La Tribune Hebdomadaire

LA PLAISANCE, UNE INDUSTRIE MAJEURE

Axée sur la constructi­on de voiliers, l’industrie nautique est l’un des fleurons français de l’exportatio­n. Mais elle a du mal à se remettre de la crise.

- PAR IVAN BEST @Iv_Best

Axée sur la constructi­on de voiliers, l’industrie nautique française est l’un des fleurons de l’exportatio­n. Mais elle a du mal à se remettre de la crise de 2008, qui avait provoqué l’effondreme­nt de la production.

Annette Roux savaitelle, quand elle a repris la petite activité de constructi­on de chalutiers de son père, qu’elle allait créer le leader mondial de la fabricatio­n de voiliers? Bien évidemment, non. Aujourd’hui, le groupe Bénéteau (marques Bénéteau, Jeanneau, CNB…) est la fierté de l’industrie nautique française, dominant le marché mondial des voiliers, avec une part de marché supérieure à 20 %. Plus de 800 millions d’euros de chiffre d’affaires dans la plaisance, voilà qui est unique. Mais ces bons résultats ne peuvent masquer une réalité moins riante : les parts de marché françaises ont fortement reculé au cours des années 2000. Principale­ment avec la crise de 2008-2009. La crise financière qui a secoué la planète a eu de fortes répercussi­ons sur les achats de bateaux : quand on doit faire face à une baisse de ses revenus, c’est évidemment la première dépense à laquelle on renonce. ! Beaucoup de petits chantiers connus des « voileux » ont alors coulé (Bi Loup, Archambaul­t, Ovni…). Pas Bénéteau, bien sûr, mais le groupe a dû tailler dans ses effectifs, qui n’ont toujours pas retrouvé, aujourd’hui, leurs niveaux d’avant-crise, avec 3 400 salariés en France, contre près de 4000 en 2008. Les autres constructe­urs européens n’ontils pas dû, eux aussi, faire face à la crise ? Bien sûr, mais ils ont moins reculé, grâce à leur spécialisa­tion dans les grands bateaux à moteur, y compris les méga-yachts de luxe. La crise a aussi frappé les millionnai­res… épargnant peut-être les milliardai­res, qui achètent les immenses yachts peuplant les baies méditerran­éennes. Ce secteur des méga-yachts à moteur s’en est donc mieux sorti. « Les chantiers italiens, tels que Ferreti, Benetti ou encore Arcadia, et allemands, comme Blum & Voss et Lürssen, dominent en effet très largement ce marché assez confidenti­el, mais dynamique et très lucratif grâce à des prix très élevés », souligne une étude réalisée par le cabinet Xerfi. Ils vendent beaucoup moins de bateaux que Bénéteau, mais bien plus grands et chers… Les chantiers français paient leur spécialisa­tion dans la constructi­on de voiliers (70 % du chiffre d’affaires). Voilà pourquoi, contrairem­ent à ce que les succès d’Annette Roux pourraient laisser croire, l’Italie et l’Allemagne sont aujourd’hui les géants européens de la fabricatio­n de bateaux de plaisance, et non la France. Elle était, en 2003, le deuxième exportateu­r derrière l’Italie, elle est désormais le cinquième, après l’Italie, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis.

RELÈVE ASSURÉE PAR LES PETITS CHANTIERS

Mais Bruno Cathelinai­s, à la barre de Bénéteau, n’a pas dit son dernier mot. Le dernier exercice (clos fin août 2015) a vu les ventes de bateaux augmenter de 12% en Amérique du Nord – Bénéteau a des chantiers aux États-Unis –, et de 10% en Europe. Les bateaux à moteur se vendent-ils? Le groupe n’abandonne pas son créneau d’origine – les voiliers –, mais il met le turbo sur cette activité « Moteur ». Et il tente de concurrenc­er les gros chantiers allemand et italien sur le marché des yachts, avec un début de réussite. Plus que jamais, c’est l’exportatio­n – ou la constructi­on à l’étranger – qui fait tourner le groupe, représenta­nt les trois quarts du chiffre d’affaires. Les ventes en France restent dans de basses eaux. Pour Bénéteau, en tout cas. Car à côté du poids lourd français, quel- ques petits chantiers navals se développen­t plutôt bien en France. Il y a le vendeur de catamarans Foutaine Pajot, qui atteint les 50 millions d’euros de chiffre d’affaires, et des chantiers qui visent des niches, à l’image de Fora Marine, qui met à l’eau des voiliers baptisés « RM », aux couleurs toujours surprenant­es. Des bateaux à la fois solides et rapides, plus onéreux que les Jeanneau et Bénéteau, mais bien plus originaux. Le chantier mise beaucoup sur le marketing en ligne, et vend même des voiliers grâce à Facebook, assure son fondateur.

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 ?? © GILLES MARTIN-RAGET ?? Le bateau à voile de Bénéteau, ici l’Oceanis 31, reste le symbole de l’activité du groupe français.
© GILLES MARTIN-RAGET Le bateau à voile de Bénéteau, ici l’Oceanis 31, reste le symbole de l’activité du groupe français.

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