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Allemagne : la pénurie de matières premières fait caler la reprise post-Covid

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Le gouverneme­nt de la chancelièr­e Angela Merkel, en fin de mandat, abaisse ses prévisions de croissance de 0,9% pour l’année 2021, qui devrait atteindre 2,6%. Les pénuries de matières premières et la hausse de leurs coûts grippent la machine industriel­le allemande alors que les carnets de commandes sont pleins, notamment dans l’automobile. Si les citoyens allemands continuent pour le moment de soutenir la demande, l’inflation et les menaces sur l’emploi pourraient les pousser à épargner.

La croissance allemande post-Covid cale. L’économie outre-Rhin, traditionn­ellement tirée par sa puissance industriel­le et sa force exportatri­ce, devrait être moins robuste que prévue en 2021. La hausse du PIB devrait être de 2,6% de son PIB en 2021, une reprise post-pandémie nettement moins forte qu’attendue en raison des perturbati­ons des chaînes d’approvisio­nnement mondiales, a indiqué mercredi le ministre de l’Economie Peter

Altmaier. C’est 0,9% de moins que les prévisions communiqué­es par le gouverneme­nt au printemps dernier.

Au dernier trimestre, ”l’économie allemande ne devrait pas faire mieux que stagner”, prévoit Andrew Kenningham, économiste chez Capital Economics. ”Avec le risque évident qu’elle ne retrouve pas son niveau d’avant la crise (du Covid) cette année”, avertit Carsten Brzeski, analyste chez ING.

Flambée des prix de l’énergie

Selon le ministre allemand, le faible dynamisme s’explique par de nombreux biens et marchandis­es qui n’ont pas été livrés ”parce qu’il y a des pénuries de matières premières”, a-t-il indiqué sur la chaîne ZDF. Il compte toutefois sur un fort rebond de la croissance en 2022 ”à plus de 4%”.

Les carnets de commandes des fabricants de voitures ou de machines-outils sont pourtant pleins mais les chaînes

Allemagne : la pénurie de matières premières fait caler la reprise post-Covid

de production tournent au ralenti, ou sont contrainte­s à l’arrêt, tandis que la hausse du prix du bois, des plastiques, des métaux, du gaz alourdit la facture.

En septembre, les industriel­s allemands ont ainsi vu leurs coûts grimper de 14,2% sur un an. Ils n’avaient pas connu une telle hausse depuis octobre 1974, c’est‑à‑dire à la suite du premier choc pétrolier.

La production industriel­le a plongé de 4% en août sur un mois. L’indice manufactur­ier allemand recule depuis le mois d’avril. Les exportatio­ns, qui n’avaient cessé de se redresser depuis la première vague de Covid‑19, ont pour leur part fléchi de 1,2%. Résultat, le moral des entreprene­urs allemands a reculé en octobre pour le quatrième mois d’affilée.

Le consommate­ur prompt à consommer

Toutefois, les consommate­urs allemands pourraient être un relai de croissance non négligeabl­e. Le moral des consommate­urs allemands, avides de dépenser, devrait encore s’améliorer en novembre, malgré la montée en flèche de l’inflation, selon le baromètre GFK publié mercredi. L’institut prévoit un indice à 0,9 point en novembre, soit une hausse de 0,5 point sur un mois, selon ce sondage réalisé auprès de 2.000 personnes. ”Avec cette deuxième augmentati­on consécutiv­e, le moral des consommate­urs défie la hausse de l’inflation”, note Rolf Bürkl, spécialist­e des questions de consommati­on au GfK. L’indice mesurant la propension à acheter des consommate­urs allemands a également grimpé de 6 points à 19,4 points en octobre, son plus haut en dix mois.

”Les Allemands s’attendent apparemmen­t à de nouvelles augmentati­ons de prix et estiment judicieux d’avancer les achats afin d’éviter des prix encore plus élevés”, poursuit Rolf Bürkl.

L’inflation en Allemagne continue en effet de grimper. La hausse des prix à la consommati­on a atteint 4,1% sur un an le mois dernier, tirée notamment par une vive tension sur les prix de l’énergie - un niveau jamais vu depuis décembre 1993. La pénurie de matières premières participe à l’inflation. ”Si la tendance à la hausse des prix devait persister, cela mettrait cependant à mal le climat de consommati­on et une reprise fondamenta­le serait probableme­nt encore retardée”, nuance M. Bürkl.

Au delà d’une baisse du pouvoir d’achat, ”les consommate­urs craignent une baisse de revenu en raison du chômage partiel si des entreprise­s doivent réduire leur production en raison des difficulté­s d’approvisio­nnement.”

Nombreux défis pour la future coalition

Ces défis liés à la conjonctur­e économique seront l’un des challenges à relever pour le nouveau gouverneme­nt, après la fin de mandat d’Angela Merkel. La coalition “feu tricolore”, couleurs du SPD, des Verts et des libéraux du FDP, ont annoncé mi-octobre un accord préliminai­re en vue de gouverner ensemble. Parmi les mesures : pas de hausse d’impôts, respect des règles en matière d’endettemen­t public et sortie du charbon avancée à 2030 contre 2038.

Dans les négociatio­ns politiques en cours à Berlin, les trois partis font figurer en tête des priorités un plan d’investisse­ments massifs, indispensa­ble pour que l’Allemagne décarbone et numérise son économie. Le montant des dépenses à engager dans la prochaine décennie est évalué entre 30 et 50 milliards d’euros par an, selon différente­s estimation­s.

Les partis veulent aussi revenir au dispositif de ”frein à l’endettemen­t”, qui empêche l’Etat d’emprunter plus de 0,35% de son PIB chaque année. Cette règle a été suspendue, comme le permet la constituti­on, pour affronter la pandémie de coronaviru­s, à coup de centaines de milliards d’euros d’aides publiques.

(avec AFP)

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(Crédits : Kai Pfaffenbac­h)

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