Nicolas Princen (Glose)
Nicolas Princen aurait pu faire une carrière politique mais il a préféré monter sa startup Glose, outil de lecture numérique et réseau social.
En 2007, Nicolas Sarkozy est élu président de la République. Aux commandes de la task force numérique qui a renouvelé la manière de mener une campagne électorale : Nicolas Princen, un jeune homme de 24 ans. Avant de lancer elysee.fr, la plateforme digitale du candidat Sarkozy, ce petit-fils d’agriculteurs a commencé par un parcours scolaire exemplaire : Khâgne et hypokhâgne au lycée Henri IV de Paris, l’École normale supérieure de la rue d’Ulm et la Sorbonne, où il obtient deux masters de philosophie et de relations internationales, Sciences Po (qu’il abandonnera avant d’être diplômé pour rejoindre l’Élysée) et HEC. « Les études ont toujours été très importantes dans ma famille », reconnaît Nicolas Princen. Rue d’Ulm, il est marqué par le discours du directeur de l’époque : « Vous êtes normalien aujourd’hui et pour le reste de votre vie. » « Cette arrogance intellectuelle, c’était exactement l’inverse de ce que je voulais entendre », évoque le fondateur de Glose, un commentaire linguistique ajouté dans les marges. En quête de nouveaux défis, il part en stage au Japon, puis en Chine : « J’avais besoin de descendre de la Montagne Sainte-Geneviève, l’adresse de Normale Sup’, pour découvrir le monde réel. » HEC, en revanche, répond aux attentes du jeune homme hyperactif. Lors de son année de stage en 2006 à New York, il atterrit chez Euro RSCG, agence de publicité du groupe Havas. Les réseaux sociaux viennent de naître, on parle de Myspace et Facebook est toujours réservé aux étudiants. Visionnaire, Nicolas Princen réalise une des premières études de l’impact de ces réseaux sur les jeunes. Il écrit une note sur le sujet qui circule dans les cercles de l’UMP. De retour à Paris, il reçoit un coup de fil du QG du candidat à la présidentielle. Tout s’emballe pour le jeune homme. « Je vois Nicolas Sarkozy, tous ces ministres passés et futurs, et j’ai vraiment l’impression d’être passé de l’autre côté du miroir », avoue le trentenaire, bombardé sur l’heure responsable numérique de la campagne. Il lance la chaîne YouTube « Libre cours » qui met en ligne des vidéos de militants. Une nouveauté qui cartonne au point que des Américains viennent étudier ces nouvelles pratiques. Une fierté pour cet admirateur des États-Unis, où il a vécu les quatre premières années de sa vie. Sarkozy élu, Nicolas Princen devient chargé de mission auprès du porte-parole du président David Martinon, puis travaille avec Franck Louvrier, responsable de la communication. L’amateur de boxe gagne du galon et le voilà conseiller technique (le plus jeune de l’histoire de l’Élysée) à l’économie numérique. Il est à l’origine du Conseil national du numérique et du IG8 (I pour Internet) qui a lieu la veille du sommet du G8 de 2011, où le normalien côtoie Mark Zuckerberg et autres grandes figures du Web. En 2012, il reprend la main sur le numérique lors de la nouvelle campagne de Sarkozy. Après la défaite, le jeune homme refuse plusieurs offres alléchantes. « Qui a le plus d’impact sur la marche du monde? Nicolas Sarkozy ou Larry Page, cofondateur de Google? », s’interroge alors le startuppeur, qui fait du conseil pour financer Glose. Avec deux développeurs, il bâtit dans son salon l’outil de « la lecture du futur ». Objectif : repenser l’expérience de la lecture pour une nouvelle génération entourée d’écrans. Le site et l’application Glose offre une lecture enrichie, avec la possibilité de créer un profil, d’inviter des amis et de laisser des commentaires dans la marge du texte grâce à un algorithme de NLP ( natural language processing ou traitement automatique du langage naturel). La plateforme boostée par l’IA propose un million de livres numériques en français et en anglais à lire puis à acheter. « Nous avons rendu interactifs les formats de lecture numérique epub et PDF », décrit Nicolas Princen. Le marché américain pèse 75% du business de la startup, qui fournit sa technologie à une grande chaîne de librairies. En juin 2018, Glose a levé 3 millions d’euros et s’attaque désormais au marché de l’éducation. « Des professeurs nous écrivent pour nous dire que notre appli rend la lecture plus agréable et plus efficace pour leurs élèves », se félicite le diplômé d’HEC. À venir : une version « éducation » de Glose avec le profil de l’école, du professeur, de la classe et des fonctions d’archivage, de dictionnaire ou de défis de lecture. Établissements scolaires et collectivités payeront un abonnement pour leur édition privée de l’appli. « L’apprentissage de la lecture conditionne la construction du cerveau. Il n’y aura pas de futur sans lecture », conclut le fan de Houellebecq.
Nous avons rendu interactifs les formats epub et PDF