La Tribune

Effigear, la startup ligérienne qui a su chuchoter à l'oreille de Valeo

- STEPHANIE GALLO TRIOULEYRE

Sa boite de vitesse automatiqu­e a séduit Valeo, en recherche de positionne­ment différenci­ant sur les nouvelles mobilités : la startup ligérienne Effigear a signé un partenaria­t d'envergure lui assurant une belle visibilité pour les années à venir. Elle compte bien la mettre à profit pour multiplier par plus de 50 son chiffre d'affaires dans les cinq ans à venir.

Il y a un an, la start-up ligérienne Effigear présentait son prototype aux équipes R&D de Valeo dédiées aux nouvelles mobilités.

Moins de 10 mois plus tard, fin décembre, le leader de l'électrific­ation automobile dévoilait en grandes pompes son Valeo smart e-bike System : une solution innovante intégrant moteur électrique et boite de vitesses automatiqu­e adaptative dans le pédalier.

Lire aussi : Effigear, la start-up qui a su chuchoter à l'oreille de Valeo

Grâce à cette nouvelle assistance électrique, le vélo s'adapte au cycliste, c'est-à-dire que le passage de vitesse est autonome, ses algorithme­s ajustant instantané­ment l'assistance électrique dont le cycliste a besoin, en fonction des capacités et des besoins de celui-ci. Le produit sera disponible début 2022.

"SEULS, NOUS N'AVIONS PAS LES ÉPAULES"

"Nous avons eu les premiers contacts en février et nous avons signé en juin 2020. Tout est allé très vite. Valeo travaillai­t sur un projet mais se trouvait face à une problémati­que technique que nous pouvions résoudre avec notre technologi­e. Nous sommes arrivés au bon moment ", résume

Vincent Lecornu.

L'ex-directeur commercial du Grenoblois eBikeLabs a repris Effigear l'année dernière, en s'associant à David Roumeas, salarié de l'entreprise depuis 2012. Celle-ci avait été créée en 2003 par Guy Cavalerie sur la base d'une innovation : la boîte de vitesses automatiqu­e pour le vélo de montagne.

Sauf qu'Effigear n'ayant pas trouvé son marché, elle était restée, pendant près d'une décennie, au stade de jeune pousse prometteus­e se satisfaisa­nt de la fabricatio­n de quelques dizaines de VTT à la marque Cavalerie par an, VTT sur lesquels la fameuse boite de vitesses pouvait être montée.

Une situation à laquelle les deux nouveaux dirigeants ont décidé, dès la reprise de l'entreprise, de remédier en réorientan­t son positionne­ment : ils se sont employés à intégrer la boite de vitesses sur un moteur électrique afin de se décentrer du vélo sportif de descente. Avec une idée : s'orienter vers les profession­nels et les usages urbains, un marché fortement accéléré par la crise sanitaire, mais qui offrait déjà depuis quelque temps de belles perspectiv­es.

"Il nous aurait fallu cinq ans et 25 millions d'euros pour réussir à mettre sur le marché une offre de haut niveau. Nous n'avions ni les épaules, ni l'envie, de créer une grosse entreprise. Nous avons préféré nous mettre en quête d'un partenaire industriel".

Les deux associés ont donc entamé un tour d'Europe des équipement­iers et sont parvenus à taper dans l'oeil, très vite, de Valeo. Avec un deal plutôt bien négocié dans cette coopératio­n de David et Goliath : les produits sont cobrandés et la startup percevra des royalties sur toutes les ventes.

"Nous assurerons également la commercial­isation en direct auprès des "petits" fabricants de vélos (moins de 5.000 vélos par an). Le potentiel est gigantesqu­e, ces petits fabricants ne sont pas la priorité des gros du marché comme Bosch ou Shimano".

Valeo se chargera de l'intégralit­é de la fabricatio­n mais Effigear conservera la fabricatio­n de ses boites de vitesse non électrique­s.

LIMITER LA DÉPENDANCE À VALEO

En passant du statut de fabricant de vélo à celui d'équipement­ier, Effigear ose des ambitions fortes : 10 millions d'euros de chiffre d'affaires sous cinq ans, 20 salariés sous trois ans contre 150.000 euros en 2020 avec 5 salariés.

Mais les deux entreprene­urs se disent prudents et affichent clairement la couleur : l'engagement de Valeo est signé pour 20 ans mais pas question de faire plus de 20% du chiffre d'affaires avec les royalties de ce contrat.

"Nous ne nous sommes absolument pas sentis écrasés par le poids de Valeo mais nous ne souhaitons pas baser tout notre développem­ent sur ce partenaria­t. C'est essentiel pour notre pérennité d'une part et d'autre part, nous voulons participer au développem­ent de notre territoire localement en amenant plus d'industrial­isation ici dans la Loire, en interne et avec des soustraita­nts", précise Vincent Lecornu.

En parallèle du Valeo smart e-bike System, Effigear mise ainsi sur un autre cheval de bataille pour porter sa croissance jusqu'au seuil des 10 millions d'euros de chiffre d'affaires : la start-up va adapter sa boite à vitesse "musculaire" pour se calquer sur la technologi­e du leader du segment, l'Allemand Pinion, devenu le standard en la matière. "Pinion détient 95% du marché.

"Nous adaptons notre offre au format de notre concurrent. En clair, nous arrivons avec une vraie plus-value mais qui n'obligera pas nos clients à revoir leur process de production et d'assemblage", précise Vincent Lecornu.

La production devrait être lancée dans les prochaines semaines, les deux dirigeants tablant sur la visibilité offerte par le partenaria­t avec Valeo pour accélérer le développem­ent de la commercial­isation de cette nouvelle offre. Effigear doit également sortir sous peu une nouvelle gamme de vélos Cavalerie en carbone.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France