La Tribune

Le dernier fabricant de jantes automobile­s en France en redresseme­nt judiciaire

- GUILLAUME FISCHER

Liberty Alvance, qui opère notamment le seul fabricant en France de jantes automobile­s en aluminium, Alvance Aluminium Wheels à Diors dans l’Indre (36), vient d’être placé en redresseme­nt judiciaire. Près de 600 emplois au total sont dans la balance.

La décision du tribunal de commerce de Paris, siège de Liberty Alvance, est tombée comme un couperet le 12 avril dans la soirée. Les juges ont placé la société en redresseme­nt judiciaire. Frédéric Abitbol, associé du cabinet Abitbol & Rousselet, a été désigné comme administra­teur judiciaire de l'entreprise basée dans l'agglomérat­ion de Châteaurou­x. Filiale du méga-groupe minier anglo-indien Gupta Family Group (GFG) Alliance (17 milliards d'euros de recettes et 35 000 salariés dans le monde), Liberty Alvance a racheté en 2018 l'ex Liberty Wheels à Diors.

Rebaptisée Alvance aluminium Wheels, l'usine fabrique des jantes automobile­s en aluminium. Les deux autres sites repris, Alvance aluminium Poitou et Alvance Foundry Poitou (ex Fonderie du Poitou à Ingrandes dans la Vienne), fabriquent respective­ment des culasses et des carters pour moteurs. Une procédure de conciliati­on auprès du tribunal de commerce avait été ouverte début avril par Liberty Alvance, laissant augurer une possible déclaratio­n de cessation de paiement de la part de cette dernière. En cause, des pertes de l'ordre de 12 millions d'euros pour 85 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2020 que GFG Alliance n'a pas pu éponger en raison de la liquidatio­n de Greensill début mars. La société financière britanniqu­e était le principal bailleur de fonds du congloméra­t.

SOUS-TRAITANTS AUTOMOBILE­S ULTRA-MODERNES...AU MAGHREB

La politique industriel­le des constructe­urs automobile­s expliquera­it en partie les difficulté­s récurrente­s des trois fonderies, notamment le site de Diors.

« Renault et PSA, les deux principaux donneurs d'ordre de la société, se sont engagés sur des volumes de commandes qu'ils ne tiennent pas, déplore un élu de la métropole castelrous­sine. Au lieu des 120 000 roues promises, ils en ont acheté seulement 40 000 l'année dernière. Le reste est produit par les sites ultra-modernes de sous-traitants installés à côté de leurs usines, notamment au Maghreb ou en Europe de l'Est ».

Outre le fort manque à gagner, cette stratégie low cost se traduirait par un retard d'investisse­ment important chez Alvance Aluminium Wheels.

« L'usine s'est peu ou mal modernisée depuis 40 ans, constate le même élu. Résultat, la qualité des jantes s'en ressent et provoquent des baisses de commandes supplément­aires ». La crise sanitaire depuis un an, qui touche lourdement le marché automobile, a encore aggravé cette politique d'achat au moindre coût, déjà pratiquée à grande échelle dans la grande distributi­on alimentair­e.

RUNACHER ET LE MAIRE MONTENT AU CRÉNEAU

Le mise redresseme­nt judiciaire de Liberty Alvance, qui devrait aboutir à une cession, impactera près de 600 emplois au total. Sur le site de Dior, qui salarie 297 personnes, un comité social économique (CSE) se tiendra jeudi pour informer officielle­ment les collaborat­eurs de la situation périlleuse de l'entreprise. L'avenir des fonderies automobile­s françaises, de plus en plus concurrenc­ées à l'internatio­nal malgré les promesses de relocalisa­tion industriel­le, constitue un motif d'inquiétude au plus haut niveau de l'Etat. Le cabinet de la ministre chargée de l'industrie Agnès Pannier Runacher planche ainsi depuis plusieurs semaines sur les solutions de reprise des trois sites de Liberty Alvance. Plus généraleme­nt, Bercy, par la voix de son locataire Bruno Le Maire, réunira à court une table ronde sur le sujet. Au programme, l'avenir des fonderies industriel­les et les solutions pour les maintenir dans l'Hexagone.

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