Vision Les experts-comptables vont-ils disparaître ? par Pascal de Lima
Loin des préjugés réducteurs qui l’entourent, le métier d’expert-comptable a un bel avenir, à condition de trouver sa place dans la chaîne de valeur des entreprises en misant sur le qualitatif et le conseil.
L’expert-comptable est le seul garant de la vérité, et des réflexions nourrissent encore les débats sur la juste valeur d’une entreprise. En outre, professionnel du chiffre, il doit toujours rester indépendant des effets de mode car les ratios évoluent beaucoup. Mais aujourd’hui, l’expert-comptable, plus expert que comptable, doit se tourner de plus en plus vers le qualitatif et l’interprétation, métier d’autant plus difficile que les évolutions réglementaires et juridiques sont intenses. Ces évolutions sont notamment rythmées par une complexification du monde économique à base de spécialisation des métiers. De nouvelles formes de concurrence apparaissent, et les professions comptables doivent se renouveler. Visiblement, tout laisse à penser que la profession comptable serait menacée, par fatigue ou par modernité technologique. L’expert-comptable serait un Janus, ce dieu romain de la transition, confronté à une double pression ! D’un côté, il doit respecter des règles et être le garant de la sécurité et de la qualité, c’est son métier traditionnel. Là, il serait concurrencé par l’informatique, les intelligences artificielles et les blockchains, donc l’automatisation, puis il serait étranglé par les Big 4. D’un autre côté, pour évoluer, il doit se positionner sur la pertinence, l’interprétation, l’analyse financière, la valeur ajoutée… Ici, il pourrait subir une concurrence féroce des analystes financiers, des actuaires, des quants, des contrôleurs de gestion, des data scientists et même de Google. Ce n’est pas rien, mais contrairement à ce que l’on entend, l’expertcomptable a un bel avenir.
UNE PROFESSION CONFRONTÉE À DE MULTIPLES PRÉJUGÉS
L’expert-comptable vivrait, par exemple, dans son bureau seul, au milieu de ses livres de compte. En réalité, c’est un métier relationnel au coeur de l’entreprise. L’expert-comptable est d’ailleurs même souvent le principal partenaireconseil de la société. Mais ce n’est pas tout : la comptabilité serait routinière! Non seulement il existe une infinité de débouchés, de Bac à Bac+8, mais, de plus, des études connues du MIT montrent clairement que plus les tâches sont manuelles et routinières, plus la probabilité de chômage technologique est élevée. C’est vrai notamment pour certaines opérations de saisie de base et déclaratives. Cependant, les experts-comptables exercent tous des métiers diversifiés et cognitifs. Ici, l’intelligence artificielle ne pourra rien face à la connaissance réseau et à la capacité d’analyse de l’expert. Elle ne pourra rien non plus lorsque les principes seront supérieurs à la norme. Car l’avenir de l’expert-comptable est tout tracé vers les métiers de conseil, plus particulièrement dans la chaîne de valeur des entreprises en partenariat et en complémentarité avec son écosystème qu’on lui fait croire être son ennemi – dans l’interprofessionnalité : oui l’expert-comptable peut travailler avec la blockchain, l’informatique (il gagnera du temps), l’analyste financier, le quant, le contrôleur de gestion et le data scientist… Les Big 4? Une belle opportunité professionnelle! Les expertscomptables vont ainsi représenter le ser- ment d’Hippocrate du chiffre. Certes, il faudra s’adapter. Certes, il faudra concilier et même réconcilier des antagonismes – pédagogie dans l’expertise, pragmatisme dans le cognitif –, mais c’est aussi de cette manière que l’expert-comptable pourra exploiter toutes les opportunités qui feront de lui un acteur au service de la créativité et de la croissance.
L’intelligence artificielle ne pourra rien face à la connaissance réseau et à la capacité d’analyse de l’expert