La Tribune

Encourageo­ns les banques à devenir moteur de la rénovation énergétiqu­e

- Frédéric Utzmann et Pierre Chapon

OPINION. Le combat contre les passoires énergétiqu­es apparaît comme un levier essentiel pour atteindre des objectifs climatique­s nécessaire­s et ambitieux. Alors que l’examen du Projet de loi de finances 2022 se poursuit au Parlement, la question du financemen­t de la rénovation énergétiqu­e doit revenir sur le devant de la scène. Par Frédéric Utzmann, co-fondateur d’Effy, et Pierre Chapon, co-fondateur de Pretto.

Le constat est sans appel : si de plus en plus de Français prennent conscience de la nécessité d’entreprend­re des travaux de rénovation énergétiqu­e chez eux, le manque de moyens financiers reste le frein numéro un quand il s’agit de passer à l’action. Dans plus de 4 cas sur 10, le projet de travaux est ainsi abandonné en raison de son coût jugé trop élevé[1].

Une place trop souvent négligée

Aujourd’hui, le financemen­t des chantiers est en grande partie assumé par l’État, au travers de l’aide MaPrimeRén­ov’, et par les fournisseu­rs d’énergie, avec le dispositif des primes CEE. Nous déplorons qu’à leurs côtés, la place des banques soit encore trop souvent négligée. Ce sont pourtant elles qui se trouvent en première ligne lors de l’achat d’un bien immobilier. Elles ont donc un rôle fondamenta­l à jouer dans la rénovation énergétiqu­e de ces biens pour éviter leur dévalorisa­tion patrimonia­le voire même demain l’interdicti­on de leur mise en location après les évolutions récentes relatives au Diagnostic de Performanc­e Énergétiqu­e (DPE) et à l’interdicti­on de location des passoires thermiques.

L’examen du projet de la loi de finances 2022 entend déjà élargir le rôle des banques dans le financemen­t de la rénovation énergétiqu­e. Ainsi, l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ), un prêt à taux nul accordé sans condition de ressources pour financer le reste à

Encourageo­ns les banques à devenir moteur de la rénovation énergétiqu­e

charge des travaux d’économies d’énergie, a été prolongé jusqu’à fin 2023 et simplifié dans son instructio­n. Quant au plafond du montant d’emprunt jusque-là fixé à 30.000 euros, il a été remonté à 50.000 euros.

Des leviers incitatifs

Ces annonces vont dans le bon sens mais il est indispensa­ble d’aller encore plus loin pour que les banques deviennent des acteurs à part entière de la rénovation énergétiqu­e. Et nous sommes convaincus que plusieurs leviers peuvent rapidement être activés pour les aider à se saisir pleinement du sujet.

Des leviers incitatifs tout d’abord : nous faisons aujourd’hui le constat que l’éco-PTZ est encore trop faiblement proposé aux ménages modestes. Seuls 7 % des 42.000 éco-PTZ délivrés en 2020 l’ont été pour des ménages modestes[2]. Il faut inciter les banques à le distribuer davantage en augmentant de manière significat­ive leur rémunérati­on en contrepart­ie d’une obligation quantitati­ve dans la distributi­on de ce prêt.

Des leviers financiers également : nous nous étonnons qu’aujourd’hui, l’enjeu énergétiqu­e n’entre toujours pas en compte dans l’appréciati­on du taux d’endettemen­t pour décrocher un crédit, aujourd’hui limité à 35 % pour tous les projets. Relever ce taux maximum à 37% ou 38% pour autoriser le financemen­t de travaux de rénovation énergétiqu­e permettrai­t aux ménages de valoriser leur bien tout en allégeant leur facture. Un véritable cercle vertueux pourrait alors s’installer : une facture réduite, c’est un pouvoir d’achat augmenté et une charge mensuelle allégée, c’est un risque crédit amoindri.

Une réduction de l’empreinte carbone

Rappelons également qu’aujourd’hui, pour limiter leur impact carbone très souvent pointé du doigt, les établissem­ents bancaires s’engagent de plus en plus pour réduire leurs investisse­ments fossiles. Une démarche dont semblent pour l’instant être exclues les activités de retail banking en général et le crédit à l’habitat en particulie­r. Pourtant, la mobilisati­on des banques autour des enjeux de rénovation énergétiqu­e des logements pourrait représente­r un levier majeur de réduction de leur empreinte carbone.

_________ [1] Étude Kantar pour Effy - Avril 2021 [2] Étude Effy - Novembre 2021

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(Crédits : Mike Fouque)

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