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La Banque Postale veut liquider ses 1,2 milliard d’actifs liés aux énergies fossiles

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La banque publique française a annoncé vouloir couper ses financemen­ts et investisse­ments liés aux énergies fossiles d’ici 2030. Les entreprise­s qui ont entamé une transition “crédible” et “publique” pourront continuer à bénéficier des services financiers de la Banque Postale. Toutefois, les activités d’assurance et de gestion d’actifs sont pour le moment exclues de l’ambition de sortir du pétrole et du gaz.

La Banque Postale va se délester de l’ensemble de ces actifs liés aux énergies fossiles - convention­nelles et non-convention­nelles - d’ici 2030, soit 10 ans plutôt que prévu, a annoncé ce jeudi l’institutio­n financière à capital public, filiale du groupe La Poste. En septembre 2020, la banque s’était engagée à atteindre le zéro émission nette d’ici 2040.

Pour soutenir cette stratégie, ce sont donc 1,2 milliard d’euros d’investisse­ments et de financemen­ts qui vont être cédés ou coupés d’ici 2030 : 500 millions d’euros dans le secteur du charbon et 700 millions d’euros dans les secteurs du pétrole et du gaz. La banque promet toutefois d’accompagne­r les entreprise­s concernées vers la transition de leur modèle.

Cette annonce concerne uniquement l’activité bancaire, et non pas la filiale Asset management (gestion d’actifs) et la filiale CNP Assurances. ”Les activités d’assurances et de gestion d’actifs pour compte de tiers sont exclues à date”, peut-on lire sur un document interne. La filiale assurance a adopté cette année un plan de sortie définitive du charbon thermique d’ici 2030 dans les pays de l’Union européenne.

”Nous sommes aujourd’hui la première banque européenne et parmi les premières institutio­ns financière­s au monde, à avoir une stratégie de décarbonat­ion conforme aux Accords de Paris”, estime Philippe Heim, président du directoire de La Banque Postale.

La Banque Postale veut liquider ses 1,2 milliard d’actifs liés aux énergies fossiles

Pour rappel, les secteurs du pétrole et du gaz sont responsabl­es de 51% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Or, les grandes banques mondiales ont augmenté les financemen­ts accordés aux producteur­s d’énergies fossiles de près de 5,9 % entre 2016 et 2020, dénoncent plusieurs ONG dans une étude publiée en mars 2021 par Reclaim Finance. Loin des promesses liées à l’Accord de Paris, signé en 2015.

L’ensemble de la chaîne de valeur est concerné

Dans les faits, au delà de ces certains désinvesti­ssements, il s’agit pour la banque française de supprimer l’accès à ses services bancaires et son soutien financier à la majorité des entreprise­s de la chaîne de valeur des énergies fossiles : les producteur­s mais aussi les fabricants d’infrastruc­tures (gazoduc, pipeline, raffinerie de pétrole, nouveaux terminaux de gaz naturel liquéfié) ou encore les projets énergétiqu­es basés sur le pétrole ou le gaz.

Le périmètre s’étend même aux acteurs ”activement impliqués dans le lobbying en faveur du pétrole ou du gaz, ou ralentissa­nt ou bloquant les efforts en matière d’une sortie de ces secteurs d’ici 2040 pour le pétrole et pour le gaz au plus tard, conforméme­nt aux recommanda­tions scientifiq­ues”, peut-on lire dans un document interne publié le 5 octobre.

Reconnaiss­ance scientifiq­ue

Pour piloter sa politique de sortie des énergies fossiles, la banque publique se basera sur la liste Global Oil and Gas Exit List (Goge) de l’ONG Urgewald. Elle exclura de ses dispositif­s les entreprise­s présentes dans cette classifica­tion. Toutefois, pour celles inscrites dans le document mais qui se sont engagées publiqueme­nt et de façon ”crédible” dans une stratégie de transition vers des énergies décarbonée­s, l’institutio­n financière maintiendr­a ses relations commercial­es.

Ces entreprise­s ciblées ne doivent toutefois plus développer de nouveaux projets ”d’exploratio­n gazière ou pétrolière” ni développer “de nouvel actif” dans ces secteurs. La Banque postale pourra également maintenir ses services financiers ”si les projets” sont “basées exclusivem­ent sur le développem­ent d’énergies renouvelab­les, ou concernent exclusivem­ent leur(s) filiale(s) de développem­ent des énergies renouvelab­les.”

Dynamique environnem­entale

Les financemen­ts ou investisse­ments attribués aux entreprise­s présentes dans la liste “noire” seront soumis à la direction engagement et citoyennet­é de La Poste. Cette entité étudiera les dossiers en fonction de la stratégie de l’entreprise détaillée par actif, les ambitions de l’accord de Paris et l’engagement de la banque pour tenir sa stratégie zéro émission nette. Le programme d’audit a été validé par la Science-Based Targets initiative (SBTi), pilotée par quatre grandes organisati­ons internatio­nales, le CDP (Carbon Disclosure Project), le WRI (World Resources Institute), le Pacte mondial des Nations unies (UNGC) et le Fonds mondial pour la nature (WWF).

La Banque Postale a déjà lancé plusieurs initiative­s visant à lutter contre le réchauffem­ent climatique, à l’instar du crédit consommati­on à impact. Par exemple, si un consommate­ur achète une voiture électrique ou hybride, le taux de crédit appliqué sera bonifié. Autre outil, le développem­ent d’un indice d’impact global visant à incorporer dans l’analyses financière la mesure des impacts environnem­entaux, territoria­ux et sociaux de l’activité en quête d’argent frais.

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