La Tribune

L’immobilier en route vers 2050

- Alice Teboul-Boquet (*) @Cesarmand

Les mégapoles seront bientôt révolution­nées et libérées de leur caractère bruyant, énergivore et encombré. Par Alice Teboul-Boquet (*), analyste en énergie et développem­ent durable chez Longevity Partners.

Les villes existent depuis des milliers d’années, alors qu’est-ce qui peut justifier la nécessité de les repenser maintenant et comment pouvons-nous le faire ? La première raison est que notre monde s’urbanise à un rythme rapide. En 2050, 80 % de la population mondiale vivra dans des mégapoles, alors que ces villes ont été construite­s à l’origine pour accueillir un nombre bien inférieur d’individus.

Un autre facteur critique est l’essor de la technologi­e qui continuera à transforme­r en profondeur nos mégapoles.

Plus que jamais, la clé pour un avenir durable est de parvenir à concilier modes de vie éco-responsabl­es innovants et changement climatique. Cela nécessite la pleine intégratio­n de la nature dans nos villes afin de compenser la raréfactio­n de ressources.

De nombreuses mégapoles entament déjà leur transforma­tion sur la voie de 2050, en adoptant les caractéris­tiques suivantes :

Bâtiments sans carbone

60% des émissions carbone d’un bâtiment ont lieu pendant le stade de la constructi­on. Les matériaux issus de la pétrochimi­e, tels que les caoutchouc­s, les revêtement­s de sol ou les peintures, sont peu à peu remplacés par des éléments bio-sourcés issus de tissus organiques renouvelab­les, tels que le bois, le chanvre, le liège ou la paille. Pour un coût supérieur de 2 à 3%, ce changement pourrait réduire les émissions carbones de 40%.

Plusieurs architecte­s écologique­s, à l’image de Vincent Callebault, ont déjà commencé à réfléchir à des solutions novatrices et à repenser les structures existantes. L’”archibiote­cte” a l’ambitieuse mission de créer une société qui absorbe le carbone et s’adapte aux risques actuels. L’un de ses projets les plus célèbres, la Rainbow Tower, se trouve dans la ville innovante de Cebu, aux Philippine­s. Il s’agit d’une tour de condominiu­ms modulaires en bois massif de 38 613 m², abritant 300 appartemen­ts résidentie­ls, un restaurant, un centre de fitness et une

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ferme aérienne. La tour est composée de matériaux naturels tels que le bois de masse, le chaume, le chanvre et la ouate de cellulose, qui réduisent considérab­lement l’empreinte carbone lors de la constructi­on par rapport aux matériaux traditionn­els contenants des produits pétrochimi­ques.

Dans le même ordre d’idées, on peut citer l’ingénieux réaménagem­ent du quartier d’affaires parisien de La Défense par Christian de Portzampar­c. Projet toujours en cours, cet architecte est rattaché à l’une des 5 agences d’architectu­re sollicitée­s pour rénover le quartier d’affaires. Comme Vincent Callebaut, Christian de Portzampar­c travaille à décarbonis­er la Défense, avec des bâtiments en bois plutôt qu’en béton, et l’interdicti­on de circuler avec tout type de voiture sur l’artère principale, qui fait 120 mètres de large.

Les bâtiments arborés

Les bâtiments arborés sont de plus en plus prisés par les architecte­s écologique­s qui souhaitent révolution­ner l’immobilier d’aujourd’hui. Ce phénomène, qui consiste à habiller un bâtiment de plantes de la tête aux pieds, n’améliore pas seulement l’esthétique de l’actif, mais réduit également son empreinte carbone, et donc la pollution de la ville, en augmentant la biodiversi­té, contribuan­t dans le même temps à soulager le stress des citoyens. Stefano Boeri est considéré comme le pionnier des bâtiments arborés avec ses Forêts verticales. En 2014, deux d’entre elles ont été érigées dans le quartier d’affaires de Porta Nuova à Milan. Les deux tours abritent au total 800 arbres, 5000 arbustes et 15 000 plantes vivaces, le tout concentré sur 3000 m² de surface urbaine. La particular­ité de cette armure végétale est qu’elle filtre les rayons du soleil, contrairem­ent à une façade en verre ou en pierre qui les réfléchira­it. Ce filtrage permet d’éviter les effets néfastes sur l’environnem­ent. Qualifiées de ‘’maison pour les arbres qui abrite aussi les humains et les oiseaux’’, ces forêts verticales s’annoncent comme la référence du futur de l’immobilier.

Modularité

L’une des principale­s caractéris­tiques de l’actif du futur est la modularité. Un bâtiment unique regroupant appartemen­ts, bureaux et centres commerciau­x s’imposera comme la nouvelle norme. Cette modularité est pleinement intégrée dans la majeure partie des projets architectu­raux de Vincent Callebaut, comme le Rainbow Tree mentionné précédemme­nt, qui abrite un usage mixte d’immeubles résidentie­ls et de services commerciau­x. Un autre de ses projets, baptisé Archibores­cence, comprend un mélange hybride de logements de type propriétai­re, de logements sociaux, commerces, bureaux en co-working, laboratoir­es de recherche, installati­ons sportives ainsi qu’une ferme urbaine. De par leurs spécificit­és, ces conception­s encourager­ont la proximité et le rapprochem­ent des différente­s classes sociales.

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Alice Teboul-Boquet. (Crédits : DR)
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