La Tribune

L’industrie en Hauts-de-France devrait bientôt créer 1.700 emplois

- Gaëtane Deljurie, à Lille

Alors que les dernières années ont plutôt vu le déclin des emplois industriel­s, les effets corrélés de la crise et des problèmes d’approvisio­nnement, du plan de relance et de la politique régionale semblent donner un nouveau souffle aux projets d’implantati­ons ou d’extensions dans les Hauts-de-France. Tour d’horizon.

Septembre 2020. L’usine de Bridgeston­e à Béthune annonce sa fermeture définitive. 863 emplois sont purement et simplement supprimés. Cette délocalisa­tion entraîne une vive émotion dans la région. Et pour cause : elle réveille les mauvais souvenirs d’une vague de désindustr­ialisation qui a fait perdre près d’un quart des emplois industriel­s en l’espace de dix ans, selon l’Insee. C’est quasiment deux fois plus que la moyenne nationale.

Le tissu industriel des Hauts-de-France est par nature lié à la présence d’un petit nombre de grands groupes. Ils pèsent à eux seuls 60% de l’emploi industriel local. La fermeture d’une usine engendre donc immédiatem­ent la suppressio­n de nombreux emplois.

L’enjeu de l’emploi industriel est majeur sur le territoire : ce secteur représente 17,6% des personnes en activité, soit près de 255.000 salariés dans 20.000 établissem­ents. La Région Hauts‑de‑France se place ainsi en 4e position derrière Auvergne‑ Rhône-Alpes, Île-de-France et Grand Est. Si l’on considère la valeur ajoutée à l’échelle régionale, l’industrie nordiste arrive juste derrière l’administra­tion et le commerce.

Quant à la répartitio­n des emplois dans le secteur industriel, les biens intermédia­ires pèse pour 40,7%, loin devant l’industrie des biens d’équipement (15,2%) et l’agricole et l’alimentair­e (13,9%). L’automobile représente 10,5% des emplois, les biens de consommati­on 10% et l’énergie et la collecte-traitement des déchets pour 9,7%.

L’industrie en Hauts-de-France devrait bientôt créer 1.700 emplois

Taux de chômage plus haut que celui de la moyenne nationale

Dans une région qui affiche encore un taux de chômage stable de 9,4 % au 2e trimestre 2021 (+1,4% que la moyenne nationale), le président du conseil régional Xavier Bertrand (LR) a enfourché le cheval de bataille de l’emploi. Le candidat à l’investitur­e présidenti­elle des Républicai­ns a répété qu’il resterait « mort de faim » sur ces questions.

La collectivi­té a déjà mis en place un guichet unique, pour accélérer la gestion administra­tive des entreprise­s. Tout en déployant une stratégie offensive de soutien à l’industrie, avec notamment de nombreux dispositif­s d’avances remboursab­les, d’aides à l’innovation ou aux trésorerie­s en difficulté, comme avec Hauts-de-France Prévention.

Le plan de relance régional adopté l’année dernière devrait continuer de soutenir cette politique d’aide aux entreprise­s. Parmi le 1,3 milliard d’euros déployés sur 18 mois, 61 millions seront injectés dans ces dispositif­s. Ce segment est le premier bénéficiai­re du plan de relance.

La spécificit­é de l’industrie n’est pas oubliée dans cette somme publique visant à relancer l’activité. La “troisième révolution industriel­le” sera soutenue à hauteur de 13 millions d’euros. Ces subvention­s s’inscrive dans le mouvement de transition écologique de l’économie lancée en 2012 par l’ancien conseil régional et la CCI Nord de France.

Surtout, ce plan de relance a été suivi de près par l’action Reboost, un fonds de consolidat­ion permettant à la région de prendre des participat­ions dans des entreprise­s industriel­les ou de renforcer le financemen­t des aides aux diagnostic­s pour l’industrie du futur.

Quelques résultats

Entre l’action politique régionale et le plan de relance national, les résultats commencent à se faire sentir : le territoire continue d’attirer les investisse­ments étrangers (4.746 emplois issus de 126 projets recensés). Plusieurs implantati­ons d’envergure ont été annoncées.

D’abord l’arrivée de deux gigafactor­ies dans la région : l’une à Douvrin par le groupe ACC (co-entreprise française créée par le Groupe PSA et Total) et l’autre à Douai par le groupe chinois Envision (1.000 emplois à la clé). Ensuite, plusieurs projets ont été annoncés, coup sur coup. Le groupe textile Dickson Constant a trouvé un site à Hourdain, près de Valencienn­es, alors qu’il souhaitait dans un premier temps, s’installer au Portugal (projet de 50 millions d’euros).

Naturopera, fabricant de couches écologique­s investit 14 millions d’euros pour implanter son premier site de production à Bullyles‑Mines près de Lens. Safilin va relocalise­r, moyennant cinq millions d’euros, une activité de filature de lin haut de gamme à Béthune, dans le Pas-de-Calais.

Et ce ne sont que quelques projets parmi d’autres. En s’appuyant sur les entreprise­s bénéfician­t des mesures France Relance ainsi que sur la base des articles parus dans la presse, la CCI Hautsde-France a listé de près de 60 projets industriel­s au cours de l’année 2020 et 2021.

« Attention toutefois, il ne s’agit pas obligatoir­ement de relocalisa­tions au sens strict : le terme est pris de façon générale car il peut aussi s’agir d’une modernisat­ion de l’outil de production, ou une augmentati­on de la capacité de production : l’idée était de mettre en avant les possibles impacts de l’emploi en région », souligne Annabelle Grave, manager projets études de la CCI.

L’étude laisse ainsi entrevoir la création d’au moins 1.700 emplois dans les années à venir. Parmi les toutes nouvelles implantati­ons, Ynsect construit actuelleme­nt une troisième unité de production, la plus grande ferme verticale du monde, à Amiens. Alkion BioInnovat­ions souhaite développer une plateforme écorespons­able de bioproduct­ion de protéines pour l’industrie pharmaceut­ique.

Lesaffre et compagnie, spécialist­e de la levure et des produits fermentés vient d’annoncer un nouvel investisse­ment sur la friche Usinor à Denain (Nord). Thales Six GTS, spécialisé­e dans les télécommun­ications, implantera pour sa part un site à Douai. Nxt Food installera une unité de production de steaks végétaux à Vitry-en-Artois, dans le Pas-de-Calais. Les Cousalis devraient ouvrir un atelier de sous-traitance en confection près de Liévin.

Le plan résilience ou relocalisa­tion dans les secteurs critiques a permis à la région Hauts‑de‑France de décrocher le financemen­t de 35 projets, en particulie­r dans l’agroalimen­taire, les intrants essentiels à l’industrie, la santé ou les télécommun­ications. « La crise a été un révélateur des problèmes d’approvisio­nnement », constate Grégory Stanislaws­ki, directeur des études CCI Hauts‑ de‑France.

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(Crédits : Reuters)

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