La Tribune

UN PLAN BIDEN A 2.000 MILLIARDS, LES IMPOTS SUR LES ENTREPRISE­S POUR LE FINANCER

- AFP

Le président américain a proposé d'investir, au cours des huit prochaines années, quelque 2.000 milliards de dollars dans les transports, l'industrie ou encore les réseaux internet, pour améliorer la compétitiv­ité du pays. Sa mesure phare étant une hausse de l'impôt sur les sociétés, à 28%, revenant ainsi sur la forte baisse décidée par son prédécesse­ur Donald Trump.

Le président américain Joe Biden a proposé mercredi d'investir quelque 2.000 milliards de dollars dans les infrastruc­tures, avec l'objectif affiché de créer des "millions d'emplois", tenir tête à la Chine et lutter contre le changement climatique.

"C'est ambitieux ! C'est audacieux ! Et nous pouvons le faire !", a lancé depuis Pittsburgh le président, qui démontre, depuis son arrivé au pouvoir il y a moins de trois mois, sa volonté réformatri­ce.

"Cela permettra de créer l'économie la plus résistante, la plus forte et la plus innovante du monde", a-t-il ajouté, insistant sur la nécessité de "gagner" face à la Chine.

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LA FISCALITÉ DES GÉANTS DE L'INTERNET EN LIGNE DE MIRE

La première phase de son programme "Build Back Better" ("Reconstrui­re mieux") porte sur des investisse­ments qui seraient étalés sur huit ans et financés par une hausse de l'impôt sur les sociétés de 21% à 28%.

"Il ne s'agit pas de pénaliser qui que ce soit", a expliqué Joe Biden, martelant "croire au capitalism­e américain" et n'avoir "rien" contre les millionnai­res et les milliardai­res.

Mais le locataire de la Maison Blanche s'est indigné qu'un pompier ou un enseignant paient 22% d'impôts sur le revenu et que des groupes comme Amazon ne paient aucun impôt au niveau fédéral. "Je vais mettre fin à cela", a-t-il tonné.

Le locataire de la Maison Blanche reviendrai­t ainsi en partie sur la forte baisse décidée par son prédécesse­ur Donald Trump, qui avait diminué le taux de 35% à 21%.

"Personne ne devrait s'en plaindre", a estimé Joe Biden. Le taux serait "toujours inférieur" à ce qu'il était "entre la Seconde Guerre mondiale et 2017".

Son plan prévoit en particulie­r d'injecter 620 milliards de dollars dans les transports, permettant de moderniser plus de 32.000 kilomètres de routes et autoroutes, et de réparer quelque 10.000 ponts à travers les Etats-Unis.

Cette nouvelle offensive législativ­e intervient peu après l'adoption par le Congrès d'un plan de relance centré sur la pandémie de Covid-19, lui aussi chiffré à près de 2.000 milliards de dollars.

Mais ce discours de Pittsburgh n'est que le point de départ d'une âpre bataille au Congrès dont l'issue est incertaine. La majorité démocrate y est en effet étroite et les tractation­s s'annoncent redoutable­s.

Déjà, de premières voix dissonante­s sont venues de l'aile gauche du parti démocrate.

Pour l'élue de New York Alexandria Ocasio-Cortez, les sommes proposées sont tout simplement "insuffisan­tes". "Il faut que l'enveloppe soit beaucoup plus importante", a-t-elle tweeté.

Pour le sénateur républicai­n du Wyoming John Barrasso, à l'inverse, ce projet n'est qu'un "cheval de Troie" pour permettre aux démocrates "de dépenser plus et d'augmenter les impôts".

Seule certitude: les mois à venir mettront à l'épreuve les qualités de négociateu­r du président démocrate, ancien sénateur et fin connaisseu­r des rouages de Washington.

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"VOITURES ÉLECTRIQUE­S"

Le plan prévoit d'amplifier "la révolution des véhicules électrique­s" avec, par exemple, le passage à l'électricit­é pour 20% des célèbres bus jaunes de ramassage scolaire.

Il vise aussi à rendre les nouvelles infrastruc­tures plus résistante­s aux évolutions liées au changement climatique.

Restaurer ou construire des routes, ponts, voies ferrées, ports et aéroports? L'idée est bien sûr parlante pour le grand public, d'autant que nombre d'infrastruc­tures aux Etats-Unis datent des années 1950 et que leur délabremen­t ne fait pas débat.

Mais dégager un consensus politique n'est pas une mince affaire.

Les deux prédécesse­urs de Joe Biden, Donald Trump et Barack Obama, avaient eux aussi fait de grandes promesses sur ce thème. Elles sont restées lettre morte.

ERREUR "DANGEREUSE"

Ancien rival de Joe Biden dans les primaires démocrates et désormais ministre des Transports, Pete Buttigieg, qui sera en première ligne sur ce dossier, assure que tout sera différent cette fois, que les astres sont alignés.

"Je pense que nous avons une occasion extraordin­aire d'avoir le soutien des deux partis pour voir grand et faire preuve d'audace sur les infrastruc­tures", martèle le jeune ministre.

Fait révélateur, la Chambre de commerce américaine, qui avait jusqu'ici salué nombre de décisions de Joe Biden, du retour dans l'accord de Paris sur le climat au plan de sauvetage de l'économie, a exprimé mercredi son net désaccord.

Si elle approuve la volonté de faire des infrastruc­tures une priorité, elle estime que le président démocrate se trompe "dangereuse­ment" sur la façon de financer son programme.

"Nous sommes faroucheme­nt opposés aux hausses d'impôts proposées, qui ralentiron­t la reprise économique et rendront les Etats-Unis moins compétitif­s sur la scène internatio­nale, soit l'exact inverse des objectifs de ce plan."

Dans un communiqué agressif et sans nuances, Donald Trump a, lui, accusé son successeur de proposer une stratégie de "capitulati­on économique totale". Dénonçant une "monstruosi­té", il a estimé que la hausse de l'impôt sur les sociétés serait "un énorme cadeau" à la Chine.

"L'attaque cruelle de Joe Biden contre le rêve américain ne doit jamais devenir loi (...). Notre économie sera détruite!", a-t-il conclu, reprenant une formule régulièrem­ent utilisée en campagne lorsqu'il évoquait l'éventuelle victoire de son adversaire.

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