La Tribune Hebdomadaire

Sursis pour l’Airbus A380

Emirates a signé un accord portant sur une commande de 36 exemplaire­s de l’Airbus A380. Plus de dix ans de production sont garantis, ce qui permettra au constructe­ur d’envisager le lancement d’une remotorisa­tion de l’appareil.

- FABRICE GLISZCZYNS­KI @FGliszczyn­ski

Emirates sauve une nouvelle fois l’A380. Alors que la direction d’Airbus avait évoqué un arrêt du programme de son très gros-porteur si les négociatio­ns avec Emirates sur une nouvelle commande échouaient, la compagnie du Golfe a signé le 18 janvier un protocole d’accord portant sur une commande de 36 appareils supplément­aires, dont 10 en option. Le choix du motoriste et la possibilit­é d’inclure dans la commande des A380Plus – une version présentée en juin dernier qui, sans aller jusqu’à une remotorisa­tion, permet d’améliorer les performanc­es de l’avion – est encore en négociatio­n. L’annonce de cette commande montre qu’Emirates ne pouvait se permettre un arrêt du programme. L’A380 est en effet au coeur de la stratégie de la compagnie du Golfe. À tel point qu’elle aurait probableme­nt eu plus à perdre qu’Airbus d’un arrêt du programme. Avec 162 commandes d’A380 (178 avec les options), Emirates détient désormais près de 50 % des commandes enregistré­es depuis le lancement de l’avion en 2000. Il s’agit donc d’une bonne nouvelle pour Airbus qui va pouvoir regonfler son carnet de commandes, réduit comme peau de chagrin en raison de l’absence de ventes depuis plusieurs années. Avec cette commande, ce carnet s’élève officielle­ment à 115 appareils, même si en réalité, à l’exception de la soixantain­e d ’ a v i o ns d ’ Emirates, les autres commandes ont peu ou pas de chance d’être honorées, soit parce que le client a déjà indiqué qu’il ne les prendrait pas soit parce qu’il apparaît fragile financière­ment. À tel point que certains affirment que le carnet de commandes réel se résume peu ou prou aux seuls avions d’Emirates. BAISSE DES CADENCES DE PRODUCTION Pour autant, avec la baisse des cadences prévue au cours des prochaines années, Airbus s’assure environ dix ans de production. Après avoir livré 15 A380 l’an dernier, l’avionneur européen prévoit d’en construire 12 en 2018, 8 en 2019 et devrait descendre à six à partir de 2020, un niveau qui lui permet encore, selon Fabrice Brégier, le président d’Airbus Commercial Aircraft, de fabriquer l’avion de manière industriel­le (ce dont beaucoup doutent). Ce niveau devrait être maintenu au cours des prochaines années. Il constitue un socle qui sécurise donc pendant dix ans la production réservée à Emirates, dont la direction demandait une telle garantie sur le maintien du programme. VERS UNE AMÉLIORATI­ON DE LA PERFORMANC­E Il est évident que la compagnie de Dubaï voulait non seulement être sûre de prendre livraison des appareils commandés mais aussi que la valeur résiduelle des exemplaire­s qui pourraient commencer à sortir dès l’année prochaine ne soit pas réduite à néant par un arrêt précipité du programme. Selon des analystes, en effet, Emirates amortit ses A380 sur dix ans. Dès cette année, le premier appareil reçu (en 2008) pourrait potentiell­ement être cédé sur le marché de l’occasion. D’ici à 2020, il y en aura neuf de plus. D’ici à 2024, 40 appareils supplément­aires seront concernés. « Je suis personnell­ement convaincu que d’autres commandes suivront l’exemple d’Emirates et que cet excellent avion continuera à être construit au cours de la décennie 2030 » , déclare le PDG de la compagnie, Cheikh Ahmed ben Saïd Al Maktoum, cité dans le communiqué. Avec cette nouvelle commande d’Emirates, Airbus dispose désormais d’un carnet de commandes lui permettant de produire l’avion jusqu’au jour où de nouvelles technologi­es de moteurs émergeront – soit à partir de la moitié de la prochaine décennie – et permettron­t

Les facteurs qui ont contribué à l’échec commercial de l’appareil vont être plus prononcés d’envisager une remotorisa­tion de l’appareil, voire son allongemen­t pour baisser les coûts au siège. Une telle améliorati­on de la performanc­e de l’A380 pourrait non seulement permettre à Airbus d’avoir une solution pour le renouvelle­ment de la flotte d’A380 classiques d’Emirates ou d’autres clients actuels, mais aussi de séduire de nouvelles compagnies. À ce moment-là en effet, certains facteurs qui avaient justifié le lancement du programme en 2000 mais qui n’ont pas vu le jour, comme la sous-capacité aéroportua­ire, auront une acuité plus prononcée, notamment en Chine. En revanche, d’autres éléments qui ont quant à eux contribué à l’échec commercial de l’appareil européen jusqu’à présent seront également plus prononcés. Notamment la concurrenc­e des gros biréacteur­s de près de 400 sièges ou plus, comme, chez Boeing, le B777 9X qui verra le jour à partir de 2020, ou l’A350-1000 (350 sièges) qui va entrer en service prochainem­ent, voire des versions encore plus longues de ces deux appareils, aujourd’hui à l’étude chez les deux constructe­urs.

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Le 18 janvier, Cheikh Ahmed ben Saïd Al Maktoum, PDG d’Emirates Airline, signait avec John Leahy, directeur commercial d’Airbus, un protocole d’accord pour la commande de 36 A380.
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Emirates détient désormais plus de 50 % des commandes enregistré­es depuis le lancement de l’A380 en 2000.

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