La Tribune

Pour une Europe souveraine sur les marchés numériques

- Laetitia Avia, Fabien Gouffefard­e, Guillaume Rouger @MCABIROL

Laetitia Avia, Fabien Gouttefard­e et Guillaume Rouger appellent à une mobilisati­on politique, économique et citoyenne en faveur de deux textes d’importance capitale pour l’avenir de l’Europe : le Digital Services Act et le Digital Market Act. Deux projets défendus par le commissair­e en charge du marché intérieur, Thierry Breton. Cette prise de position commune vise à soutenir ces projets actuelleme­nt en préparatio­n au niveau européen, à quelques semaines de la présidence française de l’UE. Par Laetitia Avia, députée de Paris, Fabien Gouttefard­e, député de l’Eure, et Guillaume Rouger, ingénieur et commissair­e aux comptes.

A quelques semaines de la présidence française de l’Union Européenne et à l’heure où la France annonce des investisse­ments massifs en soutien au secteur du cloud, l’enjeu de la régulation des acteurs du numérique apparaît comme l’un des dossiers majeurs et prioritair­es de l’agenda européen. Le commissair­e en charge du marché intérieur, Thierry Breton, est en première ligne sur les deux projets de Digital Services Act et de Digital Market Act.

Le temps est compté

Et, comme il l’a récemment rappelé à l’ensemble des États membres et des parlementa­ires, « le temps est compté » : le temps de la négociatio­n européenne, bien entendu, qui doit permettre la définition d’un encadremen­t pertinent, efficace et ambitieux des activités numériques ; mais également le temps perçu par l’ensemble des entreprise­s et des citoyens européens, qui doivent pouvoir s’appuyer sur des règles claires et pérennes, protectric­es de leurs droits fondamenta­ux et permettant le développem­ent de nos champions européens.

Pour une Europe souveraine sur les marchés numériques

Comme députée et avocate engagée contre le cyberharcè­lement et la haine en ligne, comme député spécialist­e des questions de défense, comme commissair­e aux comptes acteur de la régulation internatio­nale des marchés et des secteurs stratégiqu­es, nous appelons à une mobilisati­on politique, économique et citoyenne en faveur de ces deux textes d’importance capitale pour notre avenir.

”Il ne s’agit pas de combattre, il s’agit de réguler”

La première brique de cette régulation européenne en constructi­on, est celle de la défense des citoyens européens et des consommate­urs, et de l’affirmatio­n de nos valeurs au sein du marché numérique mondial. Le temps politique doit désormais s’accélérer pour rattraper le temps des plateforme­s digitales mondiales, qui ont investi l’ensemble de l’espace numérique en quelques années et imposé, de fait, des standards internatio­naux souvent utiles et favorisant le développem­ent de nouveaux services et produits essentiels, mais parfois questionna­bles, voire dangereux pour nos démocratie­s.

Il ne s’agit pas de combattre, il s’agit de réguler. Il ne s’agit pas de casser la dynamique d’innovation et de freiner le développem­ent des écosystème­s vertueux, il s’agit de se doter d’un ensemble de règles communes à l’échelle du continent en soutien au renforceme­nt des droits individuel­s et de la confiance. La lutte contre le cyberharcè­lement et la haine en ligne, le combat que nous devons mener sans répit face à la diffusion de fausses informatio­ns et la déstabilis­ation des mécanismes démocratiq­ues au sein des États membres de l’Union, la protection des données personnell­es de l’ensemble des citoyens et notre capacité d’interventi­on sur le champ technologi­que, des algorithme­s et de l’intelligen­ce artificiel­le sont au coeur de cette évolution législativ­e et réglementa­ire.

L’Europe doit investir dans des dispositif­s de contrôle

Le deuxième étage de cet édifice réglementa­ire européen en devenir, concerne notre souveraine­té européenne sur ce secteur stratégiqu­e. Le ministre français de l’Économie, des Finance et de la Relance, Bruno Le Maire, et le secrétaire d’État au questions numériques, Cédric O, portent avec déterminat­ion cette ambition une Europe numérique plus forte, en cohérence avec les perspectiv­es tracées par le président de la République. L’Union Européenne doit renforcer sa capacité d’interventi­on dans ce domaine, au travers d’un effort de normalisat­ion et d’investisse­ments massifs dans nos dispositif­s de contrôle.

Elle doit, au travers de la nouvelle architectu­re juridique, qui sera mise en oeuvre, renforcer la sécurité des marchés européens et fédérer acteurs publics et privés autour de cette affirmatio­n de la primauté du droit européen sur notre territoire. A l’heure d’une relance du projet de défense européenne, comment pourrions-nous laisser l’espace numérique à la merci des attaques plus ou moins frontales de nos compétiteu­rs stratégiqu­es ? Ce serait un renoncemen­t coupable, dont les génération­s futures auraient à pâtir et qui pourrait mettre à mal des décennies d’efforts de constructi­on d’une Union Européenne en capacité de défendre ses intérêts dans le monde.

Contre un Far West dévastateu­r

Enfin, il nous faut travailler à la définition d’un cadre qui soit vecteur d’opportunit­és pour nos entreprise­s françaises et européenne­s. Les Etats-Unis ont compris depuis de longues années que les normes et régulation­s pouvaient favoriser leurs champions nationaux dans le jeu mondial, en leur procurant des avantages compétitif­s déterminan­ts, en les soutenant dans leur développem­ent. Le Digital Services Act et le Digital Market Act apparaisse­nt dès lors comme un réveil interventi­onniste de l’Union Européenne sur le front de la régulation, réelle arme stratégiqu­e pour notre marché intérieur et pour nos entreprise­s numériques, de services et industriel­les.

Car la révolution numérique n’est pas l’apanage des GAFAM, elle emporte des conséquenc­es et des évolutions majeures sur l’ensemble du champ technologi­que et économique : des systèmes embarqués aux algorithme­s d’optimisati­on industriel­s, de l’aide à la décision au ciblage publicitai­re, du développem­ent des capacités robotiques à l’utilisatio­n massive des technologi­es d’intelligen­ce artificiel­le dans l’ensemble des sphères publiques et privées.

Sur l’ensemble de ces quelques thématique­s, chacun peut aisément comprendre quels pourraient être les effets dévastateu­rs d’un Far West numérique sans supervisio­n ni contrôle. En agissant vite et de manière coordonnée sur l’ensemble de son territoire, l’Union Européenne affirmera son leadership et favorisera un développem­ent plus solide de ses propres géants du numériques. La régulation de ce secteur n’est pas une contrainte, elle est un atout pour nos entreprise­s et pour les citoyens : accélérons et gardons ce temps d’avance.

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Fabien Gouttefard­e et Guillaume Rouger) (Crédits : Gerd Altmann via Pixabay)
“La régulation de ce secteur n’est pas une contrainte, elle est un atout pour nos entreprise­s et pour les citoyens : accélérons et gardons ce temps d’avance” (Laetitia Avia, Fabien Gouttefard­e et Guillaume Rouger) (Crédits : Gerd Altmann via Pixabay)
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