Stéphane Couchoux (Fidal) : « Dans le mécénat, la défiscalisation n’est que la cerise sur le gâteau »
STÉPHANE COUCHOUX - La philanthropie ou le mécénat est un acte gratuit et irrévocable en faveur d’une action présentant un caractère d’intérêt général portée par un organisme public ou privé à but non lucratif, comprenant associations et fondations. Cette notion d’intérêt général est donc au coeur de l’acte philanthropique et, en ce qui concerne sa dimension juridique, elle est précisée par la doctrine de l’administration fiscale qui s’est totalement approprié le concept, faute d’une intervention législative. Mais si l’on en juge par les nombreux articles plus ou moins polémiques sur la philanthropie et les fondations en France, on voit bien que cette notion d’intérêt général revêt une dimension culturelle et politique très marquée dans notre pays. Cette notion se heurte toujours à une conception volontariste d’un État qui devrait incarner seul l’intérêt général. Or, le législateur a souhaité, il y a quinze ans, avec la loi Aillagon, encourager les acteurs privés (entreprises et particuliers) à s’engager pour l’intérêt général moyennant une forte incitation fiscale. Les souhaits du législateur semblent suivis dans les actes : la pratique de mécénat s’est largement développée et les fondations se sont multipliées en France. Selon le député Gilles Carrez, le coût pour les finances publiques des dispositifs de mécénat est évalué pour 2017 à 1390 millions d’euros pour les dons des particuliers et 990 millions d’euros pour les dons des entreprises, soit près de 2,4 milliards d’euros au total, en augmentation constante depuis la loi Aillagon de 2003 (Rapport à l’AN du 13 juin 2018). Certains y voient une mesure purement libérale venant contrecarrer le rôle traditionnel de l’État, seul garant des politiques publiques financées par le biais de nos impôts. Dès lors, toute tentative de prise en charge de questions d’intérêt général par le « privé » est considérée comme suspecte. Les autres y verront un aveu de la difficulté, voire de l’incapacité pour l’État à suivre seul les mutations de notre société alors que la pression fiscale est forte dans notre pays. L’État n’a d’autre choix que d’en appeler à l’intervention des acteurs privés pour compléter ses actions publiques. En résumé, la notion d’intérêt général demeure complexe : l’immixtion du « privé » dans cette sphère revêt un caractère encore polémique en France. Pourtant, le cadre juridique de la philanthropie est conçu de telle sorte qu’elle bénéficie à l’intérêt général avant de servir des intérêts particuliers. Pour une entreprise, il ne s’agit certainement pas de donner pour défiscaliser ! Certes, les dirigeants d’entreprise prennent en compte le coût final, après défiscalisation à 60 % sur leur IS de leur opération de mécénat. Toutefois, il ne s’agit que de la « cerise sur le gâteau ». Aussi, en pratique, nous travaillons prioritairement sur le « gâteau », à savoir le projet porté par l’entreprise au travers de sa politique de mécénat qui sera fréquemment incarnée par une « fondation » et très souvent par un fonds de dotation. Ces principales interrogations rejoignent une question de fond que nous abordons avec une grande attention : quels bénéfices secondaires sont recherchés et attendus par l’entreprise avec ses actions de mécénat? Il s’agira, par exemple, de prolonger une démarche RSE ; d’améliorer une politique RH (cohésion sociale, attractivité en vue de recrutements, fidélisation des collaborateurs), d’inscrire le mécénat dans la stratégie de communication voire de marque de l’entreprise, de travailler sur son influence. Nos clients ont alors pleinement