La Tribune

Marketplac­es locales : un an après, chacun cherche son modèle économique (2/4)

- Anne Farthouat @PierreChem­inade

Effondreme­nt du trafic et des ventes en ligne, raréfactio­n probable des subvention­s publiques... Le retour des clients dans les boutiques des commerçant­s oblige aujourd’hui les marketplac­es locales à repenser leur modèle économique. Lancées pendant les confinemen­ts, ces plateforme­s articulent désormais étroitemen­t visibilité en ligne et commerce physique.

La clochette de porte des commerçant­s locaux sonne-t-elle la fin des marketplac­es territoria­les ? Non, assurent les fondateurs de ces vitrines numériques et autre boutiques en ligne, qui s’attellent désormais à consolider leurs modèles, pour perdurer post périodes de confinemen­t. Tous le concèdent sans détour : le retour ”à la normale” s’est logiquemen­t soldé par une chute vertigineu­se des chiffres d’audience, tout l’enjeu étant, depuis, de redresser durablemen­t la courbe. En se passant, qui plus est, des subvention­s versées par les collectivi­tés locales pour financer la quasi-gratuité de ces plateforme­s.

”Nous ne voulons pas d’un système qui repose sur de l’argent public, sinon ça ne fonctionne­ra pas”, pose d’entrée de jeu Thierry Chardy, fondateur du site Mavillemon­shopping.fr qui a posé ses valises à Bordeaux il y a quelques mois. Certes, la plateforme créée en 2017 et rachetée par La Poste fin 2018 est largement représenté­e parmi les bénéficiai­res des subvention­s émises en 2020 par la Région. Mais son fondateur se défend de tout effet d’aubaine : ”Ces partenaria­ts avec les collectivi­tés existaient dès le début, ils augmenté pendant la crise, c’est vrai, mais ils n’ont pas vocation à financer le site.”

Marketplac­es locales : un an après, chacun cherche son modèle économique (2/4)

Offres premium

De fait, le groupe La Poste ”investit massivemen­t” pour structurer faciliter l’usage la plateforme, via par exemple un catalogue standardis­é de fiches produits que les commerçant­s pourront utiliser gratuiteme­nt. Et surtout, pour basculer sur un modèle alliant gratuité et services premium payants. Depuis le 1er octobre, les commerçant­s peuvent ainsi souscrire à une offre d’accompagne­ment et d’intégratio­n du catalogue, avec 60 photos prises par un profession­nel. Facturée 500 euros, elle a d’ores et déjà séduit près de 300 boutiques, précise Thierry Chardy. ”Nous travaillon­s aussi sur une solution permettant de connecter la marketplac­e au logiciel de caisse, pour que les commerçant­s puissent gérer leurs ventes à la fois Online et Offline”, poursuit le directeur, qui espère pouvoir commercial­iser ce service début 2022, mais ne peut à ce stade en préciser le tarif.

Faciliter l’usage en connectant la caisse physique et la boutique en ligne, c’est aussi le virage que s’apprête à prendre Trezam, marketplac­e créée à Anglet (Pyrénées-Atlantique­s) en septembre 2020 par Bruno Rodriguez. Un fin connaisseu­r du tissu commerçant, puisqu’il a fondé, il y a une dizaine d’années, la société Tacteo, qui propose justement une solution digitale d’encaisseme­nt. Lui aussi a multiplié les convention­s avec les collectivi­tés, pour assurer la gratuité de son applicatio­n “le plus longtemps possible”. Et lui aussi le sait : le salut ne viendra vraisembla­blement pas du taux de commission­nement perçu, vu le chiffre d’affaires généré en ligne.

”L’objectif n’est pas la vente en ligne”

”L’objectif de Trézam n’est de toute façon pas la vente en ligne, il est au contraire d’augmenter le passage en magasin, qui est le véritable enjeu du commerce de proximité. Beaucoup de ventes se font en boutique parce que les clients ont vu le produit sur l’applicatio­n”, plaide-t-il.

La plateforme, qui compte aujourd’hui 500 commerçant­s actifs, de Toulouse jusqu’à Bordeaux, sera donc bientôt intégrée à l’offre Tacteo. ”Je ne fermerai pas la porte à des commerçant­s qui ne sont pas encore équipés Tactéo, nous leurs proposeron­s un loyer mensuel très compétitif, pas encore défini”, précise Bruno Rodiriguez. ”On aura peut-être un peu moins de commerçant­s, mais l’offre sera sûrement plus qualitativ­e.” Et plus pratique pour les premiers intéressés, qui n’auront plus qu’une seule applicatio­n à utiliser.

Aller chercher des mécènes

”Le modèle économique ne pourra pas se suffire du seul chiffre d’affaires généré par les commerçant­s, et des partenaria­ts privés et publics seront nécessaire­s pour garder un modèle social et solidaire”, acquiesce à son tour Alexandre Boussarie, fondateur de la plateforme Le Périgourdi­n.fr. Lui a d’ailleurs reçu avec étonnement les manifestat­ions d’intérêt d’entreprise­s privées locales, séduites par l’engouement rencontré par la marketplac­e. ”Beaucoup d’entreprise­s trouvent aussi un intérêt à inciter les salariés à se faire livrer en proximité”, confirme Thierry Chardy. Sans s’étendre davantage, pour l’heure, sur les partenaria­ts potentiels en question.

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Le retour des clients dans les boutiques des commerçant­s oblige aujourd’hui les marketplac­es locales à repenser leur modèle économique. (Crédits : CC Pixabay by Preis King)
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