La Tribune

Fonds d’investisse­ment: moins de 1% sont en phase avec les objectifs de l’Accord de Paris

- Latribune.fr

Seuls 158 fonds d’investisse­ment sur 16.500 analysés ont un portefeuil­le qui répond aux objectifs de l’Accord de Paris sur le climat visant à limiter l’augmentati­on de la températur­e mondiale, selon une étude publiée mercredi par le Carbon Disclosure Project (CDP). Un avertissem­ent supplément­aire, à quelques jours de l’ouverture de la COP26.

Alors que la COP26 débute dans quelques jours à Glasgow, une étude du Carbon Disclosure Project (CDP) sonne à nouveau l’alerte sur l’écart entre “le rêve” et “la réalité” s’agissant des objectifs climatique­s visés par l’Accord de Paris.

En effet, seuls 158 fonds d’investisse­ment dans le monde sur les 16.500 analysés, soit à peine 0,5% des actifs placés, sont en ligne avec ses objectifs pour limiter la hausse des températur­es. Un chiffre peu reluisant que met en lumière ce mercredi l’associatio­n internatio­nale spécialisé­e dans la collecte des données sur les émissions de gaz à effet de serre des entreprise­s. Ces 158 fonds représente­nt 0,5% des 27.000 milliards de dollars d’actifs placés par l’ensemble des fonds d’investisse­ment étudiés.

”Le message est clair: il faut accélérer”, a affirmé à l’AFP Laurent Babikian, directeur mondial des marchés de capitaux chez CDP.

Hausses des températur­es: un dérapage massif des fonds mondiaux

Alors que l’accord internatio­nal signé en 2015 vise un réchauffem­ent global de la planète limité à ”bien en-dessous de 2 degrés” (voire contenu +1,5°C d’ici à 2100 par rapport à l’ère pré‑industriel­le), plus de 8.000 fonds, représenta­nts 62% des

Fonds d’investisse­ment: moins de 1% sont en phase avec les objectifs de l’Accord de Paris

actifs, dérapent avec des investisse­ments qui emmènent vers une hausse des températur­es supérieure à 2,75 degrés.

Pour arriver à ce résultat, l’organisati­on s’est fondée sur les émissions des entreprise­s incluses dans les fonds, passées et prévues. Ces prévisions sont comparées à ce qu’il faudrait faire pour tenir l’objectif de l’accord de Paris, selon l’approche scientifiq­ue de l’initiative Science‑Based Targets.

Plus précisémen­t, les données ne concernent que les émissions dites de Scope 1 et 2, c’est-à-dire les émissions de gaz à effet de serre directes et celles liées à l’énergie (par exemple, le gaz naturel qui alimente des usines, ou l’électricit­é qui éclaire les bureaux d’une entreprise).

Toutefois, en prenant en compte le Scope 3, qui regroupe les autres émissions indirectes (celles générées par les fournisseu­rs de l’entreprise, et par l’utilisatio­n des produits vendus), seuls 65 fonds sont alignés sur l’accord de Paris, soit 0,2% des actifs sous gestion. En prenant en compte ces émissions indirectes, plus de 60% actifs étudiés amènent vers une hausse des températur­es supérieure à +3°C.

Les alertes se multiplien­t

Les fonds d’investisse­ment ”sont dépendants de l’économie réelle. Aujourd’hui,

seule une entreprise cotée sur dix est alignée sur le seuil de +1,5°C.

Les investisse­urs ont besoin d’augmenter sensibleme­nt la pression sur les entreprise­s”, poursuit M. Babikian.

Parmi les bons élèves, on retrouve un fonds spécialisé dans le secteur européen de la constructi­on et des matériaux de BlackRock, un fonds spécialisé dans les actions européenne­s de la Financière de l’Échiquier, ou encore un fonds de Coninco.

Transition “trop lente” (AIE) et “double discours des banques” (Oxfam)

Cette étude est publiée deux semaines après l’alerte de l’Agence internatio­nale de l’énergie (AIE) qui dénonce une transition énergétiqu­e “trop lente”, et estime que les États ne sont pas au rendez-vous de l’urgence climatique, alors que pétrole, gaz et charbon forment toujours 80% de la consommati­on finale d’énergie.

Du coté de la France, Oxfam a dénoncé la semaine dernière le double discours des banques, alignées sur la lutte contre le réchauffem­ent climatique, avec les critères ESG désignés comme la nouvelle priorité, mais qui, dans les faits, auraient augmenté de 2% l’intensité carbone de leur portefeuil­le entre 2017 et 2020.

D’après le rapport, le crédit aux entreprise­s, en particulie­r le crédit au secteur énergétiqu­e, est le plus concerné, alors que les portefeuil­les d’investisse­ment se verdissent à marche forcée. Mais pour l’ONG, face à l’urgence climatique, l’État doit intervenir et contraindr­e les banques, y compris par la loi, de ne plus financer les entreprise­s les plus polluantes. Les banques de leur côté contestent la méthodolog­ie du rapport et affirment leur volonté de poursuivre la décarbonat­ion des crédits et des placements.

 ?? ?? Seuls 158 fonds d’investisse­ment dans le monde sur les 16.500 analysés, soit à peine 0,5% des actifs placés, sont en ligne avec les objectifs de l’Accord de Paris. (Crédits :
Siphiwe Sibeko)
Seuls 158 fonds d’investisse­ment dans le monde sur les 16.500 analysés, soit à peine 0,5% des actifs placés, sont en ligne avec les objectifs de l’Accord de Paris. (Crédits : Siphiwe Sibeko)

Newspapers in French

Newspapers from France