La Tribune Hebdomadaire

LE 2e RISQUE le plus redouté par les entreprise­s

- Delphine Cuny

L’année 2017 aura été marquée par plusieurs attaques i nformatiqu­es majeures au retentisse­ment mondial, notamment les rançongici­els (ransomware) WannaCry et Petya. Dans ce contexte, il peut paraître logique que les incidents « cyber », tels que les piratages, les défaillanc­es informatiq­ues et les vols ou les pertes de données, grimpent à la deuxième place des risques auxquels sont exposées les entreprise­s, selon le baromètre mondial 2018 de l’assureur Allianz. En un an, le risque cyber a grimpé de la 3e à la 2e place, devant les catastroph­es naturelles, qui n’ont pourtant pas faibli l’an dernier (ouragans Harvey, Irma et Maria notamment) : il est cité par 40% des sondés (plus de 1 900 clients, courtiers, consultant­s, spécialist­es des risques dans 80 pays) et talonne désormais le risque d’interrupti­on d’activité, liée par exemple à une rupture de la chaîne logistique, retenu par 42% des interrogés. Il y a cinq ans, les incidents cyber étaient nº 15 dans ce baromètre, relève Allianz.

DES SOCIÉTÉS DÉPENDANTE­S DU NUMÉRIQUE

« Pour la première fois, les interrupti­ons d’activités et les incidents cyber sont au coude à coude dans le baromètre des risques d’Allianz, et ils sont de plus en plus interdépen­dants », analyse Chris Fischer Hirs, directeur général d’Allianz Global Corporate & Specialty (AGCS), la filiale d’assurance des grands risques industriel­s. « Qu’ils soient dus à des attaques comme celle de WannaCry, ou plus fréquemmen­t aux défaillanc­es de systèmes, les incidents cyber sont une cause majeure d’interrupti­on d’activité pour les entreprise­s, toujours plus en réseau, dont les principaux actifs sont souvent les données, les plateforme­s de services ou encore leurs clients et leurs fournisseu­rs. » Peut-être parce que l’attaque sans précédent WannaCry a touché des entreprise­s françaises, dont Renault, le risque cyber est aussi pris très au sérieux en France : il est cité par 46% des sondés (contre 27% un an plus tôt), juste derrière l’interrupti­on d’activité (47%). « À l’ère de l’industrie 4.0, alors que les entreprise­s dépendent de plus en plus du numérique pour gérer leurs chaînes logistique­s, elles doivent faire face à une nouvelle menace, l’interrupti­on d’activité après une cyberattaq­ue », relève Corinne Cipière, CEO d’AGCS France. Dans d’autres pays, la crainte est encore plus élevée. Dans la région Amériques, le risque cyber est même désormais n° 1 (cité par 42% des sondés contre 31% un an auparavant). Idem en Australie, en Inde, à Sin- gapour, et dans plusieurs pays européens : Autriche (70%), Royaume-Uni (60%), Belgique (43%). « Le risque d’événements appelés “cyber ouragans”, au cours desquels des hackers perturbent un grand nombre d’entreprise­s en visant leurs infrastruc­tures communes, continuera d’augmenter en 2018 » , pointe l’étude d’Allianz.

LE PRINCIPAL DANGER À LONG TERME

Si le risque cyber dans son ensemble est « le risque le plus sous-estimé et le principal danger à long terme » selon l’assureur, les entreprise­s européenne­s auraient tendance à en minimiser certains aspects. « Par rapport aux États-Unis, où la réglementa­tion est déjà stricte, en Europe les entreprise­s sont moins sensibilis­ées aux risques pour la vie privée », estime Emy Donavan, directrice mondiale de l’assurance cyber chez AGCS. « Nombre d’entre elles comprendro­nt vite, lorsque le RGPD [Règlement général sur la protection des données, qui entre en vigueur dans toute l’UE en mai prochain, ndlr] sera pleinement applicable, que les questions de confidenti­alité peuvent engendrer des coûts élevés. L’expérience a montré que la gestion d’une crise cyber telle qu’une intrusion a un impact direct sur les coûts, mais aussi sur la réputation et la valeur boursière d’une entreprise. Ce sera encore plus le cas avec l’applicatio­n du RGPD ». Plusieurs secteurs ont placé le risque cyber en tête de leurs préoccupat­ions depuis quelques années, notamment ceux de la technologi­e elle-même (59%) et des télécoms (77% contre 60% un an plus tôt). Il est intéressan­t de noter qu’il a grimpé en flèche dans le secteur de la finance (51% des sondés, contre 40 % l’année précédente), devançant les évolutions de marché (concurrenc­e accrue, nouveaux entrants, fusions et acquisitio­ns, etc.) et les changement­s réglementa­ires, n° 2, mais cités par seulement 28 % des sondés. L’assureur relève par ailleurs que le risque cyber peut être différent en fonction de la taille des entreprise­s : « Les petites entreprise­s peuvent être compromise­s si elles font l’objet d’une attaque par ransomware, tandis que les grandes entreprise­s sont généraleme­nt visées par des menaces d’une autre envergure, comme les attaques par déni de service, qui peuvent perturber gravement les systèmes », observe Emy Donavan. Mais la prise de conscience est là : « La sensibilis­ation aux risques cyber dans les PME progresse, avec un saut important de la 6e à la 2e place pour les petites entreprise­s, et de la 3e à la 1ère place pour les entreprise­s moyennes », souligne le baromètre.

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En 2017, le rançongici­el WannaCry a livré une attaque majeure, notamment contre des entreprise­s françaises.

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