La Tribune Hebdomadaire

Stéphane Distinguin (Cap Digital)

Fondateur de l’agence Fabernovel et président de l’associatio­n Cap Digital qui organise en juin le festival Futur.e.s, Stéphane Distinguin a toujours été passionné d’Internet et d’innovation, à la fois comme entreprene­ur et comme citoyen.

- PATRICK CAPPELLI @patdepar

Fils de deux professeur­s de français, Stéphane Distinguin en a gardé l’amour de la lecture, comme l’attestent les piles de livres qui s’entassent dans son bureau du xe arrondisse­ment. Profession­nellement, il n’a pas suivi l’exemple familial mais s’est consacré à l’innovation et au numérique. Il commence sa carrière dans le cabinet d’audit Deloitte, puis il « rencontre » Internet et les premiers navigateur­s, Mosaic et Netscape. Il part ensuite faire son service militaire sous le régime de la coopératio­n chez Deloitte à Londres. C’est dans la capitale anglaise qu’il a l’idée d’une startup de livraison à domicile. Une fois rentré à Paris, il crée City Rush avec Thomas Gramain, rencontré à l’ESCP. Le duo lève des fonds mais le projet s’arrête rapidement : « Nous étions en 2000, la bulle Internet était en train d’éclater, et nous avons senti que nous étions challengés sur des problèmes pour lesquels nous n’avions pas de solution », évoque le quadragéna­ire. C’est alors que son ancien patron de Deloitte lui propose de fonder Up&Up, un des premiers fonds d’amorçage de la place de Paris. C’est l’époque où émergent les concepts d’Internet, d’innovation, de startups. Stéphane Distinguin s’aperçoit cependant assez vite que la relation investisse­ur-startup n’est pas celle qui l’intéresse, et que pour réussir dans cette activité, il faut du temps et beaucoup d’argent. C’est pourquoi il développe en parallèle une activité d’accompagne­ment et de services chez Up&Up, qu’il quitte au bout de trois ans le 29 août 2003 pour créer Fabernovel le 1er septembre.

20 ANS À LA POINTE DE L’INNOVATION

Cette agence d’un nouveau genre consacrée à l’innovation invente de nouveaux produits et services numériques, et opère comme excubateur (espace dédié à la création d’activité qui produit de l’innovation) ou startup studio (entreprise qui crée des startups en s’appuyant sur des ressources partagées et une équipe multidisci­plinaire), « des concepts qui n’existaient pas et que nous avons contribué à inventer », précise l’amateur de théâtre et fan d’Édouard Baer. Les deux premiers contrats de la petite structure sont Transdev et la RATP. Pour la régie, Fabernovel développe des systèmes de cartograph­ie sur mobile et de dématérial­isation des tickets de bus via la startup Digitick, revendue en 2010 à Vivendi. Pour le père de deux garçons de 7 et 10 ans, trois facteurs ont contribué au succès de Fabernovel, qui emploie aujourd’hui 400 personnes : l’obsession du design, la volonté de faire ( faber est un mot latin signifiant artisan ou ouvrier), et les deux vagues numériques que sont le Web 2.0 et le mobile. En 2009, l’agence crée Applidium, une startup qui met au point Falldown 3D, un jeu sur mobile qui sera le plus téléchargé pendant dix mois, y compris aux ÉtatsUnis. En 2014, Fabernovel réalise une levée de fonds de « quelques millions d’euros » et rachète l’agence Web Buzzaka puis Data & Media, une agence de SEO (achat de mots-clés). Outre ses activités d’entreprene­ur, Stéphane Distinguin a aussi joué un rôle important dans l’écosystème associatif du secteur de la tech française. En 2004, il prend la présidence de Silicon Sentier, l’associatio­n historique des startups. « Bertrand Delanoë, le maire de Paris, me propose en 2006 de l’accompagne­r à San Francisco où je rencontre le board de Google. » Le politique commence à s’intéresser aux entreprene­urs et à Internet. L’année suivante, « la campagne de Ségolène Royal est ainsi très marquée par le Web 2.0 », évoque le joueur de tennis. Silicon Sentier ouvre La Cantine, premier espace de coworking en France, devenu Numa en 2013. En 2010, Stéphane Distinguin quitte Silicon Sentier pour prendre la présidence de Cap Digital, dont il était déjà administra­teur depuis 2006, le pôle de compétitiv­ité organisate­ur du festival de la création numérique Futur en Seine, renommé récemment Futur.e.s, gratuit et grand public, qui tient sa prochaine édition du 21 au 23 juin à la Grande Halle de La Villette (https://paris.futuresfes­tivals. com). « Cap digital ne rassemble pas uniquement des startups, mais aussi des grands groupes et des laboratoir­es, à l’échelle de l’Îlede-France. Sa mission est la R&D collaborat­ive, cofinancée par l’État et le secteur privé », décrit le président du pôle de compétitiv­ité qui comprend 1100 organisati­ons et dispose d’un budget de 5 millions d’euros. Après trois mandats d’administra­teur et onze ans de bons et loyaux services, Stéphane Distinguin va quitter Cap Digital. « Le statut d’associatio­n sans capitaux propres n’est plus pertinent. Il faut faire évoluer le mode de financemen­t », suggère l’entreprene­ur passionné de mobilier, qui réfléchit à se lancer dans la fabricatio­n d’objets bien réels après deux décennies d’immersion numérique.

Sa mission est une R&D cofinancée par l’État et le privé

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STÉPHANE DISTINGUIN

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