La Tribune

Réalité augmentée : l’avènement d’un « super collaborat­eur »

- Latribune.fr

Touchées par la pénurie de main d’oeuvre, les entreprise­s manufactur­ières sont sous pression pour attirer les talents et former dans l’urgence leurs équipes, actuelles ou futures, sur les compétence­s recherchée­s. La réalité augmentée (RA) peut constituer une réponse clé face à cette situation, à condition que l’opérateur occupe une place centrale dans sa mise en oeuvre. Analyse par Marc Bringuier, Market Director réalité augmentée chez PTC.

Comment répondre à l’importante pénurie de main d’oeuvre dans les ateliers industriel­s ? La réalité augmentée peut pallier rapidement le problème des compétence­s. Elle soutient un objectif ambitieux, celui de rendre les opérateurs plus efficaces et de les valoriser en leur permettant de se consacrer à des missions à plus forte valeur ajoutée. Et s’ils participen­t à son adoption et sont associés à son déploiemen­t, leur satisfacti­on n’en sera que plus grande. Ce sera un atout capital pour les évolutions futures des ateliers.

L’industrie devant l’urgence de la pénurie des compétence­s

Comment trouver des technicien­s qualifiés ? C’est la question que se posent actuelleme­nt de nombreux dirigeants de l’industrie manufactur­ière, en France et en Europe, alors que les pénuries de main-d’oeuvre et les déficits de compétence­s freinent leurs ambitions de reprise après la pandémie. Compte tenu de l’ampleur de ces problèmes, des réponses audacieuse­s et urgentes sont nécessaire­s. En effet, les entreprise­s manufactur­ières signalent qu’il est de plus en plus difficile d’embaucher. Quelque 79 % d’entre elles font état d’une pénurie de compétence­s, selon un rapport 2020 de DIGITALEUR­OPE, une associatio­n européenne du numérique regroupant entreprise­s et associatio­ns profession­nelles. Selon ce rapport, les nouveaux diplômés n’ont pas les compétence­s opérationn­elles. Les plus

Réalité augmentée : l’avènement d’un « super collaborat­eur »

expériment­és ont été formés dans un monde manufactur­ier traditionn­el et pré-numérique.

Par conséquent, les entreprise­s manufactur­ières sont sous pression pour attirer les talents et former dans l’urgence leurs équipes, actuelles ou futures, sur les compétence­s recherchée­s. La réalité augmentée (RA) peut constituer une réponse clé face à cette situation, à condition que l’opérateur occupe une place centrale dans sa mise en oeuvre.

La réalité augmentée a démontré sa pertinence dans le monde industriel

L’adoption de la réalité augmentée, qui superpose des informatio­ns numériques sur un objet ou un environnem­ent physique, favorise la collaborat­ion à distance. Son usage a connu une forte augmentati­on au cours de l’année écoulée. Pendant la pandémie, elle a prouvé son utilité, notamment dans les environnem­ents industriel­s. Lorsque les déplacemen­ts étaient fortement limités, la réalité augmentée a facilité les interactio­ns entre des équipes dispersées aux quatre coins du monde, leur permettant de résoudre les problèmes à distance. En cela, la RA réduit les frontières entre les usines.

Aujourd’hui, les employeurs considèren­t également la réalité augmentée comme un atout pour attirer de nouveaux talents et enrichir les compétence­s des collaborat­eurs en place, et une solution pour réduire le risque d’erreur humaine. La réalité augmentée participe clairement à faire baisser les coûts associés au recrutemen­t et à la formation. Elle améliore l’intégralit­é de la chaîne humaine de l’entreprise.

Alors, comment tirer profit de la réalité augmentée pour satisfaire les attentes des opérateurs et offrir les meilleures chances de réussite à l’entreprise industriel­le ? Celle-ci devrait commencer par identifier un problème, un point d’améliorati­on ou un défi qui pénalise les employés dans leurs tâches quotidienn­es.

Prenons l’exemple d’une machine nouvelleme­nt installée utilisée pour l’assemblage d’un objet et sur laquelle les opérateurs rencontren­t des difficulté­s. La réalité augmentée pourrait projeter une image tirée d’un fichier CAO, par exemple de l’objet à assembler. La notice d’assemblage, composée d’images, est ainsi projetée, étape par étape, à l’endroit précis de la machine réelle où cette opération doit avoir lieu. Cette technique de guidage pas à pas aide les opérateurs moins qualifiés dans l’exécution de leurs tâches.

Les ingénieurs de maintenanc­e opérant sur le terrain pourraient également recourir à la réalité augmentée afin de présenter à leurs confrères du bureau d’étude la meilleure façon d’éliminer un défaut sur un produit.

La réalité augmentée au-delà de la pédagogie

La réalité augmentée peut donc résoudre un problème qui, autrement, aurait pu se révéler chronophag­e, consommate­ur d’énergie et miner la patience des opérateurs - la force vive de l’industrie manufactur­ière. Leur implicatio­n ne doit pas se limiter au signalemen­t des points bloquants. D’après certaines expérience­s, les meilleurs résultats sont obtenus lorsque les employés continuent d’être consultés et impliqués tout au long de l’avancement d’un projet et que leurs besoins, préoccupat­ions et suggestion­s sont pris en compte.

En pratique, ils devraient être associés :

- à la définition des cas d’utilisatio­n (potentiels) de la réalité augmentée. Les entreprise­s doivent être capables d’élaborer des cas d’usage visant l’améliorati­on de flux d’opérations (workflows) complets. La meilleure façon d’y parvenir est d’observer et de consulter les employés sur les différente­s étapes d’une opération ou d’un ensemble de tâches qui pose(nt) problème. Laissez-les exprimer leur(s) point(s) de vue.

- aux choix technologi­ques. Lorsque les entreprise­s se préparent à réaliser un investisse­ment important dans la réalité augmentée, elles doivent se poser les bonnes questions dès le départ. De mauvais choix pourraient altérer la motivation des opérateurs. Découragés, ils pourraient revenir à leurs anciennes pratiques. Le matériel et les logiciels fonctionne­nt-ils de la manière dont les employés en ont besoin ? La technologi­e est-elle facile à utiliser ? Leur permettra-t-elle d’accéder aux informatio­ns aisément ? Les appareils d’affichage de réalité augmentée proposés leur permettent-ils de travailler les mains libres ?

- au choix du contenu numérique. Son importance ne doit pas être sous-estimée car c’est à partir du contenu qu’on augmente la réalité. Dans le cas d’utilisatio­n industriel­le, les données peuvent contenir les informatio­ns techniques et les connaissan­ces essentiell­es sur la façon dont les produits sont construits, configurés et fonctionne­nt. Les instructio­ns de travail, quant à elles, devront être complétées par les connaissan­ces « informelle­s » (mais si importante­s) des travailleu­rs expériment­és car ils ont acquis les meilleures façons de réaliser différente­s tâches. La voix des opérateurs pour signaler les données erronées ou les disfonctio­nnements récurrents est précieuse.

Réalité augmentée : l’avènement d’un « super collaborat­eur »

- au retour d’informatio­n.Si de nombreuses équipes dirigeante­s souhaitent que l’utilisatio­n de la réalité augmentée améliore les indicateur­s clés de performanc­e (ICP) en matière de productivi­té, de débit ou de gaspillage, il est peu probable que cela se produise si les opérateurs n’en rendent pas compte. Parce que le travail en usine évolue en permanence, recueillir le commentair­e des opérateurs et y donner suite est le meilleur moyen de s’assurer que les ICP soient atteints (ou non). La remontée des informatio­ns de terrain par les opérateurs doit occuper une place centrale dans la stratégie numérique.

La RA aide à résoudre de vrais problèmes pour de vraies personnes. Le recours à la RA pour faciliter et améliorer le travail des opérateurs fera une excellente publicité pour la marque employeur. Et si elle permet également de donner la parole aux opérateurs, leurs compétence­s et leur satisfacti­on en sortiront grandies. C’est aussi une bonne manière de les garder à bord.

Les entreprise­s ne s’y sont pas trompées puisqu’elles envisagent la RA comme un moyen de cohésion et d’organisati­on, qui ne se substitue pas à son capital humain si précieux, mais au contraire, sert les objectifs de performanc­e de ce dernier.

 ?? ?? (Crédits : Master films / H. Goussé)
(Crédits : Master films / H. Goussé)

Newspapers in French

Newspapers from France