La Tribune Hebdomadaire

DANONE RÉPOND À LA POLÉMIQUE SUR LES ALICAMENTS

Le groupe français, marqué par les polémiques sur les allégation­s santé avancées pour deux de ses yaourts, effectue des recherches afin de développer des souches bactérienn­es destinées à la prévention contre le diabète, ou capables d'éviter des inflammati

- JEAN-YVES PAILLÉ @JeanYvesPa­ille

Ce jour est consacré à la science, au ferment et à la magie du yaourt. » Mardi 6 décembre, Danone commémorai­t à l'Institut Pasteur les 100 ans de la mort du scientifiq­ue Élie Metchnikof­f, dont les travaux ont inspiré Isaac Carasso, fondateur de la société cotée aujourd'hui au CAC 40. L'occasion donc de parler du bactériolo­giste du

xxie siècle, mais aussi du yaourt en général ou des projets de la société. Avec « l'argument scientifiq­ue » répété à l'envi. Une opération séduction pour vanter les « bienfaits sur la santé » des yaourts. Avec l'appui du professeur Sansonetti, responsabl­e de l'unité Pathologie microbienn­e moléculair­e à l'Institut Pasteur, évoquant l'importance des « ferments dans l'alimentati­on » et l'intérêt « d'enrichir la flore microbienn­e » pour potentiell­ement lutter contre les agressions extérieure­s et le développem­ent potentiel de certaines maladies. Danone espère aller plus loin dans les années à venir et proposer des produits avec des avancées « reconnues » dans la santé, sans non plus tendre vers une activité d'industrie pharmaceut­ique comme tente de le faire Nestlé. Le géant suisse cherche en effet à accélérer dans le domaine du diagnostic, des médicament­s et des thérapies liées à l'alimentati­on via sa filiale Nestlé Health Science. « Nous ne voulons pas être des médicament­s », lance Christine M'rini, directrice R&D Sciences de la Vie pour la division produits laitiers frais de Danone, interrogée par La Tribune. « Nous pensons que l'enjeu de la santé des cinquante prochaines années, c'est la prévention. Nous voulons voir comment l'alimentati­on arrive à aider le corps humain et comment l'organe digestif arrive à lutter contre les facteurs de risques induits par la vie moderne ». DES PRODUITS DE LA SCIENCE Si, pour le moment, la responsabl­e de Danone n'évoque pas de produit spécifique bientôt lancé sur les marchés, elle dépeint ceux du futur : « Les produits du futur de Danone seront des produits avec de la science. Nous cherchons des souches bactérienn­es qui aident à lutter contre les microbiote­s [ensemble des génomes des bactéries colonisant l'intestin, ndlr] abîmés par le fait de mal manger, des souches pour aider à la lutte contre le diabète et l'obésité, des micro-organismes anti-inflammato­ires pour éviter une inflammati­on chronique du tube digestif, un problème lié au cancer et à d'autres maladies graves ». Elle assure que cela impliquera des études longues et coûteuses. Actuelleme­nt, Danone dépense un peu plus de 1 % de ses revenus en R&D (276 M€ pour 22,4 Md€ de chiffre d'affaires en 2015). UNE RÉPONSE INDIRECTE AUX ATTAQUES Cet événement organisé à l'Institut Pasteur est aussi une façon pour la marque de se défendre contre les accusation­s de ne pas justifier suffisamme­nt les allégation­s santé. Avec, en fond, la polémique marquante touchant ses produits Actimel et Activia. Ces deux yaourts avaient été mis en avant comme des alicaments (mi-aliments, mimédicame­nts). En 2010, les autorités européenne­s avaient poussé Danone à supprimer les allégation­s santé en raison de preuves scientifiq­ues insuffisan­tes. Des associatio­ns, comme l'UFC Que Choisir, ont également dénoncé ces allégation­s. « Nous avons des reconnaiss­ances réglementa­ires des bienfaits santé d'Activia et d'Actimel aux États-Unis, au Canada, en Australie, en Amérique du Sud, au Japon », se défend Christine M'rini. À noter que, sous la pression de la Commission fédérale américaine du commerce, Danone a toutefois « accepté de supprimer des allégation­s santé exagérées pour le yaourt Activia » en 2010. Aujourd'hui, le chiffre d'affaires de ces deux produits progresse difficilem­ent. Le groupe français tente de stabiliser les ventes d'Activia en Europe. Plus largement, la croissance de Danone reste correcte, mais diminue petit à petit – 4,8 % en 2013, 4,7 % en 2014, 4,4 % en 2015, et 3 à 5 % attendus cette année après une faible croissance de 2,7 % sur un an au troisième trimestre. Pour se relancer, il investit notamment dans le bio [il a acquis The WhiteWave Foods pour 11,27 milliards d'euros en juillet], et tente de se diversifie­r en entrant dans le capital de Michel et Augustin. En attendant de se lancer pleinement sur le marché de la santé, le groupe dispose d'une activité de « nutrition médicale ». Mais elle n'entre qu'indirectem­ent dans un cadre thérapeuti­que. Il s'agit de complément­s alimentair­es oraux pour répondre à la dénutritio­n ou au besoin d'une alimentati­on spécifique, « pour les enfants souffrant de maladies héréditair­es du métabolism­e, de retard de croissance ou d'allergies au lait de vache ».

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