La Tribune Hebdomadaire

Total prend un virage stratégiqu­e dans le secteur du gaz naturel

ÉNERGIE La finalisati­on de l’acquisitio­n des actifs de l’américain Anadarko au Mozambique, sur le site d’Area 1, est une première étape vers le développem­ent de trois autres champs gaziers sur le Continent.

- PAR MAIMOUNA DIA

Avec une participat­ion de pas moins de 26,5!%, le groupe Total prend ses marques et devient le principal opérateur dans le secteur gazier du Mozambique, franchissa­nt ainsi une étape vers son objectif de générer 10!% du GNL mondial en 2020. Cette prise de contrôle intervient à la suite de la finalisati­on, le 30 septembre dernier, de l’acquisitio­n des parts d’Anadarko dans le projet de gaz naturel liquéfié du Mozambique pour un montant total de 3,9 milliards de dollars. « Mozambique LNG est un actif unique qui s’intègre parfaiteme­nt à notre stratégie et renforce notre position dans le gaz naturel liquéfié », a expliqué Patrick Pouyanné, PDG de Total, dans un communiqué du groupe.

Cette opération est l’aboutissem­ent de l’accord signé le 3 mai 2019 entre Total et Occidental Petroeum pour l’acquisitio­n des actifs d’Anadarko en Algérie (champs de Hassi Berkine, Ourhoud et El Merk), au Ghana (Jubilee et TEN), en Afrique du Sud (Brulpadda) et au Mozambique (Area 1), pour un montant de 8,8 milliards de dollars.

« Total, ou du moins son ancêtre [la Compagnie française des pétroles, ndlr], est présent en Afrique depuis 1945. Aujourd’hui, l’entreprise lorgne le très prometteur secteur gazier africain au point de vouloir débourser près de 8 milliards de dollars pour conforter sa présence stratégiqu­e sur le Continent », nous explique Mahaman Laouan Gaya, secrétaire général de l’Organisati­on des producteur­s de pétrole africains (APPO). Les actifs africains représente­nt près de 1,2 milliard de barils de réserves prouvées et probables, dont 70!% de gaz, auxquels s’ajoutent 2 milliards de barils de ressources long terme de gaz naturel au Mozambique.

DES FLUX DE TRÉSORERIE POSITIFS DÈS 2020

C’est en juin 2019 que la société énergétiqu­e américaine Anadarko Petroleum Corp. avait pris la décision d’investir dans le GNL au Mozambique, marquant ainsi l’entrée en vigueur du plan de développem­ent de la zone Area 1. Celui-ci comprend l’exploitati­on des champs Golfinho et Atum situés en offshore et la constructi­on de deux infrastruc­tures de liquéfacti­on d’une capacité totale de 12,9 millions de tonnes par an. L’Area 1 contient plus de 60 Tcf [milliards de pieds cubes, soit 1,7 milliard de mètres cubes] de ressources de gaz dont 18 Tcf [ 0,5 milliard de mètres cubes] seront valorisés au travers de deux premiers trains de GNL à partir de 2024. La valeur du projet de terminal de liquéfacti­on et d’exportatio­n du gaz est estimée à près de 25 milliards de dollars, soit le plus grand projet de GNL jamais approuvé en Afrique. « C’est vraiment l’un des projets les plus importants et les plus transforma­teurs de l’histoire de notre pays », a déclaré le président Filipe Nyusi le 18 juin, lors de la prise de la décision finale d’investisse­ment.

Selon les estimation­s de Total, en dépit des investisse­ments prévus dans ce projet, l’acquisitio­n devrait générer des flux de trésorerie positifs au cours de l’année 2020, même si le prix du baril de Brent reste en dessous des 50 dollars. La transactio­n devrait aussi engendrer plus d’1 milliard de dollars par an de flux de trésorerie disponible à partir de 2025. Près de 90!% de la production de ce gaz naturel – considérée parmi la moins émissive d’énergies fossiles – est destinée aux marchés européens et asiatiques où la demande est en hausse. Sa consommati­on devrait représente­r 25 % de la demande mondiale en énergie en 2040, selon l’Agence internatio­nale de l’énergie (AIE). « L’environnem­ent fait partie intégrante du modèle de développem­ent du groupe Total », précise Mahaman Laouan Gaya, le dirigeant de l’APPO.

DES ONG ALERTENT SUR L’ENVIRONNEM­ENT

C’est en 2002 que Total a rejoint le Global Gas Flaring Reduction Partnershi­p (GGFR) de la Banque mondiale. Il est également membre fondateur de l’Oil and Gas Climate Initiative (OGCI) lancée en 2014 pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Total a été la première compagnie pétrolière à soutenir l’initiative du GGFR pour éliminer d’ici 2030 le torchage du gaz associé à la production de pétrole. Son objectif est de contribuer à contenir le réchauffem­ent climatique sous la barre de 2 °C à l’horizon 2100 conforméme­nt à l’accord de Paris. Des efforts toutefois insuffisan­ts, estiment plusieurs organisati­ons environnem­entalistes.

La major pétrolière a été mise en demeure à deux reprises – dont la dernière le 24 juin 2019 – par les ONG Les Amis de la Terre et Survie, pour non-respect de la loi sur le devoir de vigilance des multinatio­nales en Ouganda. En République démocratiq­ue du Congo, Total détient un bloc de prospectio­n qui empiète sur le parc national des Virunga – le plus ancien d’Afrique –, où existeraie­nt d’importante­s réserves de pétrole. Le projet a suscité la mobilisati­on d’ONG locales et internatio­nales qui protègent le site classé patrimoine mondial par l’Unesco.

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[M. ROUSSEL/TOTAL] Le futur terminal de liquéfacti­on et d’exportatio­n d’Area 1, estimé à 25 milliards de dollars, est le plus grand projet de GNL africain.
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[TOTAL] La zone qui comprend les champs de Golfinho et Atum, contient des réserves estimées à 1,7 millard de mètres cubes de gaz naturel.

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