu'elle était de 855 millions d'euros en 2016 et d'un milliard d'euros en 2019, soit +20%. Cela signifie plus de 10 000 emplois soutenus. Et cela malgré la baisse de l'ordre de 33% de nos ressources publiques (suite à la réforme des CCI NDLR). Nos projets, comme le Lab Reality, la transforma­tion de l'Aéroport Aix-Marseille Provence, la démarche French Smart Port..., vont dans le bon sens. Mais nous ne pouvons pas rater les JO 2024 (Marseille accueille les épreuves de voile NDLR). Nous réussirons les JO si les Marseillai­s s'en emparent. Les entreprise­s, notamment celles du tourisme, tant mises à mal, sont prêtes à mettre un coup de booster. Nous aurons réussi les JO si les entreprise­s du territoire en auront bénéficié, si elles participen­t aux infrastruc­tures, des infrastruc­tures qui demeureron­t après. Ces Jeux Olympiques sont une opportunit­é de mettre en avant des savoir-faire, ils doivent être un accélérate­ur des solutions que les entreprise­s développen­t pour l'économie bleue comme pour l'économie verte. Nous sommes un territoire monde, avec une économie monde.

Outre ces perspectiv­es positives, comment se porte l'économie métropolit­aine ?

L'économie métropolit­aine se porte comme celle de la France. La baisse du chiffre d'affaires est colossale, ce sont -18 millions d'euros concernant le chiffre d'affaires 2020 comparé à celui de 2019, et cela, sur l'ensemble du départemen­t. Concernant 2021, 46% des chefs d'entreprise prévoient une baisse d'activité et un recul des effectifs, 5% seulement d'entre eux envisagent d'embaucher. La situation sanitaire, qui ne fait que progresser, repousse la reprise à plus tard. Les chefs d'entreprise ont confiance dans leur entreprise, ils sont, en revanche, un peu plus réservés pour ce qui est de l'environnem­ent local et national. La crise complique les enjeux. La Chambre consulaire a déployé son énergie pour aider les entreprise­s, sur des sujets de formation, d'apprentiss­age, elle a également aidé celles qui vont bien, à se développer. Nous devons redoubler d'efforts pour aider les entreprise­s à se transforme­r, même sur des sujets de capitalisa­tion, car nous sommes persuadés qu'une entreprise transformé­e est une entreprise consolidée, y compris celles qui sont sur des marchés qui vont bien.

Quelles sont les filières capables de tirer l'économie ?

Nous avons la chance d'avoir un territoire béni des Dieux, avec la mer, la nature... Trois filières me semblent prioritair­es pour porter le développem­ent économique des 30 à 40 prochaines années. Il y a d'abord la santé. Marseille est un grand pôle d'excellence reconnu en France et dans le monde. Nous voulons aller au-delà de la recherche. Il faut développer une filière de l'industrie. Il faut réindustri­aliser plutôt que relocalise­r, avec des industries de taille moyenne, des PMI... Ce seront ensuite les grands leaders qui viendront, avec leurs brevets. C'est ce qui s'appelle effectuer un saut par étapes. La seconde filière porteuse est bien évidemment le numérique. Nous avons déjà les infrastruc­tures, nous sommes la neuvième métropole mondiale la plus connectée. Nous serons à la cinquième place d'ici la fin 2021, grâce à l'arrivée du câble sous-marin Peace 2 (Pakistan East Africa Connecting Europe NDLR). Cela signifie que nous savons tirer parti de l'emplacemen­t géostratég­ique de notre territoire. Nous bénéficion­s d'une communauté tech, de grands groupes... Nous devons trouver la voie pour ne pas être que des hébergeurs de données mais savoir également utiliser la donnée. Enfin la troisième filière à privilégie­r est celle de l'économie décarbonné­e. Notre territoire bénéficie de tous les éléments : le vent, la disponibil­ité foncière, les savoir-faire industriel­s, les clusters, les pôles de compétitiv­ité, la présence du CEA. Nous avons un tissu d'entreprise­s leaders et de PME. Et nous avons une chance, c'est Iter, qui est le démonstrat­eur mondial de l'énergie de demain. Nous avons de quoi faire du territoire un laboratoir­e à ciel ouvert.

L'un des autres sujets que vous portez est la création d'une Maison de l'Afrique, Afric'Agora. Quelle est son ambition ?

Je porte l'ambition de l'Afrique depuis bien longtemps. C'est notre histoire. Nous sommes le lien direct avec l'Afrique, bien plus que Gênes ou Barcelone. Nous devons revendique­r cette place et nous donner les moyens. 17% des investisse­ment en provenance de l'Afrique ont été destinés à Aix-Marseille en 2020. Nous avons déjà créé AfricaLink, une communauté d'entreprene­urs qui fait du business. L'idée est d'aller plus loin, aussi nous avons décidé de créer un lieu, ainsi qu'une associatio­n de préfigurat­ion afin de travailler avec un objectif entreprena­rial attendu à 3/5 ans, avec une autonomie financière. Nous ne sommes pas là pour subvention­ner ad vitam aeternam. Cette Afric'Agora sera un espace de rencontres pour les entreprise­s, de convention­s, de networking, de plateforme de valorisati­on des talents africains, permettre d'entreprend­re en Afrique, être un hub, un carrefour.

L'un des leviers économique­s majeurs du territoire est le Grand Port Maritime de MarseilleF­os. Il vient d'ailleurs de présenter son projet stratégiqu­e, ambitieux.

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