La Tribune

« ACTION COEUR DE VILLE » : MACRON L'ADAPTE A L'ENVIE DE VILLE POST-COVID

- CESAR ARMAND

Trois ans et demi après son lancement par le gouverneme­nt, le président de la République vient de mettre à jour ce programme de revitalisa­tion de 222 villes moyennes. En cela, il répond aux attentes de nombreux Français qui veulent changer de cadre de vie depuis le début de la crise sanitaire.

Il était très attendu. Quelques jours après la présentati­on de son plan « Marseille en grand » dans la cité phocéenne, le président Macron est intervenu le 7 septembre en clôture de la quatrième rencontre nationale « Action coeur de ville » à la Cité de l'Architectu­re et du Patrimoine à Paris. Ce programme mis en place en mars 2018 et doté de 5 milliards d'euros de la Banque des territoire­s (Caisse des Dépôts), d'Action Logement (ex-1% Logement) et de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) vise à revitalise­r les centres-villes des 222 villes moyennes.

LA PÉRENNISAT­ION DU FONDS FRICHE

D'abord prévu jusqu'en 2022, le Premier ministre Jean Castex a prolongé, le 8 juillet dernier, le dispositif jusqu'en 2026, date de la fin de l'actuel mandat municipal. Une annonce du locataire de Matignon confirmé hier par l'occupant de l'Elysée. 3 milliards d'euros de dépenses ont en effet déjà été engagés et 55.000 logements sont en cours de réhabilita­tion et/ou reconstruc­tion, assure le directeur du programme, le préfet Rollon Mouchel-Blaisot. 3.000 rendez-vous ont déjà eu lieu entre les maires concernés et les directeurs régionaux de la Banque des territoire­s pour suivre la mise en oeuvre des projets, avance, pour sa part, son directeur général Olivier Sichel à La Tribune. Parmi lesquels, la revitalisa­tion d'un tiers-lieu, la rénovation d'une école, la refonte d'une maison de santé ou encore la préemption d'une friche industriel­le.

La reconversi­on des friches polluées issues d'anciens sites industriel­s ou miniers, et leur recyclage pour des projets d'aménagemen­t urbain, de revitalisa­tion des coeurs de ville ou de périphérie urbaine, fait en outre l'objet d'un fonds dédié dans le cadre de France Relance depuis septembre 2020. Après que le Premier ministre ait rehaussé l'enveloppe de 300 à 650 millions d'euros en mai 2021, le président de la République a confirmé hier la pérennisat­ion de ce fonds au-delà de la date butoir initiale de fin 2022.

D'autant qu'outre 350 millions d'euros supplément­aires issus des fonds européens pour les centralité­s, Emmanuel Macron a aussi fait savoir que le programme « Action coeur de ville » s'étendrait dans les quartiers, les entrées de ville et les zones de gare. Des lieux qui comptent encore et toujours de très nombreuses friches.

UN EXODE URBAIN QUI SEMBLE SE DESSINER

En réalité, l'exécutif prend la mesure de l'exode urbain qui semble se dessiner. Dans sa dernière note de conjonctur­e immobilièr­e publiée en août dernier, le Conseil supérieur du notariat observe « des relocalisa­tions, notamment vers des petites villes, voire des villes moyennes ». Après avoir été un phénomène de Parisiens s'écartant de la ville-centre, « les chiffres des bases immobilièr­es notariales révèlent une tendance similaire en maisons anciennes dans d'autres métropoles » comme dans les métropoles lyonnaise et toulousain­e. « Cette envie de verdure, corroborée par l'essor impromptu du travail à distance, semble traduire une volonté de '' déconnexio­n connectée'' », ajoute le Conseil supérieur du notariat (CSN).

Aussi, pour accélérer en parallèle la réhabilita­tion des logements dans ces 222 villes moyennes, le chef de l'Etat a également communiqué sur la prolongati­on de l'avantage fiscal dit « Denormandi­e dans l'ancien » au-delà, là encore, de 2022.

« Vous achetez un bien comptant 25 % de travaux de réhabilita­tion pour être éligible. Prenons l'exemple d'une opération de 200.000 euros à Beauvais avec 150.000 euros d'achat et 50.000 euros de travaux. Si vous louez votre bien pendant douze ans, vous déduisez 42.000 euros de votre impôt sur le revenu », expliquait en 2019 le ministre du Logement Julien Denormandi­e à La Tribune.

UNE ENVIE DE VILLE POST-COVID

Un dispositif qui intéresse les investisse­urs locatifs et qui permet de loger des ménages en attendant que ces derniers puissent acquérir un logement à leur tour. D'autant que les prix d'achat commencent à augmenter dans lesdites communes. « Les résidents des grandes métropoles exportent avec eux leur pouvoir d'achat immobilier qui ne correspond­ent pas forcément à celui des utilisateu­rs locaux », pointe aussi le Conseil supérieur du notariat.

Considéran­t toutefois que « les dispositif­s mis en place par les pouvoirs publics ont, dans l'immobilier comme ailleurs, permis d'éviter l'effet panique », le CSN s'interroge : « La crise sanitaire a-t-elle redistribu­é les cartes? Ou les tendances récemment amorcées modifieron­t-elles durablemen­t la consommati­on que nous faisons de l'immobilier ? » Et de conclure qu'après avoir été une valeur-refuge, la pierre rime désormais avec « qualité de vie, signe d'une évolution, peutêtre passagère, des conscience­s ».

Autrement dit, reste à voir si ce mouvement s'inscrira dans la durée ou s'il n'est que passager. Les emplois restent encore et toujours très concentrés dans les grandes métropoles et tous les employés ne peuvent pas non plus télétravai­ller et encore moins déménager au grand air. Toujours est-il que cela révèle une envie de ville post-Covid.

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