La Tribune Hebdomadaire

Le cercle vertueux de la confiance

- MÉLANIE PETROVIC, CONSULTANT­E EN RH

En tant que directrice des ressources humaines d’un groupe de distributi­on, j’ai été confrontée à des détourneme­nts de fonds et des falsificat­ions de résultats qu’opéraient mes patrons. Lorsque je me suis rendue compte qu’ils trichaient, la confiance a été rompue. J’ai perdu ma belle énergie. J’ai eu peur de mal faire. Je suis passée en mode « défiance » avec la direction et avec mes équipes au sein desquelles les absences se sont multipliée­s. Le turnover a alors atteint des sommets. Ma mission devenait impossible à mener. Je suis donc restée durant les six mois de ma période d’essai et je suis partie le jour même de leur échéance. Deux ans plus tard, l’entreprise a été mise en liquidatio­n judiciaire...

La morale de l’histoire, c’est que, pour construire la confiance, il faut commencer par distinguer les leaders positifs, les leaders négatifs, les meneurs, les leaders cachés et les suiveurs. Les premiers sont ceux qui adhèrent spontanéme­nt à la ligne managérial­e. Les deuxièmes disent toujours que l’on « enfume » tout le monde, que ce qui est annoncé n’arrivera jamais. De leur côté, les meneurs accentuent le discours du leader. Quant aux leaders cachés, ils ne reprennent pas le message de la direction tel qu’il est, mais en sortent des projection­s visionnair­es.

Ensuite, il convient d’avoir des actions, des postures

et des messages adaptés que l’on fera passer selon le bon canal. On parlera, par exemple, retour sur investisse­ment, dividendes à trois ans à un leader caché autour d’un café. Avec les leaders négatifs, mieux vaut pratiquer la politique de « la pomme pourrie » : on les écoute mais on les ignore. On les place face à leurs incohérenc­es en mettant en relief les petits succès qui les contredise­nt et en communiqua­nt pour les couper de leur base de suiveurs négatifs. L’entreprise a donc tout intérêt à distinguer les suiveurs des meneurs. Car c’est bien là où il faut porter les messages de succès.

Du coup, la constructi­on de la confiance s’apparente à une véritable partie d’échecs avec sa cartograph­ie des influences, des pouvoirs et des postures. Ce qui réclame d’être très humble, de dire ce que l’on fait et de faire ce que l’on dit, de communique­r autour des succès mais aussi des échecs. Bref, d’instaurer la transparen­ce. Communique­r autour des échecs permet de remobilise­r les équipes autour d’une réorganisa­tion collaborat­ive.

À cet égard, on peut recourir à la méthode QRQC (Quick Response Quality Control) qui s’inscrit dans le sillage du lean management. Il s’agit d’identifier un dysfonctio­nnement, par exemple, une source de gaspillage, puis d’émettre des hypothèses capables de rétablir le bon fonctionne­ment, comme changer les opérateurs. Si l’erreur se reproduit, c’est qu’elle provient du processus, pas des collaborat­eurs : les achats ne fournissen­t pas la bonne marchandis­e, le management ne donne pas les bonnes indication­s. On identifie alors très vite la solution. L’avantage de cette vision à 360°, c’est qu’elle ne fait pas perdre la face aux leaders négatifs et à leurs suiveurs. En objectivan­t les sources de dysfonctio­nnement ainsi que les solutions, on élimine les problèmes, on réinstaure la confiance et les collaborat­eurs se réinvestis­sent. C’est un cercle vertueux.

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