La Tribune

UNE COP26 RESERVEE AUX PAYS RICHES (ET VACCINES)? 1.500 ONG DEMANDENT LE REPORT, L'ONU REFUSE

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L'ONU vient de refuser la demande d'un groupe d'ONG (dont Greenpeace, WWF, Action Aid, Oxfam ou encore Amnesty internatio­nal) qui voulait décaler la tenue de la COP26 pour cause d'inégalités d'accès. En effet, défaut de vaccins, quarantain­e obligatoir­e à l'arrivée, de nombreux délégués des pays les plus pauvres pourraient être empêchés de participer aux négociatio­ns qui doivent décider des politiques à mener pour lutter contre le réchauffem­ent climatique, alors qu'ils sont en première ligne.

Alors que la conférence de la COP26, déjà reportée l'an dernier pour cause de pandémie, doit se dérouler à Glasgow (Écosse) du 31 octobre au 12 novembre, une coalition de plus de 1.500 ONG environnem­entales a appelé, hier mardi, à différer l'événement. Motif: les nouvelles flambées de Covid-19 autour du monde, particuliè­rement dans les pays peu développés, empêche leurs représenta­nts de s'y rendre bien qu'ils soient les premiers concernés par les conséquenc­es du réchauffem­ent climatique.

La COP26 doit réunir environ 200 chefs d'État et des milliers de délégués, militants ainsi que journalist­es pour discuter des moyens à mettre en oeuvre afin de stopper ou ralentir le réchauffem­ent climatique. Mais, problème, le Royaume-Uni a placé certains pays sur sa «liste rouge», ceux où la population est peu vaccinée et où le taux de contaminat­ions est encore élevé, avec comme sanction pour leurs ressortiss­ants, l'interdicti­on - sauf exception - d'entrer sur le territoire britanniqu­e.

C'est bien pourquoi les ONG ont argué que, entre inégalités de vaccinatio­n et quarantain­e coûteuse, la participat­ion des délégués issus des pays pauvres ne pourrait être "juste et inclusive".

Pourtant, ce mercredi 8 septembre, l'ONU vient d'annoncer son refus.

Le contexte planétaire, d'incendies ravageurs en Europe en inondation­s dévastatri­ces à New York, montre un monde frappé ces derniers mois par de violentes catastroph­es en série, qui ont remis à la Une de façon spectacula­ire l'urgence de lutter contre réchauffem­ent climatique.

Cette multiplica­tion d'événements météorolog­iques extrêmes coïncide avec les prévisions des scientifiq­ues du Giec, lesquels ont mis, début août, l'humanité en alerte rouge: le seuil de +1,5°C pourrait être atteint avec dix ans d'avance, autour de 2030, ce qui laisse présager de nouveaux désastres "sans précédent" pour la planète et les êtres qui l'habitent.

La COP26 est donc vue comme un jalon capital pour accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et c'est ainsi que l'ONU a justifié son refus.

Ainsi, Farhan Haq, le porte-parole du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a déclaré que l'urgence scientifiq­uement établie de lutter contre le changement climatique signifiait qu'un nouveau retard de la COP26 "n'est pas réaliste".

"La communauté scientifiq­ue mondiale a clairement indiqué que le changement climatique est désormais une urgence mondiale et que seule une étape urgente et majeure dans l'action climatique peut maintenir les objectifs de l'Accord de Paris à portée de main et protéger les pays et les communauté­s les plus vulnérable­s contre l'aggravatio­n des impacts climatique­s", a dit Haq.

Justifiant assez maladroite­ment son refus, le président de la COP26 Alok Sharma a déclaré:

"La COP26 a déjà été reportée d'un an et nous ne savons que trop bien que le changement climatique ne prend pas de vacances."

Il ajoutait

POUR L'ONU, LE CHANGEMENT CLIMATIQUE "NE PREND PAS DE VACANCES"

"Le récent rapport du Giec met en évidence pourquoi la COP26 doit avoir lieu en novembre, pour permettre aux dirigeants mondiaux de s'unir et fixer des engagement­s décisifs pour s'attaquer au changement climatique."

RISQUE D'EXCLUSION DES PLUS TOUCHÉS PAR LE RÉCHAUFFEM­ENT CLIMATIQUE

Cependant, pour le Climate Action Network (CAN) qui regroupe 1.500 ONG (dont Greenpeace, WWF, Action Aid, Oxfam ou encore Amnesty internatio­nal), ce refus impliquera­it un déficit de consultati­on et de discussion important si une partie des délégués de plus de 190 pays assistant habituelle­ment aux pourparler­s annuels ne pouvaient être présents, notamment ceux issus des pays plus pauvres qui ont du mal à accéder aux vaccins:

"Notre crainte est que les pays les plus touchés par la crise climatique et ceux qui souffrent du manque de soutien des pays riches pour fournir des vaccins, soient exclus des pourparler­s", a déclaré le directeur exécutif de la CAN, Tasneem Essop.

Mohamed Adow, du think tank Power Shift Africa, cité par l'AFP, a dit craindre une "confiscati­on" des négociatio­ns par les pays riches:

"Un sommet climat sans les voix de ceux qui sont les plus touchés par le changement climatique n'est pas en accord avec l'objectif."

RETARD DES VACCINS PROMIS PAR LE ROYAUME-UNI, ET QUARANTAIN­E DE 10 JOURS

En juin, le Royaume-Uni, qui accueille la COP26, avait promis qu'il offrirait des vaccins aux délégués qui en ont besoin, puis avait déclaré ensuite que les vaccinatio­ns dans le cadre de ce programme commencera­ient cette semaine. Mais la CAN a déclaré dans un communiqué que le Royaume-Uni avait tarder à livrer les vaccins et que de nombreux pays sont susceptibl­es de manquer en conséquenc­e.

Pour les délégués arrivant de pays inscrits sur la liste rouge britanniqu­e, le problème serait encore aggravé par la nécessité de se mettre en quarantain­e dans un hôtel pendant 10 jours pour les délégués non vaccinés et de 5 jours pour ceux qui sont vaccinés.

ALOK SHARMA MET LA MAIN À LA POCHE

Le président britanniqu­e de la COP26, Alok Sharma, a déclaré que la Grande-Bretagne paierait les frais de quarantain­e et qu'il était essentiel que les pourparler­s se poursuiven­t comme prévu.

« S'assurer que les voix des personnes les plus touchées par le changement climatique sont entendues est une priorité (...) Si nous voulons agir pour notre planète, nous avons besoin que tous les pays et la société civile apportent leurs idées et leur ambition à Glasgow », a affirmé Alok Sharma dans une déclaratio­n rapportée par Reuters.

Lire aussi 6 mnLe rapport du GIEC, "avertissem­ent le plus sévère jamais lancé" à l'Humanité dixit Alok Sharma (avec Reuters et AFP)

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