Énergie et climat : l’heure des choix
Dans son rapport annuel, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) esquisse différents scénarios dans lesquels l’électricité joue un rôle de plus en plus central. Elle met aussi en évidence le poids à long terme pour le climat des infrastructures énergétiques et donc des futurs choix gouvernementaux. Électrification accélérée, développement continu des énergies renouvelables, bouleversements sur les marchés pétroliers, globalisation du marché du gaz naturel, rôle central des choix politiques en matière d’énergie… telles sont les prédictions contenues dans le dernier rapport de l’AIE. Côté chiffres, d’ici à 2040 la demande globale en énergie devrait croître de 25 % et celle en électricité de 60 %. Ce développement nécessitera des investissements de 2 000 milliards de dollars par an, dont 70 % seront portés par les politiques publiques. D’après les auteurs, les marchés pétroliers sont à l’orée d’une nouvelle période d’incertitude et de volatilité, et l’approvisionnement pourrait même traverser une phase tendue au début des années 2020. En effet, la demande devrait continuer à augmenter d’ici à 2040 pour répondre aux besoins de la pétrochimie, du transport routier et de l’aviation. Pour ce faire, il est impératif que le nombre de projets conventionnels approuvés soit multiplié par deux, ou que le gaz de schiste américain produise 10 millions de barils supplémentaires chaque jour d’ici à 2025. La demande en gaz naturel devrait également poursuivre sa croissance.
La baisse des coûts du solaire va se poursuivre
L’électricité, dont la croissance se fera aux deux tiers grâce aux énergies renouvelables, représentera 40 % du mix énergétique en 2040, contre 25 % aujourd’hui. Mais le charbon restera la première source d’énergie devant le gaz, qui devrait rester stable, à 20 %, et le nucléaire, à 10 %. Le solaire photovoltaïque poursuivra sa course en tête et ses coûts (déjà divisés par dix en dix ans) continueront à baisser, de 40 % d’ici à 2040. Mais d’autres technologies bas carbone, en particulier dans l’efficacité énergétique, nécessiteront d’importants investissements. Le développement du numérique et celui des véhicules électriques sont les causes principales de l’électrification attendue. Mais, dans le cas où cette dernière pénétrerait encore plus les transports, les bâtiments et l’industrie, comme le prévoit le scénario « Le futur est électrique », cela pourrait conduire à une hausse de 90 % de la demande en l’électricité, et à un pic de la demande pétrolière dès 2030. En revanche, cela n’aurait qu’un impact négligeable sur les émissions de CO2, dans la mesure où une part importante de l’électricité continuerait d’être produite à partir de sources fossiles.
Utiliser plus intelligemment le système existant
D’ici à 2040, la demande globale en énergie devrait croître de 25 % et celle en électricité de 60 %
Un autre scénario, « Sustainable development », prévoit que les émissions de gaz à effet de serre plafonnent dès 2020, avant de décliner de façon abrupte. Mais, dans l’énergie, un tiers des émissions sont déjà enfermées ( locked in) dans les infrastructures, notamment les centrales à charbon asiatiques, dont l’âge moyen est de 11 ans, contre 40 ans pour les centrales américaines ou européennes. D’où la nécessité d’opter dès maintenant pour des investissements dans le renouvelable, mais aussi d’utiliser plus intelligemment le système existant. Pour ce faire, l’AIE expose plusieurs pistes : réformer les marchés de l’énergie, renforcer les réseaux, multiplier les interconnexions et exploiter tout le potentiel des compteurs intelligents et des batteries. Dans tous les cas, l’Agence internationale de l’énergie insiste sur le rôle essentiel des gouvernements dans les politiques énergétiques et l’importance de faire les bons choix dès aujourd’hui afin d’éviter le poids futur des émissions « trappées » dans des infrastructures fortement émettrices.