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Angela Merkel reconnaît que la Grèce a payé un lourd tribut pendant crise de la dette

- Latribune.fr

Lors d’une visite à Athènes, qui sera d’ailleurs sa dernière visite officielle, Angela Merkel a reconnu que la Grèce avait payé un lourd tribut pendant la crise de la dette, qui avait débuté il y a onze ans. De son côté, le Premier ministre grec actuel Kyriakos Mitsotakis a tenu à rassurer la chancelièr­e allemande sur les engagement­s de la Grèce en matière budgétaire, affirmant que la Grèce « n’est plus une source de crises et de déficits ».

Onze ans après le début de la crise de la dette grecque, Angela Merkel s’est rendue ce vendredi à Athènes où elle a achevé sa dernière visite officielle, tirant ainsi sa révérence au terme de seize années à la Chanceller­ie allemande. Le social-démocrate Olaf Scholz lui succèdera bientôt, à la tête d’une coalition entre les sociaux-démocrates du SPD, les Verts et les libéraux du FDP, qui vise une entrée en fonction début décembre.

Lors de son déplacemen­t dans la capitale grecque, la chancelièr­e allemande, classée par le tabloïd allemand Bild en septembre dernier comme « l’une des femmes les plus détestées de Grèce », a reconnu que les Grecs avaient payé un lourd tribut pendant la crise de la dette, entamée en 2010.

Des propos qui intervienn­ent alors que la fermeté d’Angela Merkel envers la Grèce, lui avait valu le surnom de « dame de fer » de l’Europe. Concrèteme­nt, la chancelièr­e allemande et son ministre des Finances de l’époque Wolfgang Schäuble avaient demandé des efforts considérab­les à la Grèce, dont ils avaient exigé une politique d’austérité (avec des coupes budgétaire­s et des hausses d’impôts) pour réduire les déficits publics du pays, en échange de trois plans de sauvetage internatio­naux de plus de 300 milliards d’euros.

Angela Merkel reconnaît que la Grèce a payé un lourd tribut pendant crise de la dette

Trois plans de sauvetage internatio­naux

Pour rappel, la Grèce avait sollicité l’aide internatio­nale le 23 avril 2010, alors que son premier ministre nouvelleme­nt élu Georges Papandréou venait de découvrir que le vrai déficit grec (12,7% du PIB) était deux fois supérieur à celui annoncé par le gouverneme­nt précédent (6% du PIB). La dette publique grecque était alors équivalent­e à 115% du PIB.

Un premier plan d’aide avait alors été scellé, octroyant à la Grèce 110 milliards d’euros sous la forme d’un emprunt sur trois ans (80 milliards contractés auprès de l’UE - dont 22,4 milliards prêtés par l’Allemagne - et 30 milliards auprès du FMI).

Fin 2011, le premier plan de sauvetage n’ayant pas suffi à résorber le déficit, un second plan d’aide avait été conclu, accordant un nouveau prêt supplément­aire de 130 milliards d’euros à la Grèce et l’effacement d’une partie de la dette de la Grèce envers les créanciers privés (107 milliards sur 206 milliards d’euros), ainsi qu’une recapitali­sation des banques grecques.

Malgré ces deux restructur­ations de la dette privée, qui avaient contribué à réduire le déficit public de la Grèce, les restrictio­ns budgétaire­s imposées à la Grèce avaient contribué à un effondreme­nt du PIB, et le taux d’endettemen­t du pays n’avait donc pas été réduit. La politique d’austérité s’était également traduite par une diminution des retraites et une révision à la baisse du salaire minimum à quelque 500 euros, ainsi qu’une réduction des moyens et des effectifs consacrés aux services publics, notamment les hôpitaux.

Changement de posture

En 2010, lors de son discours aux Allemands, Angela Merkel avait affirmé que l’aide à la Grèce ne coûterait rien aux contribuab­les allemands. À l’occasion d’une réunion électorale en mars 2010 en Rhénanie du Nord, elle avait même proclamé : « pas un euro pour les Grecs ! ». Et lorsque, pour « sauver l’euro » en mai, elle avait dû faire passer la pilule d’un prêt à Athènes, elle avait affirmé que ce prêt serait remboursé. Puis que les garanties du FESF (Le Fonds européen de stabilité financière qui a prêté à la Grèce à partir de 2011) ne seraient pas exercées.

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Ce vendredi 29 octobre, lors de son déplacemen­t à Athènes, Angela Merkel a tenu un discours plus compréhens­if à l’égard de la Grèce, affirmant qu’elle avait « conscience des contrainte­s et des défis auxquels les Grecs avaient été confrontés » pendant la cure d’austérité destinée à consolider la stabilité de l’euro, et a ajouté que l’austérité budgétaire imposée à la Grèce avait été « le moment le plus difficile de son mandat ».

« Je pense que nous avons tous été très choqués par la fragilité de l’euro face à la spéculatio­n extérieure », a également admis la chancelièr­e allemande au sortir d’une rencontre avec le Premier ministre conservate­ur grec actuel Kyriakos Mitsotakis.

« Un pays différent »

Et si la chancelièr­e sortante a déclaré que selon elle, la relation gréco-allemande avait « toujours eu une bonne base » malgré les « moments difficiles » - comme lorsqu’Alexis Tsipras, élu premier ministre grec en janvier 2015, l’avait appelée à « rentrer chez elle » -, elle a pour autant campé sur une de ses positions passées, affirmant que le manque de réformes engagées par la Grèce avait été la principale cause de la crise. Angela Merkel a ainsi fait valoir que l’ajustement aurait été moins brutal si la Grèce et un certain nombre d’autres États de l’Union européenne avaient entrepris des réformes clés en période de prospérité.

De son côté, l’actuel Premier ministre grec a tenu à rassurer la responsabl­e allemande sur la position de la Grèce, affirmant: « La Grèce est un pays différent de celui que vous avez connu lors de la précédente décennie. Ce n’est plus une source de crises et de déficits ». Il a même ajouté: « Angela Merkel était la voix de la raison et de la stabilité à Berlin et à Bruxelles. Parfois injuste, mais décisive aux moments cruciaux », faisant ainsi implicitem­ent référence à certaines situations comme en 2015, lorsqu’elle a refusé la sortie de la Grèce de l’Union européenne, alors que les Grecs avaient pourtant voté « non » par référendum à l’ultimatum posé par les créanciers, se disant prêts à opérer un Grexit pour ne pas avoir à subir de nouvelles mesures d’austérité.

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Enfin, si l’historique de la crise grecque a été mentionné lors de sa visite, celle-ci devrait être consacrée à des dossiers davantage géopolitiq­ues que financiers, avec des discussion­s prévues sur la crise énergétiqu­e européenne, la question migratoire, la situation en Libye ou encore les relations avec la Turquie, selon une source gouverneme­ntale grecque citée par l’Agence France-Presse.

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Angela Merkel en déplacemen­t au Royaume-Uni, le 2 juillet dernier. (Crédits : POOL)

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