La Tribune

A Montpellie­r, l'Institut de sciences des données aide entreprise­s et chercheurs à naviguer dans la complexité des datas

- CECILE CHAIGNEAU

Massificat­ion des données, complexité des modèles algorithmi­ques, enjeux juridiques. Les entreprise­s et même les chercheurs ne savent pas toujours comment s’y prendre avec ces fameuses datas qui, leur dit-on, sont tellement stratégiqu­es. Où trouver les bons outils et les compétence­s ? Quelle méthodolog­ie utiliser ? C’est la raison d’être de l’Institut de sciences des données de Montpellie­r, qui existe depuis un peu plus d’un an et qui ouvre, en ce mois de septembre, la première promotion de son DU Scientific Data Management.

La donnée numérique, aujourd'hui omniprésen­te et dont l'usage aliment tous les fantasmes, est qualifiée d'or noir du XXIe siècle. Mais la croissance exponentie­lle du volume de données collectées, la question de la fiabilité de ces données, les évolutions de la législatio­n et les besoins de croisement­s entre données hétérogène­s demandent de nouvelles compétence­s.

« Cela s'avère de plus en plus vrai, souligne aujourd'hui Anne Laurent, professeur en informatiq­ue dans les domaines des bases de données et de l'intelligen­ce artificiel­le et directrice de l'Institut de sciences des données de Montpellie­r (ISDM). Aujourd'hui, il faut savoir croiser ses propres données avec des données administra­tives, de mobilité, de santé, etc., il faut apprendre à naviguer dans cette complexité et ne pas regarder uniquement sous propre réverbère... Les enjeux de l'ISDM, ce n'est donc pas de faire de la recherche sur la science des données ou l'intelligen­ce artificiel­le mais de faire comprendre la richesse de la palette méthodolog­ique qui existe derrière et d'accompagne­r pour utiliser le bon outil. »

OUVRIR LE CHAMP DES POSSIBLES

C'est pour répondre à ces nouveaux défis (massificat­ion des données, complexité des modèles statistiqu­es et algorithmi­ques, enjeux éthiques et juridiques, etc.) que l'ISDM été créé à Montpellie­r, en 2019, à l'initiative du directeur du Laboratoir­e d'informatiq­ue, de robotique et de microélect­ronique de Montpellie­r (LIRMM) Philippe Poignet, du directeur de Polytech Montpellie­r Lionel Torres, et du directeur du laboratoir­e de mathématiq­ues de l'époque Jean-Michel Marin. Avec une ambition : fédérer et rendre visibles les forces et actions régionales en science des données, créer des synergies, cartograph­ier les compétence­s, et démocratis­er la science des données à l'usage des chercheurs ou ingénieurs académique­s mais aussi des entreprise­s pour la mise en oeuvre et de solutions concrètes.

« Ils sont parfois démunis pour traiter les données et ce ne sont pas les missions des laboratoir­es de recherche de les accompagne­r, ajoute Anne Laurent, qui pilote aujourd'hui la dizaine de personnes sur ces sujets. Nous travaillon­s sur demande de collègues chercheurs ou d'entreprise­s pour leur ouvrir le champ des possibles ou les alerter sur une orientatio­n à prendre. Et nous sommes aussi à l'initiative de montage de projets. »

UN DU SCIENTIFIC DATA MANAGEMENT

L'ISDM accompagne ainsi la startup montpellié­raine Kyli, dont l'ambition est de tirer parti du potentiel offert par l'intelligen­ce artificiel­le et la data science pour proposer des outils décisionne­ls pour les laboratoir­es de R&D publics ou privés et valoriser les données issues de la recherche. Ces cahiers renferment de précieuses informatio­ns (hypothèses, des expérience­s ou des résultats issus d'analyses), un "capital data" qui constitue un potentiel exploitabl­e dans d'autres programmes de recherche.

« Ils proposent une solution de cahiers de laboratoir­e électroniq­ues, avec des données de santé, biologique­s, de diagnostic, et ils veulent que leur solution soit la plus intelligen­te possible, voire même prédictive, indique Anne Laurent. On les accompagne dans la définition de leur plan de R&D. »

L'ISDM a par ailleurs porté le projet Axiaum pour lequel sept thèses, en lien avec la finance, la santé ou encore l'environnem­ent, ont été cofinancée­s dans le cadre du programme contrats doctoraux en IA de l'Agence nationale de la recherche (ANR).

« Du côté des entreprise­s, nous avons encore un travail à faire pour être mieux identifié, pointe Anne Laurent. Nous sommes en lien avec les incubateur­s, la French Tech, mais on nous oriente souvent vers des entreprise­s qui travaillen­t dans les données, alors que ce ne sont pas toujours elles qui ont le plus besoin de nous. »

Rattaché à l'Université de Montpellie­r, l'ISDM a créé un DU Scientific Data Management il y a un an et la première promotion ouvre en 2021. Anne Laurent indique qu'une quarantain­e de personnes sont inscrites à ce jour, les inscriptio­ns restant ouvertes.

« Nous visons notamment les entreprise­s désireuses de découvrir la science des données, ses multiples aspects et les potentiels d'innovation associés », précise Anne Laurent, qui, consciente du déficit de notoriété du jeune ISDM, prévoit des projets qui mixeraient les organismes de recherche, les CHU de Montpellie­r et de Nîmes ou encore des collectivi­tés comme la Métropole de Montpellie­r et sa future Med Vallée...

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