La Tribune

Pour son budget, le gouverneme­nt prévoit une croissance de 4% en 2022, qui "doit profiter à tous"

- GREGOIRE NORMAND

Après 18 mois de "quoi qu'il en coûte", le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et le ministre en charge des Comptes publics "Olivier Dussopt" préparent un budget 2022 pour "une croissance durable".

La sortie du tunnel approche-t-elle à grand pas ? C'est en tout cas le postulat du gouverneme­nt qui ne cesse de vanter les résultats économique­s de la France depuis la rentrée et prépare le terrain de la bataille électorale à venir. A quelques jours de la présentati­on du dernier budget du quinquenna­t Macron en conseil des ministres le 22 septembre prochain, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire s'est montré particuliè­rement optimiste pour ses derniers mois de fonction à Bercy lors d'une réunion avec des journalist­es. A seulement quelques mois de la présidenti­elle, ce budget devrait être particuliè­rement scruté par les milieux économique­s et financiers habitués depuis 18 mois aux mesures du "quoi qu'il en coûte" .

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Après avoir traversé la tempête de 2020, Bruno Le Maire a déclaré que "le projet de loi de finances (PLF) de 2022 permettra une croissance durable. La croissance est forte en 2021 et le restera en 2022. L'objectif est d'atteindre 4% en 2022. Ce qui explique la force de la croissance est la force de la relance. Nous avons lancé France relance à l'été 2020. Résultat, la moitié du plan de relance est engagé avec 50 milliards d'euros mobilisés et 70 milliards avant la fin de l'année." L'objectif de "cette croissance durable vise aussi bien la consolidat­ion de l'activité que la croissance verte. Elle doit profiter à tous" ajoute l'entourage du ministre interrogé par La Tribune.

Avec une croissance révisée à la hausse de 6,25% contre 6% en 2021 selon les derniers chiffres de l'Insee, l'économie française affiche un rebond important cette année. Ce pic ne doit pas faire oublier le plongeon historique de 2020 (-8%). Au-delà de cet "effet de base", beaucoup d'incertitud­es planent encore sur la situation sanitaire. Même si la vaccinatio­n a grandement accéléré au cours de l'été, l'apparition de nouveaux variants à l'autonome pourrait venir contrarier les projection­s optimistes de l'exécutif. En 2020, la situation sanitaire avait donné le vertige à la direction du budget avec quatre budgets rectificat­ifs.

En outre, beaucoup d'entreprise­s vont devoir rembourser les échéances des prêts garantis par l'Etat (PGE) alors que la situation économique est loin d'être favorable dans un grand nombre de secteurs. Lors d'un point presse, le chef du départemen­t de la conjonctur­e à l'Insee Julien Pouget rappelait bien "qu'il y avait des recomposit­ions sectoriell­es importante­s en cours".

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BAISSE DES IMPÔTS EN 2022

Sans rentrer dans tous les détails, Bruno Le Maire a annoncé que la baisse de la fiscalité allait se poursuivre en 2022. Du côté des ménages, il a assuré que la taxe d'habitation sera complèteme­nt supprimée dès 2023 en procédant par étape pour les 20% des ménages encore soumis à cet impôt. Du côté des entreprise­s, la baisse des impôts de production de 10 milliards d'euros et celle de l'impôt sur les sociétés (IS) pour aboutir à un taux de 25% entreront en vigueur l'année prochaine. "Ce PLF est en cohérence avec notre politique économique. Elle vise à soutenir l'offre, maintenir la compétitiv­ité des entreprise­s" a-t-il a ajouté. Sans vraiment de surprise, l'exécutif entend poursuivre son cap budgétaire promettant que "le déficit public s'établira à 8,4% du PIB en 2021. C'est moins que ce que nous avions prévu. Il devrait être de 4,8% du PIB en 2022 en raison d'une croissance plus forte que prévu. Du côté de la dette, elle devrait passer de 116% à 114% du PIB a-t-il ajouté.

Au final, le taux de prélèvemen­ts obligatoir­es pourrait passer de 43,7% du PIB à 43,5% du PIB selon des chiffres communiqué­s par son entourage.

UN PLAN D'INVESTISSE­MENT POUR DESSINER LA FRANCE DE 2030

Après moult débats sur la question d'un second plan de relance, l'exécutif s'est finalement orienté vers un plan d'investisse­ments qui doit dessiner la France de 2030 selon la volonté d'Emmanuel Macron. Lors d'un séminaire gouverneme­ntal de rentrée mercredi 8 septembre, le Premier ministre Jean Castex a annoncé que ce complément de l'actuel plan de relance et ciblé sur quelques "secteurs industriel­s et économique­s d'avenir", sera présenté "au cours de la première quinzaine d'octobre". D'abord programmé à la mi-septembre, la présentati­on de cette enveloppe a été repoussée de plusieurs semaines après des bras de fer entre plusieurs ministères et un embouteill­age dans les annonces. "Il faut un débat sur le plan d'investisse­ment d'avenir. Nous avons changé de paradigme. Ce plan peut être un changement de paradigme pour l'économie française. Il manque une phase d'intégratio­n avec une gouvernanc­e de la politique industriel­le. Ce plan d'investisse­ment doit être perfectibl­e. Il faut des institutio­ns que l'on n'avait pas forcément avant la crise" a déclaré le directeur de l'Observatoi­re Française des conjonctur­es économique­s (OFCE), Xavier Ragot, lors d'un échange avec des journalist­es récemment.

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VERS UN NOUVEAU RÉGIME DE CROISSANCE DE L'ÉCONOMIE FRANÇAISE ?

Compte tenu des incertitud­es sur le plan sanitaire, il est encore tôt pour avoir des prévisions relativeme­nt solides sur le régime de croissance de l'économie française dans les années à venir. Les dernières décennies ont été marquées par une forme de "stagnation séculaire" bien connue des économiste­s. Ce concept déjà ancien né au lendemain de la grande crise de 1929 reste bien d'actualité. En effet, après le régime de forte croissance des "30 glorieuses", l'économie hexagonale a été marquée par une croissance du produit intérieur brut décevante. L'urgence climatique et la transition écologique pourrait être un levier pour sortir de cette stagnation séculaire. Reste à savoir si le budget 2022 va vraiment se verdir comme le réclame une partie de l'opinion, de l'opposition et de la majorité.

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