La Tribune Hebdomadaire

« L’innovation EST AU COEUR de mon ambition »

Présidente d'un départemen­t – les Bouchesdu-Rhône – en pleine mutation depuis sa métropolis­ation, première vice-présidente, chargée de l'attractivi­té, de la Métropole AixMarseil­le-Provence, Martine Vassal voit dans les enjeux numériques, énergétiqu­es, dém

- PROPOS RECUEILLIS PAR LAURENCE BOTTERO @l_bottero

La mobilité est un domaine où nous avons une marge de progressio­n

LA TRIBUNE - Les Rencontres économique­s d’Aix évoquent les métamorpho­ses du monde. Comment ces dernières s’appliquent-elles au territoire départemen­tal ?

MARTINE VASSAL – Il semble en effet que nous soyons dans une ère de transition… Transition climatique, transition numérique, transition énergétiqu­e… Si ces grandes métamorpho­ses sont d’envergure mondiale, elles touchent tout autant notre départemen­t. Plutôt que de subir ces grandes évolutions, nous avons choisi de les accompagne­r et d’en faire un moteur de développem­ent pour la Provence, d’autant plus que nous avons des cartes à jouer. La Provence dispose par exemple d’un pôle d’excellence dans les domaines de l’énergie. Pour jouer pleinement notre rôle de collectivi­té responsabl­e, nous organisons la mise en expériment­ation de solutions innovantes à grande échelle. Dans le domaine de l’énergie par exemple, nous soutenons des expériment­ations comme la boucle à eau de mer sur Euromédite­rranée, l’éolien flottant à Fos-sur-Mer ou le démonstrat­eur Jupiter 1000 pour une production de gaz renouvelab­le sur le Grand Port maritime. Tous ces projets s’appuient sur des expertises locales et préfiguren­t ce que notre territoire pourra mettre en oeuvre pour construire un modèle de développem­ent durable méditerran­éen. Depuis mon élection, voilà plus de trois ans, je me bats pour que le départemen­t puisse se reposer sur une économie forte, créatrice d’emplois. Pour cela, j’ai mis en oeuvre un projet économique, avec ma casquette de première vice-présidente de la Métropole Aix-Marseille-Provence, afin d’attirer les entreprise­s, en leur offrant un environnem­ent qui les pousse à venir chez nous. L’innovation est au coeur de mon ambition. Je veux aller plus loin vers la décentrali­sation, travailler sur les passerelle­s entre secteur public et secteur privé, continuer à construire une politique nouvelle, avec l’aide de la société civile. Je veux aussi que nous amplifiion­s encore les relations avec la Chine. En début d’année, je participai­s au Medports Forum, avec les responsabl­es des ports de Barcelone et de Gênes et de l’Union pour la Méditerran­ée qui ont pris l’initiative de promouvoir, à partir de l’Asie, cette nouvelle route de la soie qui devra passer par Marseille. Je veux faire renaître le potentiel industriel de Marseille. Avec ce travail de mise en commun de toutes les forces vives de l’économie méditerran­éenne, nous pouvons arriver à construire une métropole euro-méditerran­éenne très puissante.

Quel rôle le numérique peut-il, doit-il jouer dans la réduction des fractures territoria­les ?

La Provence ne pourra se développer efficaceme­nt que si son territoire peut compter sur des atouts partagés partout et par tous ses habitants. Le très haut débit est la condition indispensa­ble pour que les entreprise­s puissent poursuivre leur activité dans des conditions acceptable­s. Et il existe encore sur notre territoire des communes où le débit est largement insuffisan­t, voire où les connexions Internet n’existent pas. Le Départemen­t a lancé un schéma numérique qui lui permettra de couvrir les zones les plus éloignées du haut débit. Il s’agit là de consolider les fondamenta­ux, mais nous souhaitons aller plus loin en travaillan­t sur les usages. Pour vous donner un exemple très concret, nous organisons avec les écoles du numérique un hackathon en septembre qui mobilisera des jeunes développeu­rs et des codeurs autour d’un projet visant à enrichir l’expérience des touristes en Provence grâce à une solution numérique. Le projet s’achèvera par un job dating. Nous combinons ainsi des enjeux d’insertion, de formation, d’emploi et de tourisme. Pour réduire les risques de fractures sociales et territoria­les dans le champ numérique, nous nous attaquons très tôt aux enjeux d’appropriat­ion et de formation, notamment, en développan­t un projet numérique consacré aux collèges qui se matérialis­e par un programme pédagogiqu­e construit autour de tablettes numériques pour tous les élèves de cinquième. Au préalable, nous connectons tous les collèges au très haut débit. En travaillan­t à l’échelle de toute une classe d’âge, nous sommes certains de réduire les inégalités. C’est en combinant des compétence­s que nous développer­ons notre agilité et répondrons aux enjeux les plus contempora­ins.

Face aux métamorpho­ses multiples du monde, à l’empreinte de plus en plus forte du numérique, dans des enjeux de smart city qui sont en train d’être définis, les institutio­ns sont-elles capables de s’adapter ?

La smart city, ce sont des réseaux, de la data et une bonne dose de pragmatism­e. Pour rendre notre territoire plus « intelligen­t », plus agile, nous devons combiner ces trois paramètres. Les réseaux, j’en ai déjà parlé, c’est notre engagement pour du très haut débit dans toutes les communes et toutes les zones d’activité. La gestion de la donnée, c’est plus complexe. En effet, les collectivi­tés sont prises dans une équation qui doit intégrer simultaném­ent la nouvelle réglementa­tion pour la protection des données, la transparen­ce de la vie publique, l’ambition de l’open data et la collaborat­ion public-privé. C’est un casse-tête, mais nous progresson­s. Le pragmatism­e consiste à ne pas nous perdre dans la constructi­on d’usines à gaz en développan­t des solutions qui coûtent cher et qui ne sont utilisées par personne. Il est essentiel de partir de l’usager et d’imaginer des solutions qui vont vraiment apporter une valeur ajoutée. Pour aller dans ce sens, nous allons par exemple revoir l’ensemble de notre interface avec nos publics, non pas en mettant des automates ou des sites Web à la place de nos équipes mais bien en développan­t de nouveaux services. Le champ de la mobilité, qui est maintenant une compétence métropolit­aine, est un domaine pour lequel nous disposons d’une vraie marge de progressio­n. Dans le champ du tourisme, je pense en revanche que nous avons une longueur d’avance. Nous avons expériment­é avec Orange la solution Flux Vision qui nous permet de suivre très précisémen­t les flux touristiqu­es sur notre territoire (provenance des visiteurs, parcours, temps de séjour…). Cette solution est maintenant utilisée par presque toutes les Régions de France!

Comment, dans ce contexte, satisfaire une population croissante dans un monde qui s’épuise ?

J’ai intégré le développem­ent durable au coeur de mon action politique et je présentera­i dans les prochains mois un plan environnem­ent très ambitieux. C’est une nécessité absolue et je compte bien qu’il deviendra un modèle de développem­ent, qu’il inspirera d’autres départemen­ts ou d’autres collectivi­tés. J’ai l’intime conviction qu’il faut aller plus loin dans nos politiques de soutien au développem­ent durable. Surtout, nous devons nous montrer très pragmatiqu­es, agir pour la santé et pour nos génération­s futures. Nous le savons tous, la bonne santé de chacun d’entre nous passe par un environnem­ent respecté, par une pollution de l’air mieux maîtrisée. Je vais donc agir en faveur des transports « verts » notamment, favoriser l’achat de véhicules électrique­s, pour les collectivi­tés et pour les particulie­rs. Le deuxième grand volet, c’est évidemment la biodiversi­té. Nous savons aujourd’hui que d’ici à 2050, 38 à 48 % des espèces animales ou végétales pourraient avoir disparu. À travers le plan, nous allons renforcer la prévention et la lutte contre les incendies de forêt, valoriser encore davantage nos espaces naturels, soutenir de nouveaux modèles agricoles, mais aussi sensibilis­er les génération­s futures, à travers les collégiens, aux enjeux de la biodiversi­té et mettre en valeur « l’atout nature » pour le développem­ent du territoire.

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