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Droits voisins : Facebook signe un chèque à la presse française

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Avec cet accord, Facebook et une partie de la presse française vont ouvrir une nouvelle relation. Après des années de négociatio­n, le géant s’est accordé avec les éditeurs pour rémunérer les “droits voisins”. Une participat­ion directe dans l’économie du secteur, après une première incursion il y a cinq ans. Mais cette fois-ci, Facebook devient hôte des contenus via son service “Facebook News”.

Près d’un an après un premier accord noué entre le géant

Google et la presse française visant à rémunérer l’utilisatio­n de leurs articles sur les services du géant américain, c’est au tour de Facebook d’officialis­er ce jeudi une compensati­on. Comme pour Google, la firme de Mark Zuckerberg s’est vue contrainte par une directive européenne sur les “droits voisins” du droit d’auteur de 2019. Tandis que Google et 300 titres de l’Alliance de la presse d’informatio­n générale (APIG - dont La Tribune fait partie) avaient négocié aux forceps un accord-cadre de 76 millions de dollars, le montant avec Facebook - dont la réputation est bousculée sur d’autres fronts - n’est pas précisé.

Facebook, dont le modèle économique repose comme Google sur la publicité ciblée auprès d’annonceurs en échange de services gratuits aux utilisateu­rs, cherche surtout à anticiper les représaill­es de l’Autorité de la concurrenc­e.

Aussi, le géant, dont la valorisati­on a atteint 1 trillion de dollars cet été, imite la stratégie de Google (toujours en négociatio­n avec l’APIG suite à une condamnati­on de l’Autorité de la concurrenc­e) en développan­t un nouvel espace de publicatio­n des articles de presse, contre cette rémunérati­on. Tout l’intérêt pour lui étant de garder la maîtrise des données des consommate­urs de ces contenus, à la source de ses revenus qui ont culminé à 70,7 milliards de dollars en 2020, pour un bénéfice net boosté par les confinemen­ts du Covid-19 en hausse de 58%.

Dans ses termes, cet “accord de licence” permettra donc aux éditeurs de presse qui le souhaitent d’alimenter le fil “Facebook News” censé être lancé en France en janvier prochain. Le service est déjà opérationn­el aux Etats-Unis et au Royaume-Uni.

Droits voisins : Facebook signe un chèque à la presse française

”Nous sommes heureux d’avoir conclu un accord de licences pour les droits voisins. Cela signifie que les utilisateu­rs de Facebook pourront continuer à partager librement des actualités au sein de leurs communauté­s, tout en garantissa­nt la protection des droits voisins de nos partenaire­s éditeurs”, écrit Jesper Doub, directeur des partenaria­ts avec les médias d’informatio­n en Europe, dans un billet publié sur un blog de Facebook.

Négocié pendant deux ans, il fixe un “cadre” qui “tient compte de la manière dont les contenus de presse sont publiés et partagés sur Facebook, que ce soit par les utilisateu­rs, ou sous le contrôle des éditeurs”, est-il précisé par la firme.

”Des revenus pérennes” pour la presse

Cet accord-cadre d’une durée renouvelab­le de trois ans “crée une nouvelle catégorie de revenus pérennes” pour la presse, autres que ceux liés à sa diffusion papier, en ligne ou aux abonnement­s, s’est félicité auprès de l’AFP Pierre Louette, président de l’APIG et PDG du Groupe Les Echos-Le Parisien.

Il intègre la signature à terme d’accords individuel­s entre Facebook et les éditeurs membres de l’APIG. “C’est un accord de solidarité, concernant près de 300 éditeurs, avec un niveau minimum de rémunérati­on pour les plus petits”, a expliqué Pierre Louette.

Les groupes Le Monde et Le Figaro ont pour leur part négocié des accords directemen­t avec Facebook, comme ils l’avaient fait auparavant avec Google (ainsi que Libération et l’Express).

Mais les revenus, les montants et la méthode de calcul de ces accords restent secrets.

Pour ce qui concerne les autres familles de presse, le directeur général de Facebook France Laurent Solly a indiqué dans une interview au Figaro continuer ”à avoir des discussion­s constructi­ves avec d’autres éditeurs”.

Un risque de dépendance accepté

”Nous reconnaiss­ons la valeur que nous apportent les médias, mais nous en leur apportons aussi, par exemple en terme d’audience. En 2020, le fil d’actualité a généré dans le monde 180 milliards de clics renvoyant vers les sites des éditeurs, ce qui représente 9 milliards de dollars de recettes publicitai­res pour la presse”, a-t-il fait valoir.

Du reste, ce n’est pas la première incursion directe de Facebook dans le bilan es éditeurs de presse. En 2016, le géant avait investi plusieurs millions d’euros, selon Mediapart, auprès de plusieurs médias TV et presse afin d’attirer sur sa plateforme des contenus vidéos d’informatio­ns. Face aux critiques d’offrir un espace au “fake news”, tout l’enjeu de l’algorithme de Facebook est en effet d’attirer des contenus de qualité et vérifié et de maintenir ses taux d’engagement­s.

Les négociatio­ns ont été compliquée­s, certains profession­nels ont dénoncé un risque de dépendance aux géants américains. D’autant que contrairem­ent à la presse qui fait même face actuelleme­nt à des pénuries de papier sur son modèle historique de diffusion, Facebook et consorts ont, eux, engrangé des revenus records pendant la crise sanitaire.

De son côté, Google été condamné par l’Autorité de la concurrenc­e à 500 millions d’euros d’amende et à reprendre les négociatio­ns avec les éditeurs, pour leur proposer une nouvelle offre de rémunérati­on.

(Avec agences)

 ?? ?? “C’est un accord de solidarité, concernant près de 300 éditeurs, avec un niveau minimum de rémunérati­on pour les plus petits”, a expliqué Pierre Louette, président de l’APIG et PDG du Groupe Les Echos-Le Parisien. (Crédits : Dado Ruvic)
“C’est un accord de solidarité, concernant près de 300 éditeurs, avec un niveau minimum de rémunérati­on pour les plus petits”, a expliqué Pierre Louette, président de l’APIG et PDG du Groupe Les Echos-Le Parisien. (Crédits : Dado Ruvic)

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