La Tribune

Air Liquide plante son drapeau sur le projet de gigafactor­y hydrogène de la vallée de Seine

- Nathalie Jourdan

Le groupe présidée Benoît Potier annonce le rachat de la totalité des parts de la société H2V Normandy à l’origine d’un projet de giga usine d’électrolys­eurs près du Havre. Le site, d’une capacité d’au moins 28.000 tonnes, pourrait produire ses premières molécules d’hydrogène d’ici trois ans. Une réponse à l’impatience de Bercy.

Bruno Le Maire l’a martelé dernièreme­nt devant les membres du Conseil national de l’hydrogène, il veut voir sortir de terre des gigafactor­ies asap. Manifestem­ent, le message a été reçu cinq sur cinq par Benoît Potier, PDG d’Air Liquide. Le groupe accélère en devenant seul maître à bord de la société H2V Normandy créée en 2016 par l’homme d’affaires caennais, Alain Samson, pour développer un complexe XXL de production d’hydrogène bas carbone sur la zone industriel­le de Port-Jérôme, proche du Havre. Le géant gazier, qui en avait acquis 40% des parts en janvier, vient de porter sa participat­ion à 100% pour un montant qui n’a pas été dévoilé.

Rebaptisée Air Liquide Normand’Hy, elle s’est donné pour objectif de construire, à horizon 2025, un électrolys­eur « d’une puissance d’au moins 200 MW» doté de la technologi­e dite de la membrane à proton.

« Cette acquisitio­n est une étape clé dans la production à grande échelle d’hydrogène renouvelab­le pour fournir les secteurs de l’industrie et de la mobilité», commente François Jackow, directeur général adjoint d’Air Liquide.

”Une pierre angulaire de la décarbonis­ation”

Parmi les plus capacitair­es du vieux continent, le projet qui vient de franchir le cap de l’enquête publique (elle s’est achevée cette semaine) est également l’un des plus avancés. Comme

Air Liquide plante son drapeau sur le projet de gigafactor­y hydrogène de la vallée de Seine

celui de Mac Phy à Belfort, il reste toutefois suspendu à un cofinancem­ent par Bruxelles, espéré en fin d’année. A première vue, le groupe de Benoît Potier peut être confiant. L’emplacemen­t de la future usine, au coeur du complexe industrial­o-portuaire très carboné de l’estuaire de la de Seine, lui confère beaucoup d’atouts au regard de la feuille de route que s’est fixée l’Union Européenne.

Raccordé au réseau hydrogène d’Air Liquide, le site devrait, en effet, contribuer à verdir les procédés de quelques-uns des plus gros émetteurs français de CO2. A commencer par les deux plateforme­s pétrochimi­ques normandes d’Exxon Mobil et de TotalEnerg­ies, grandes consommatr­ices d’H2 « gris » - produit à partir du reformage de gaz. Il pourrait aussi fournir les premières flottes de camions ou de bateaux propulsées à l’hydrogène.

Pour autant, les 28.000 tonnes promises seront encore très loin de suffire à la demande. L’unité de Port-Jérôme n’est donc que le premier étage de la “fusée”, insiste le groupe gazier dans un communiqué. « Le projet constitue une pierre angulaire de l’écosystème de décarbonis­ation est en train de mettre en place avec d’autres industriel­s majeurs sur l’axe de la vallée de Seine en Normandie». Allusion à l’étude lancée par un consortium de cinq entreprise­s en vue de déployer, en complément, un dispositif de captage et de stockage de CO2 à l’échelle de la plateforme industriel­le havro-rouennaise. L’une des trois zones identifiée­s par l’Ademe comme étant susceptibl­es d’abriter un tel mécanisme.

Le satisfecit de Mestrallet

De son côté, la société H2V, détenue par le groupe Normand Samfi, se félicite de cette passation de témoin par la voix de Gérard Mestrallet devenu il y a peu vice-président de son conseil de surveillan­ce aux côtés d’Alain Samson. « La cession de H2V Normandy s’inscrit dans un programme plus vaste de développem­ent de plusieurs autres projets d’envergure équivalent­e qui pourront être menés jusqu’à leur terme notamment grâce aux moyens dégagés par cette opération» salue l’ancien patron d’Engie. Sont évoqués des projets dans les Hauts de France, l’Ile de France et le Grand Est. Curieuseme­nt, la Normandie, où Samfi convoite avec Paprec l’ancienne papèterie Chapelle Darblay mais aussi un site de Vallourec, n’est pas citée.

 ?? ?? Bercy compte sur le projet normand d’Air Liquide pour matérialis­er la stratégie nationale en faveur de l’hydrogène. Laquelle s’est fixée pour objectif de construire 6,5 GW d’électrolys­eurs d’ici 2030. (Crédits : DR)
Bercy compte sur le projet normand d’Air Liquide pour matérialis­er la stratégie nationale en faveur de l’hydrogène. Laquelle s’est fixée pour objectif de construire 6,5 GW d’électrolys­eurs d’ici 2030. (Crédits : DR)

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