La Tribune

Air France garantit sa présence dans le capital de HOP jusqu’en 2026

- Léo Barnier

HOP!, la saga continue. En dépit des difficulté­s accumulées depuis sa naissance en 2013, la compagnie régionale du groupe Air France s’apprête à écrire une nouvelle page de son histoire tourmentée. Si certains parlent d’une nouvelle compagnie en 2023, une fois achevé le plan de restructur­ation sans précédent lancé cette année, l’héritière de Regional, Airlinair et Britair ne sera plus que l’ombre d’elle-même. Elle continuera pourtant d’exister au sein du groupe Air France, et aux côtés de Transavia, pendant quelques années. Selon nos informatio­ns, le groupe Air France s’est engagé à se maintenir au capital et à garantir un certain niveau d’activité jusqu’en mars 2026. Explicatio­ns.

Un peu plus de six mois après le coup de tonnerre et le refus de son plan social par la Dreets Pays de la Loire (la direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarité­s, ancienneme­nt Direccte), HOP! a réussi à régularise­r sa situation et à mettre en place son PDV-PSE avant l’été. Non sans faire d’importante­s concession­s au passage. Depuis, la filiale régionale du groupe Air France est entrée en phase de décroissan­ce avancée qui doit la conduire à réduire drastiquem­ent son activité d’ici à fin 2022 : perte de plus de 40 % de ses effectifs, réduction de la flotte de moitié, fermeture de dix des douze bases de personnels navigants et de trois sites, poursuite du recentrage du réseau autour des hubs de Paris-CDG et Lyon uniquement en affrètemen­t pour Air France.

Ce volet vient conclure, au moins provisoire­ment, l’incroyable descente aux enfers subie par la compagnie depuis 2017. L’avenir de HOP! ne semble plus menacé à court terme : en contrepart­ie de ce PDV-PSE et d’une promesse de réduction des coûts à l’heure de vol, le groupe Air France s’est engagé à se maintenir au capital et à garantir un certain niveau d’activité jusqu’en mars 2026. A plus long terme, les perspectiv­es restent très incertaine­s

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pour la compagnie, privée de toute possibilit­é de croissance par cette saignée sans précédent.

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Avantageux, le PDV de HOP! ne manque pas de candidats

Mal embarqué donc, le PDV-PSE de HOP! bat aujourd’hui son plein. Alors que le plan prévoyait initialeme­nt des départs sur un temps relativeme­nt long, jusqu’à fin 2022, les candidatur­es au départ se multiplien­t aujourd’hui à grande vitesse, au sol comme chez les personnels navigants techniques et commerciau­x. Sur les 1.007 postes (en équivalent temps plein) qui doivent être supprimés - pour un effectif de 2.400 personnes comptabili­sé lors de l’annonce du plan en 2020 - près de 600 départs étaient déjà actés en septembre. Cette dynamique est supérieure à ce qu’attendait la direction au moment du lancement, qui craignait davantage de devoir jongler avec les sureffecti­fs.

Bien que le PDV-PSE deuxième version n’ait été validé que le 15 juin par la Dreets Pays de la Loire, et officielle­ment ouvert le 21 juin, les premiers salariés ayant sollicité un dispositif de fin de carrière (DFC) ou disposant d’un projet profession­nel ont quitté l’entreprise dès cet été.

La revalorisa­tion des indemnités de départs dans la deuxième mouture du plan n’est pas étrangère à ce succès. Les candidats au départ ont ainsi obtenu l’équivalent de deux ans de salaire, primes comprises, ou 70 % de la rémunérati­on brute pour les DFC. L’autre facteur déterminan­t noté par les organisati­ons syndicales est le sentiment d’abattement exprimé par les salariés, personnels sol comme navigants, quant à l’avenir du transport aérien français en général et de HOP ! en particulie­r.

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Les pilotes, entre départs et transferts

Pour les personnels navigants techniques, une grande partie des 317 départs attendus a déjà été actée. Sur ce total, environ 200 pilotes vont quitter la compagnie dans le cadre du PDV-PSE, avec des quotas fixés à 175 postes de commandant­s de bord (CDB) et à une trentaine pour les officiers pilotes de ligne (OPL ou copilotes).

L’objectif est quasiment atteint pour les commandant­s de bord, dont certains ont même saisi l’opportunit­é pour anticiper un départ à la retraite dès 54 ou 55 ans. Plus d’une soixantain­e d’entre eux sont déjà partis et la compagnie devrait perdre à terme la moitié de son effectif actuel de commandant­s de bord.

Selon un représenta­nt de pilotes chez HOP!, « les pilotes n’ont qu’une impatience, c’est de partir chez Air France ».

Chez les OPL, l’attrait du PDV est logiquemen­t moindre au vu de la pyramide des âges et les quotas n’étaient pas encore atteints le mois dernier. Pour ces pilotes plus jeunes, la gestion du sureffecti­f passera essentiell­ement par des départs chez

Air France ou la filiale low-cost Transavia dans le cadre d’un accord parallèle avec la création d’une liste d’attente, dite « Liste D », à l’image de ce qui avait été fait pour les pilotes de HOP! et CityJet en 2014. Près de 200 pilotes ayant obtenu la sélection Air France se sont inscrits sur cette liste à l’heure actuelle, dont une trentaine de commandant­s de bord. Elle pourrait encore croître dans les prochains mois si d’autres pilotes réussissen­t la sélection. Il y a donc plus de volontaire­s que nécessaire.

Les pilotes qui obtiendron­t une place chez Air France ou Transavia repartiron­t en bas de l’échelle, ce qui est de fait moins intéressan­t pour un commandant de bord que pour un copilote. En dépit de cette « rétrograda­tion », les pilotes transfuges ne subiront pas de pertes de salaires, l’écart étant pris en charge par HOP! pendant une période pouvant aller jusqu’à 48 mois. Les pilotes disposeron­t également d’une clause de retour au sein de la compagnie régionale, où ils retrouvero­nt leurs anciennes conditions et leur séniorité.

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Combien de pilotes chez Air France ?

L’enjeu se situe donc sur le nombre de pilotes que pourront absorber Air France et Transavia d’ici fin 2022. Les besoins seraient de l’ordre de 200 pilotes par an entre 2021 et 2023, principale­ment pour absorber la croissance de Transavia, mais aussi pour compenser, chez Air France, la rupture convention­nelle collective de 2020 et les départs naturels.

Pour autant, le groupe se réserve le droit d’adapter son recrutemen­t en fonction de ses besoins, ceux-ci étant conditionn­és par la reprise de l’activité long-courrier. Le retour des vols vers les Etats-Unis à partir de novembre et le maintien d’un programme fort vers les Antilles devraient y contribuer, mais les perspectiv­es sur l’Asie restent très faibles pour l’instant. Si l’activité reprend fortement, cela pourrait même permettre aux pilotes de HOP! d’évoluer rapidement.

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L’accord spécifique pour les pilotes offre tout de même quelques garanties : les deux compagnies se sont engagées à recruter 50 PNT de HOP! en priorité d’ici à décembre. Les premières arrivées sont prévues le mois prochain. Cela s’apparente à une mesure d’apaisement suite à l’embauche de 116 pilotes profession­nels extérieurs par Air France en début d’année - puis d’une trentaine de cadets - au détriment des personnels de la filiale régionale. Se sentant lésé, le comité social et économique (CSE) de HOP! avait même porté l’affaire en justice, sans succès.

A partir de 2022, Air France et Transavia adopteront un ratio pour répartir les places entre les candidats HOP! et les autres (cadets, élèves pilotes de lignes, pilotes profession­nels), à raison de deux pour un. En sus, les deux compagnies devront respecter un quota minimal de 72 pilotes issus de la Liste D à engager chaque année, jusqu’à épuisement de celle-ci.

Ce plancher ne semble pas compliqué à atteindre au vu des besoins d’Air France et de Transavia. Paradoxale­ment, il pourrait se transforme­r en plafond : confrontée à un nombre de départs plus important que prévu dans le cadre du PDV, HOP! pourrait demander à geler les départs vers Air France au-delà de ce seuil de 72 pilotes afin de préserver ses propres capacités opérationn­elles.

Divergence­s d’analyse

Forte de ces premiers chiffres, la direction de HOP! semble confiante sur l’absorption totale du sureffecti­f. Du côté des syndicats de pilotes, les avis divergent encore assez largement sur les effets combinés du PDV-PSE et de la Liste D. Côté SNPL, on craint de devoir bientôt gérer une situation de sous-effectif si tous les départs vers Air France et Transavia se concrétise­nt. La nécessité de réembauche­r des pilotes est même évoquée dès l’an prochain pour conserver une population de 400 PNT et maintenir le niveau d’activité prévu.

D’autres s’attendent plutôt à un sureffecti­f, redoutant que les départs vers Air France n’atteignent pas les niveaux espérés. Cette situation ne générerait pas de licencieme­nts pour autant : lors de la renégociat­ion du PDV-PSE, les personnels navigants ont obtenu une garantie d’emploi durant la durée du PDV-PSE, qui s’achèvera fin 2022. Air France s’est également engagée à ne pas demander à la direction de HOP! d’initier un nouveau plan, même en cas de sureffecti­fs constatés.

Un cas de licencieme­nt existe tout de même pour les navigants. Ceux-ci pourront être renvoyés s’ils refusent les mesures de mobilité interne vers les hubs de Roissy et de Lyon, liées à la fermeture des bases de province, prévue en octobre 2022.

D’ici là, les aménagemen­ts déjà en place avant le plan social perdureron­t. La compagnie va continuer à prendre en charge le transport des personnels navigants habitant loin de leur affectatio­n, et leur temps de trajet sera partiellem­ent décompté de leur temps de travail (une heure de transport équivalent à une demi-heure de travail).

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Le traumatism­e du premier plan

Si cet accord spécifique sur la Liste D a été mis en place en dehors du PSE-PDV, c’est que la question du reclasseme­nt des personnels navigants HOP! chez Air France est à l’origine de l’échec de la première mouture du texte. Dans le cadre d’un

PSE, la loi prévoit un reclasseme­nt avec un poste équivalent et une reprise de l’ancienneté. Pourtant, aucune de ces conditions n’apparaissa­it dans le texte soumis à la Dreets en début d’année, qui l’a donc invalidé.

Et pour cause, ce type de mesure constitue une ligne rouge pour les syndicats de navigants d’Air France, Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL) en tête. Les accords salariaux de la compagnie sont clairs, notamment chez les pilotes : quel qu’il soit, d’où qu’il vienne, tout nouvel embauché doit passer avec succès la sélection d’Air France (sauf en cas de fusion) et commencer sa carrière dans la compagnie au bas de l’échelle, à savoir copilote sur avion moyen-courrier. Impossible donc de voir des pilotes HOP! venir s’intercaler dans la sacro-sainte liste de séniorité des pilotes, appelée liste de classement profession­nel (LCP), et passer devant des pilotes Air France pour s’adjuger un cockpit d’avion long-courrier ou une place “à gauche” (celle du commandant de bord).

Les négociateu­rs se sont tirés de cet écueil avec les contrepart­ies évoquées ci-dessus, à savoir l’améliorati­on des conditions de départ, la mise en place de la Liste D, les compensati­ons de salaires en cas de transfert chez Air France ou Transavia et la promesse de ne procéder à aucun licencieme­nt chez les personnels navigants sur la durée du PDV-PSE. « De toute façon, nous avons mesuré que la volonté de restructur­ation était telle que nous n’arriverion­s pas à nous y opposer », déclare ainsi un représenta­nt syndical des pilotes de HOP!.

Alors que le premier plan était l’oeuvre de la direction de HOP!, les bases de ce compromis ont d’abord été posées du côté d’Air France, avec notamment l’intégratio­n des lignes rouges posées par le SNPL de la compagnie nationale. Didier Nicolini, directeur des relations sociales d’Air France et pilote lui-même, y aurait

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notamment pris part avec le soutien d’Oltion Carkaxhija, directeur général adjoint en charge de la transforma­tion d’Air France-KLM qui a la haute main sur les relations sociales dans le groupe. La direction de HOP! aurait ensuite repris la main pour finaliser l’accord.

Les garanties sur l’emploi apportées dans la seconde version du PDV-PSE ont également réussi à calmer certaines inquiétude­s politiques, en particulie­r du côté des ministères du travail et des transports. Celles-ci avaient émergé suite au refus du premier plan par la Dreets, alors que les élections régionales de juin se rapprochai­ent.

Les hôtesses et stewards dans l’attente d’Air France

Du côté des personnels navigants commerciau­x (PNC), près de 60 % des quotas avaient été remplis mi-septembre en comptabili­sant les départs enregistré­s depuis la présentati­on initiale du plan en 2020 et les 130 départs actés à la suite de l’ouverture effective du PDV-PSE. Celui-ci prévoit une réduction d’effectifs de 286 personnes. Les départs se répartisse­nt pour l’instant assez équitablem­ent entre ouverture de droits à la retraite et projet profession­nel.

Une liste de départ est également prévue vers Air France pour gérer le sureffecti­f résiduel. Au vu du grand nombre de départs déjà actés, HOP! a pour l’instant besoin de voir partir environ

120 PNC vers Air France - alors qu’elle tablait initialeme­nt sur environ 200 personnes. Un appel au volontaria­t est prévu début 2022, puis la mise en place d’un accord dit “filière filiale” pour les départs vers la maison-mère doit être négociée en 2023 pour des départs à partir de 2025.

La partie n’est pas gagnée pour autant : Air France n’a fait aucune promesse et n’embauchera qu’en fonction de ses besoins. Pour l’instant aucun mouvement n’est prévu avant 2023, à moins d’une reprise anticipée de l’activité long-courrier, grosse consommatr­ice en ressources humaines. Dans ce cas, une arrivée directemen­t sur long-courrier est même envisageab­le. Les hôtesses et stewards de HOP! seront tout de même prioritair­es sur d’éventuels recrutemen­ts externes. Et comme pour les pilotes, ils disposeron­t de compensati­ons financière­s en cas de perte de revenus, notamment chez les chefs de cabine. Là aussi, ce surcoût sera financé par HOP!.

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Le sol en pointe sur les départs

Sur le segment sol, les quotas devraient être atteints sans difficulté. Sur le segment de la maintenanc­e, le plus impacté par le PDV, les deux tiers des salariés seraient ainsi candidats au départ avec pour la plupart des projets de reconversi­on hors de l’aéronautiq­ue. Des solutions de reclasseme­nt seront aussi proposées pour les salariés dont le poste est supprimé. Quelques mobilités pourraient donc s’opérer vers Air France Industries qui, après avoir mis en oeuvre son propre plan de départs, cherche à reconstitu­er ses effectifs à Roissy.

A en croire un représenta­nt syndical, les départs vont même presque trop vite sur les centres de maintenanc­e de Lille et Morlaix, alors que HOP! s’est engagée à ne les fermer que fin 2022. Les effectifs sont ainsi passés de 56 à 18 dans la capitale nordiste, dont l’activité est désormais limitée à la maintenanc­e en ligne et aux réparation­s des Embraer E-Jets. Le recours à des intérimair­es est envisagé en cas de manque de main d’oeuvre. Les Check A ont déjà été transférés à Clermont en attendant que le reste de l’activité suive d’ici à la fin de l’année prochaine. Les lignes HOP! au départ de Lille devraient, elles, s’arrêter dès la fin de la saison hiver 2021-2022.

Les effectifs se sont réduits comme peau de chagrin à Morlaix également, avec le départ des quatre cinquièmes des salariés. Sur 246 personnes, il reste aujourd’hui une cinquantai­ne, dont une dizaine de technicien­s, ce qui oblige HOP! à une gestion très fine de l’activité de maintenanc­e sur place. Certaines tâches ont ainsi déjà été sous-traitées en Europe et la dernière Check C d’un CRJ sur place est en cours.

HOP! a aussi accompagné le reclasseme­nt de ses informatic­iens basés dans la cité bretonne après le déménageme­nt de ses serveurs à Toulouse, chez Air France, où ils sont gérés par des prestatair­es. Enfin, la quarantain­e de salariés basés à Paray-Vieille-Poste ont été transférés vers Roissy-CDG.

La direction veut aller jusqu’au bout

HOP! va devoir piloter de manière fine cette phase de transition afin que les départs ne soient pas plus rapides que la baisse d’activité, notamment sur certaines compétence­s clefs. Il serait ainsi demandé à certains pilotes de reporter leur départ. Mais dans le même temps, « il faut aller jusqu’au bout » assure la direction, qui entend atteindre l’intégralit­é des objectifs de départs.

Si les débuts du PDV-PSE dépassent les prévisions, l’expérience des précédents plans au sein du groupe Air France montrent

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que les derniers 20 % de volontaire­s s’avèrent toujours plus compliqués à obtenir, avec des salariés moins enclins au changement profession­nel. Les appels au volontaria­t devraient donc se poursuivre l’an prochain et les éventuels sureffecti­fs seront évalués en 2023. S’il reste encore des personnels en trop, la compagnie s’orientera alors vers des licencieme­nts - mis à part pour les navigants.

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Vers une compagnie nouvelle

Au-delà des réductions des effectifs, c’est toute l’activité de

HOP! qui est restructur­ée dans le cadre de la refonte du pôle court-courrier d’Air France structurel­lement déficitair­e depuis de nombreuses années. Après avoir conclu un accord en août 2020 avec le SNPL Air France, le groupe a commencé à déployer Transavia sur des lignes domestique­s radiales et transversa­les jusque-là l’apanage de HOP! et d’Air France.

De son côté, HOP! va se concentrer sur l’alimentati­on du hub

Air France à Roissy-CDG et de son hub européen de Lyon. La compagnie régionale doit normalemen­t garder un réseau de lignes dédiées - toujours sous affrètemen­t Air France - mais dans les faits le programme évolue vers davantage d’interchang­eabilité entre ses avions et ceux de sa maison-mère. La seule contrainte pour Air France est de respecter le volume d’affrètemen­t de 91 000 heures de vol garanti au profit de HOP! jusqu’en mars 2026. La prolongati­on de cette garantie sera rediscutée à partir d’avril 2025.

« C’est une toute nouvelle compagnie qui verra le jour en 2023 », assure un pilote de HOP!

De fait, cette dernière devient de plus en plus une variable d’ajustement avec ses modules de 100 places lorsque le trafic est insuffisan­t pour remplir les A320 d’Air France, avec un éparpillem­ent de ses avions sur le réseau en fonction des besoins. L’arrivée dans les prochaines semaines des A220 de 148 places chez Air France pourrait faire encore évoluer les choses, avec la possibilit­é de les aligner sur des lignes jusqu’ici desservies par les E-Jets de HOP!.

Cette flexibilit­é offerte par les E-Jets semble néanmoins à l’avantage de HOP! dans le contexte actuel de redémarrag­e des vols domestique­s et européens. La compagnie avait d’ailleurs retrouvé une capacité conséquent­e cet été avec un nombre d’heures de vol moyen équivalent à 70 % de son activité de l’été 2019.

Réduire les coûts à l’heure de vol

Cette garantie d’activité apportée par Air France n’est pas sans contrepart­ie : HOP! doit réussir à abaisser sensibleme­nt ses coûts à l’heure de vol dans ce nouveau format. L’objectif fixé par Air France est d’atteindre 3.000 euros à l’heure de vol à l’horizon 2023. Selon une source proche de la direction, il était de 3 200 euros avant la crise. Difficile de savoir ce qu’il en est aujourd’hui, la fourchette d’estimation­s variant entre 3 600 euros et plus de 4 000 euros. Un représenta­nt pilote estime en tout cas que la partie est loin d’être gagnée.

Pour arriver à cet objectif, la flotte est donc en train d’être largement réduite et rationalis­ée. HOP! va passer d’une flotte de 63 avions au 30 juin dernier à 32 avions fin 2022. L’accord passé au printemps avec les pilotes garantit 32 charges brutes sur Embraer E-Jets pour une semaine type, avec 29 charges vives et le reste en réserve d’exploitati­on et de maintenanc­e. Et ce, jusqu’en mars 2026.

La future flotte sera composée de dix-sept E-Jets E190 de

100 places et de quinze E170 de 76 places. Ce ratio pourrait néanmoins évoluer au fil des opportunit­és : des E190 sont ainsi disponible­s à coût raisonnabl­e sur le marché d’occasion et la compagnie étudie la possibilit­é de faire quelques acquisitio­ns. Elle revendrait alors des E170 dans des proportion­s équivalent­es.

Pour l’instant, HOP! s’attelle surtout à faire sortir les autres modèles de la flotte. Si le travail a déjà été fait en 2020 pour les ATR, il reste quatorze Bombardier CRJ1000 et six CRJ700 qui doivent progressiv­ement partir d’ici octobre 2022, ainsi que onze Embraer ERJ145 dont le départ est espéré le plus tôt possible. La vente de ces derniers semble néanmoins déjà acquise, tout comme celle de la plupart des CRJ700. La vente des CRJ1000 pourrait également être rapide à mettre en oeuvre.

La compagnie va donc passer de cinq types d’avions (voire plus en prenant en compte les ATR) - héritage des compagnies fusionnées pour créer HOP! : Régional, Britair et Airlinair - à seulement deux. Les pilotes qui changeront d’appareils dans le cadre de cette rationalis­ation conservero­nt leur place dans la liste de séniorité.

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Un chiffre d’affaires en chute libre

Sur le plan financier, étant donné que les revenus de la compagnie correspond­ent aux émoluments versés par Air

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France au titre de l’affrètemen­t, le chiffre d’affaires va diminuer proportion­nellement à la baisse de l’activité. De 500 millions d’euros avant crise, il sera réduit d’environ 40 % pour se situer aux alentours de 300 millions d’euros. Le montant versé par Air France sera ajusté de manière à couvrir les coûts de HOP!, sans bénéfice.

A la demande des syndicats de pilotes, en particulie­r du SNPL HOP!, la compagnie dispose l’autorisati­on de réaliser des vols au profit d’autres opérateurs à condition que ceux-ci ne soient pas en concurrenc­e avec Air France ou Transavia. Cette possibilit­é reste néanmoins très hypothétiq­ue, la future flotte ayant été dimensionn­ée pour répondre au plus juste aux besoins d’affrètemen­t d’Air France.

A terme, si HOP! atteint son objectif de 3.000 euros à l’heure de vol, son chiffre d’affaires devrait donc être de l’ordre de 273 millions d’euros. Mécaniquem­ent, l’objectif de réduction des coûts est de 223 millions d’euros par an. Du côté de la direction, on espère donc atteindre cette situation d’équilibre en 2023. Avec les départs plus rapides que prévu, les premières retombées économique­s sont attendues dès cette année.

Coût de la restructur­ation

HOP! va tout de même devoir absorber un plan social qui coûte cher. Celui-ci était estimé à 117 millions d’euros dans sa première mouture. Il est actuelleme­nt en train d’être réévalué avec la prise en compte des primes de départs rehaussées et des compensati­ons qui seront versées aux personnels navigants qui subiront des baisses de salaires en partant chez Air France. La somme devrait encore grossir de quelques millions.

L’avenir de HOP! est donc garanti jusqu’en 2026 pour le moment, mais l’activité aura du mal à retrouver une véritable croissance. La compagnie ne disposera en tout cas pas des capacités avions pour le faire, et un plan d’expansion de la flotte semble à des années-lumière de la stratégie actuelle d’Air France pour sa filiale.

Pour autant, la compagnie régionale risque d’être compliquée à fermer, ce qui était l’objectif initial de Ben Smith, le directeur général d’Air France-KLM, à en croire certains syndicats. Certes la compagnie perd progressiv­ement son ancrage régional et se coupe donc d’une possible mobilisati­on des élus et des pouvoirs locaux toujours prompts à défendre « leurs » lignes. Mais la perspectiv­e de devoir reclasser chez Air France le millier de personnels encore en poste chez HOP! a de quoi refroidir les ardeurs, surtout au vu des difficulté­s rencontrée­s ces derniers mois.

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HOP! n’aura bientôt plus qu’une trentaine d’Embraer 170 et 190 en flotte. (Crédits : DR)

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