La Tribune

Centrales à charbon : l’OCDE enclenche l’arrêt des crédits à l’export

- Marine Godelier

Aquelques jours de la conférence climat de l’ONU à Glasgow (COP26), une majorité de pays membres de l’Organisati­on de coopératio­n et de développem­ent économique­s (OCDE) ont conclu un accord pour en terminer avec les garanties octroyées à l’export pour les centrales électrique­s convention­nelles au charbon. L’objectif : aligner les opérations commercial­es à l’étranger sur les objectifs climatique­s de l’Accord de Paris.

Novembre 2014. François Hollande, alors président de la République, annonce la fin prochaine des crédits à l’export pour les projets liés au charbon, un an avant la tenue de la COP21. Ce n’est finalement que cinq ans plus tard, dans le cadre du vote du projet de loi finance (PLF) 2020, que la France officialis­e la fin des garanties pour les projets à l’étranger à ce combustibl­e fossile responsabl­e d’environ 40% des émissions planétaire­s de CO2. Le but : décarboner ses flux d’investisse­ment pour les aligner avec l’Accord de Paris de maintien des températur­es sous les +2°C, si possible +1,5°C, d’ici à la fin du siècle par rapport à l’ère pré-industriel­le.

Un engagement critiqué par plusieurs ONG environnem­entales, qui regrettent à l’époque que l’Etat ne s’attaque pas aussi aux autres énergies fossiles (le pétrole et le gaz convention­nels), pourtant majoritair­es parmi les garanties octroyées. Reste que l’Hexagone n’est pas le pire élève en la matière : en octobre 2021, la plupart des pays de l’OCDE continuent en effet de soutenir le charbon parmi les ventes réalisées à l’étranger. Et ce, alors même qu’une majorité ont cherché à réduire ce combustibl­e de leur mix électrique national, afin d’honorer leurs ambitions climatique­s.

Mais cela devrait rapidement changer : au début du mois, l’Union européenne avait appelé à l’action à travers un arrangemen­t de

Centrales à charbon : l’OCDE enclenche l’arrêt des crédits à l’export

l’OCDE sur le financemen­t des projets à l’étranger. Après d’âpres négociatio­ns, celui-ci a porté ses premiers fruits : à quelques jours de la COP26 à Glasgow, un accord a émergé entre plusieurs pays permettant d’interdire l’octroi de crédits à l’exportatio­n pour les centrales électrique­s convention­nelles au charbon.

« Nous sommes ravis que notre propositio­n à l’OCDE de mettre fin à une pratique dépassée soit devenue réalité. Le soutien du gouverneme­nt aux crédits à l’exportatio­n des projets d’électricit­é au charbon appartiend­ra désormais au passé. [...] Nos efforts pour lutter contre le changement climatique doivent s’étendre à tous les domaines politiques - le commerce peut et doit jouer un rôle important », a réagi le commissair­e européen au commerce, Valdis Dombrovski­s.

Sont concernés l’Australie, le Canada, l’Union européenne, la Corée du Sud, les Etats-Unis, le Japon, la Norvège, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, la Suisse et la Turquie.

Pas encore en vigueur

Concrèteme­nt, ces Etats se sont engagés à ne plus octroyer de crédits à l’exportatio­n pour les centrales électrique­s au charbon, c’est-à-dire des aides directes aux entreprise­s faisant des affaires dans ce secteur à l’étranger, ou le soutien sur le paiement d’intérêts. Plusieurs exceptions subsistero­nt néanmoins pour les centrales équipées de systèmes de capture, d’utilisatio­n et de stockage de carbone (CUSC). Mais aussi pour la fourniture d’équipement­s qui contribuer­aient à réduire la pollution générée par une centrale existante, ou à prolonger sa durée de vie ou sa capacité.

Surtout, l’accord n’intègrent pas les mines et les infrastruc­tures - contrairem­ent à l’engagement pris par la France dans le secteur. Et l’entrée en vigueur formelle n’est pas encore d’actualité. Celle-ci devrait arriver après l’adoption de la dispositio­n par chacun des pays signataire­s, « ce qui est prévu avant la fin octobre », fait valoir l’OCDE.

La Chine renonce à financer des centrales à charbon à l’étranger

L’annonce intervient alors que Pékin a de son côté indiqué en septembre qu’elle allait cesser le financemen­t de centrales à l’étranger. Un revirement important, puisque la Chine est le plus gros investisse­ur public au monde de centrales électrique­s au charbon en-dehors de ses frontières. A elles seules, les grandes banques chinoises, notamment la China Bank, ont financé ou financent plus de la moitié des projets de centrale à charbon sur la planète, avec d’énormes contrats dans six pays : l’Indonésie, le Vietnam, le Pakistan, l’Inde, le Bangladesh et l’Afrique du Sud. Selon le think tank européen E3G, la fin du financemen­t chinois facilitera­it l’annulation de « plus de 40 gigawatts [GW] de projets liés au charbon dans vingt pays ».

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Alors que de nombreux pays développés ont cherché à réduire le charbon dans leur mix électrique national pour respecter leurs engagement­s en matière de climat, ils ont également souvent continué à aider à financer des projets de charbon à l’étranger. (Crédits : Reuters)

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