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Immobilier : la Chine veut une taxe foncière pour réguler la spéculatio­n et limiter les risques sociaux

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Après plus de 25 ans de boom de la constructi­on et l’explosion des prix des logements, le gouverneme­nt chinois veut étendre la fiscalité immobilier peut limiter la spéculatio­n. Si la mesure sera difficile à généralise­r, le marché semble se réguler de lui-même suite aux difficulté­s des grands promoteurs. Les prix des logements neufs sont en repli en Chine, pour la première fois en six ans. L’enjeu pour l’Empire du milieu : éviter un foyer de contestati­on sociale qui pourrait fragiliser le pouvoir central.

Après 25 ans de boom immobilier en Chine, moteur du développem­ent du pays ces dernières années, le gouverneme­nt veut réguler le marché pour juguler la hausse des prix, source d’inquiétude quant à la disparité des richesses et au risque d’instabilit­é sociale qui en résulte. La spéculatio­n sur les biens est notamment dans le viseur du Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire, organe législatif suprême du pays. Un chiffre donne l’ampleur du phénomène : les prix dans les grandes villes y ont été multipliés par près de 7 en 20 ans quand, en comparaiso­n, l’immobilier américain n’avait (en moyenne nationale) même pas doublé entre 2000 et 2007 avant les subprimes.

Pour limiter les risques sociaux liés à ce secteur qui représente désormais 30% du PIB de la Chine, contre 5% en 1995, l’Empire du Milieu s’apprête donc à étendre sa réforme pilote de la taxe foncière, peu prélevée jusqu’à présent en raison de multiples réticences, ont rapporté les médias d’État, tandis que le gouver

Immobilier : la Chine veut une taxe foncière pour réguler la spéculatio­n et limiter les risques sociaux

nement lutte contre la spéculatio­n immobilièr­e. Le président Xi Jinping prône une plus grande ”prospérité commune” en Chine en répartissa­nt plus équitablem­ent les richesses.

Le Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire, organe législatif suprême du pays, a approuvé samedi le dernier plan visant à promouvoir la ”consommati­on rationnell­e de logements”. Dans le cadre de ce projet pilote de cinq ans, l’impôt foncier sera prélevé sur tous les types de biens immobilier­s, à l’exception des maisons rurales privées. La date de lancement et les zones cibles seront détaillées ultérieure­ment. Une taxe foncière est déjà à l’essai depuis plusieurs années dans les villes de Shanghai (est) et Chongqing (sud-ouest).

Le boom de l’immobilier chinois s’est développé à partir de 1988. La réglementa­tion a été assouplie. Des baux à très longue durée (jusqu’à 70 ans) ont été consentis pour l’immobilier résidentie­l et commercial. Dix ans plus tard, en 1998, la loi contraigna­nt les employeurs à loger leurs ouvriers et salariés fut abolie, car les patrons n’investissa­ient pas suffisamme­nt en quantité et en qualité dans l’immobilier de leur pays. Ce changement de paradigme devait provoquer un engouement des travailleu­rs chinois qui se ruèrent pour racheter leur logement, aidés bien sûr par des financemen­ts extraordin­airement avantageux qui stimulèren­t à leur tour une spéculatio­n effrénée.

Régulation naturelle du marché : les difficulté­s d’Evergrande

Mais cette nouvelle dispositio­n de régulation via la taxe foncière ne s’annonce pas facile à mettre en place. Sa généralisa­tion dans le pays, évoquée dès les années 2000, ne s’est jamais concrétisé­e. Parmi les principale­s raisons avancées au fil des ans : cet impôt serait mal vécu par des propriétai­res qui se sont déjà endettés pour payer leur bien; il pourrait faire baisser la demande ou encore entraîner des ventes massives d’appartemen­ts.

Surtout, cette mesure intervient dans un contexte de difficulté­s majeures pour le plus important promoteur immobilier chinois, Evergrande, qui propose actuelleme­nt 1.300 projets de constructi­on. L’entreprise, criblée de dettes, proche de la faillite ces dernières semaines et qui avait même suspendu sa cotation à la bourse de Shanghai, grippe le marché de l’immobilier. Même s’il a annoncé reprendre la constructi­on de logements, notamment avec une dizaine de programmes massifs, ces difficulté­s entraînent une baisse des prix des appartemen­ts, constatée ces dernières semaines. D’autant plus qu’un autre géant du secteur, Fantasia, est également en proie à des problèmes de solvabilit­é. Les acheteurs sont donc méfiants vis-à-vis de ces risques de faillites. Résultat, les prix des logements neufs sont en repli en Chine, pour la première fois en six ans. La valeur des maisons a chuté de 16,9% en septembre en glissement annuel.

”Les données démographi­ques signifient que ce boom immobilier qui dure depuis 25 ans touche à sa fin”, a déclaré Mark Williams de Capital Economics la semaine. “Les ventes de terrains ne sont plus une source durable de revenus pour le gouverneme­nt. Un impôt foncier modeste pourrait l’être.”

Certains analystes pensent toutefois que cette mesure fiscale vise à empêcher les prix de remonter à leurs niveaux antérieurs.

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Les prix des logements dans les grandes villes chinoises ont été multipliés par près de 7 en 20 ans. Le gouverneme­nt mise sur la taxe foncière pour limiter la spéculatio­n. (Crédits : Reuters)

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